Grà¢ce à une collaboration exemplaire avec les maîtres d'ouvrage, l'architecte Yassir Khalil a pu concevoir et réaliser en un temps record le nouveau bà¢timent d'une imprimerie casablancaise. Du centre-ville vers le quartier industriel de Lissasfa, une mutation réussie pour un gain de production et une harmonisation du lieu de travail. Dans ce patchwork hétéroclite de plateaux de bureaux qu'est la zone d'activités de Lissasfa, le bâtiment en R+1 se démarque aisément. L'architecte a composé avec trois éléments, originaux dans ce quartier industriel – environnement, signalétique et morphologie – pour en réaliser autant de repères qui signent son identité. Le premier concerne les abords. Un jardin planté de cactus et d'agaves s'offre autant à l'espace public de la route qu'à celui, privé, de l'entrée de l'établissement. Leur statut est simplement délimité par une enceinte largement ouverte, composée, au centre, d'une portion de muret en arc de cercle accompagné de lisses métalliques tubulaires. Sur la droite l'entrée des produits, alors que sur la gauche un portique désigne celle des personnes. Pas de signalétique mais un signal Le deuxième joue sur l'absence de signalétique, remplacée par la création d'un signal. En avant du bâtiment et sur sa partie droite, un mât bleu transperce une fine lame horizontale – un aplat triangulaire de béton également bleu – comme une agrafe qui relie et annonce les deux premières séquences de la façade. L'ultime élément est caractérisé par l'expression volontairement minimaliste de cette dernière. Des murs pleins entaillés de baies nécessaires à l'activité : fentes horizontales pour l'éclairage naturel des bureaux ou «bouche» pour l'approvisionnement en marchandises. Cette austérité est atténuée par l'emploi de couleurs contrastées – ocre jaune, gris ou bleu – et par le modelage en trois plans de la composition. Au centre, un voile courbe en béton percé de deux bandes en pavés de verre. Son positionnement légèrement désaxé crée, avec le mouvement en biais de la parcelle, un entre-deux sur la gauche pour l'entrée des bureaux. Sur la droite les deux plans sont plus proches. La parcelle toute en longueur, comprise entre deux voies, présentait vers l'arrière un dénivelé de plus de 3 mètres que l'architecte optimisa dans son travail en plan. Identique pour les deux niveaux, il se répartit en trois zones distinctes. Les fonctions bien hiérarchisées à chaque étage permettent d'obtenir «une marche en avant» constante des produits. En façade principale et en rez-de-chaussée, accueil, administration et salle de réunion, puis les bureaux de direction à l'étage. En façade arrière, les vestiaires du personnel, les sanitaires et la zone de livraison des marchandises finies. Au centre, les étapes de l'impression dans de vastes espaces éclairés et ventilés. En bas, l'arrivée du papier et les rotatives. Un monte-charge assure le transfert des imprimés depuis l'atelier d'impression vers celui du façonnage à l'étage. Deux escaliers, l'un contiguà« à l'administration, l'autre s'enroulant autour du monte-charge favorisent une circulation rapide des personnes sur les différents lieux de production. Le bâtiment est de structure classique. Une ossature en béton de poutres soutenues par des colonnes qui sont, dans les ateliers, laquées de rouge, noir, jaune et bleu, couleurs utilisées en imprimerie. La dalle du rez-de-chaussée est renforcée pour accepter le poids des machines, celle de couverture a reçu, pour augmenter les performances thermique et acoustique de la construction, une nappe de liège grossier de 20 mm posée avant l'étanchéité de finition de la toiture terrasse non accessible. Le projet, réalisé en l'espace de 4 mois, n'aurait pu aboutir sans une relation exemplaire avec les deux maà®tres d'ouvrage, relation que Yassir Khalil décrit comme «liberté que l'on m'a donnée pour travailler ce petit bâtiment de sorte qu'il se démarque du côté aride des bâtiments industriels». Au-delà d'une expression formelle et du gain de productivité, c'est une harmonisation du lieu de travail que le nouveau bâtiment a permis Un déménagement qui change la donne Alors que l'imprimerie souhaitait investir dans une nouvelle génération de machines d'impression – une Heidelberg 4 couleurs, entièrement automatisée – le représentant de la marque refusa d'installer une telle pièce dans les locaux existants, aménagés depuis 13 ans dans le sous-sol d'un immeuble situé entre le boulevard Hassan II et la rue Mostapha El Mâani. Trois équipes se sont relayées jour et nuit pour réaliser en 3 mois un bâtiment pour l'accueillir. Arrivée avant la fin des travaux, la machine fut installée et protégée dans le nouveau bâtiment non achevé. Ce déménagement a permis à l'entreprise d'augmenter sa capacité de production de 100% et son personnel de 30% tout en diminuant considérablement ses problèmes d'accès et de stationnement.