Nous sommes à moins d'un an, dix mois tout au plus, de la fin de mandat du gouvernement Benkirane. Il est fort probable que d'ici aux prochaines élections législatives, comme le relèvent plusieurs observateurs, tout ce que fera et entreprendra l'Exécutif sera à connotation, ou en tout cas prêtera à des interprétations «électoralistes», si ce n'est déjà le cas depuis quelque temps. Cela peut paraître normal, naturel de la part de la classe politique. Mais attention, mettent en garde les analystes, les enjeux politico-politiciens et les petits calculs partisans deviennent dangereux quand ils relèguent au second plan l'intérêt général et les priorités nationales. Les quatre années n'ont pas suffi au gouvernement pour parachever la déclinaison de la Constitution de 2011. Des lois organiques fondatrices sont toujours attendues. Des chantiers de réforme importants attendent encore et surtout doivent être enclenchés, mis sur les rails et verrouillés sur leur cap. Il faut que ces chantiers soient ouverts à un moment où, conjoncture et ambiance générale favorables aidant, s'est ouverte au Maroc une fenêtre temporelle intéressante pour entamer des réformes qui étaient par le passé intouchables. Pas plus tard qu'en octobre dernier, en ouverture de la session parlementaire d'automne, le Souverain exhortait les élus de la Nation à accélérer la cadence pour sortir avant la fin de leur mandat, donc d'ici l'été prochain, des textes importants tels que la loi sur la langue amazighe, le Conseil national des langues et de la culture marocaine ou encore un texte qu'attendent impatiemment et depuis des années la communauté des affaires et les syndicats, à savoir la loi sur le droit de grève. Il y a aussi d'autres réformes urgentes qui doivent être lancées tout de suite comme la refonte des caisses et régimes de retraites. D'ailleurs dans le même discours, le Souverain avait sans détour fait allusion à cette fâcheuse tendance de la classe politique de préférer la surenchère et le spectacle au détriment des questions majeures qui nécessitent une action collective et constructive. Le gouvernement jouera-t-il la montre pour refiler des patates chaudes à son successeur ? Ou, au contraire, va-t-il attaquer courageusement les chantiers compliqués qui restent sans se soucier de sa cote de popularité et de son capital de voix pour les législatives ? Les partis de l'opposition sont tout aussi concernés. Seront-ils tentés de mettre les bâtons dans les roues de la majorité rien que pour la décrédibiliser en année électorale ? Ou feront-ils preuve d'un esprit unioniste en laissant de côté les querelles stériles de l'hémicycle ? A la lumière de ce qui va se passer dans les mois qui viennent, on aura la juste mesure du niveau de maturité atteint par nos partis. Et que notre classe politique se le dise: la participation et l'abstention aux Législatives de 2016 dépendront en grande partie du niveau de sa prestation dans les mois qui viennent...