La DRH n'est pas toujours perçue comme un interlocuteur privilégié par la direction générale, ce qui rend plus difficile la recherche d'une personne-clé. Que pensent les managers de la fonction RH ? Apporte-t-elle une valeur ajoutée ? Contribue-t-elle au développement de l'entreprise ? La fonction RH s'est certes professionnalisée ces dernières années au point de devenir stratégique au sein des organisations. Mais elle n'est pas toujours perçue comme un interlocuteur privilégié de la direction générale. Ce qui rend plus difficile la recherche d'une personne-clé capable de gérer une direction d'une importance stratégique. Parti de ce constat, l'Association marocaine des cabinets de recrutement (AMCR) a organisé mardi 14 juillet, à Casablanca, un f'tour-débat sur la problématique de recrutement d'un DRH afin de répondre à plusieurs interrogations concernant son recrutement mais aussi le jeu de rôles entre le DG et son DRH. D'emblée, Hamid El Otmani, président de l'AMCR et DG du cabinet LMS ORH, a précisé que le marché manque de bons profils. L'une des principales raisons réside évidemment dans le manque de formations pointues dans ce domaine. Par conséquent, les entreprises se rabattent très souvent sur des profils d'ingénieur ou de financier, qi n'ont pas toujours les compétences managériales exigées à ce niveau. Ce qui rend encore son recrutement plus difficile, c'est son rôle pas toujours évident au sein de l'entreprise puisque très souvent un dirigeant n'arrive pas à définir le profil de son DRH ainsi que ses propres attentes vis-à-vis de lui. Le président de l'AMCR rappelle que très souvent les cabinets sont sollicités pour trouver les moutons à cinq pattes pour le compte d'entreprises. En outre, certaines de ces attentes peuvent se révéler paradoxales, comme quand on lui demande de recruter et de développer les talents, d'un côté, et, de l'autre, de supprimer certains postes jugés moins stratégiques. Ce qui se traduit parfois par des licenciements. Sur ce point, Abdallah Chenguiti, président de l'Association des gestionnaires et formateurs de personnel estime que le DRH doit exceller dans l'art de la gestion des paradoxes. Le bon fonctionnement d'un binôme demande qu'il n'y ait pas trop de ressemblance entre les deux parties Les difficultés à trouver un bon profil ou de définir les missions du DRH reflètent en réalité le peu d'impact qu'il a dans l'entreprise. C'est ce qu'a révélé une enquête du cabinet Diorh menée en 2012. Dans ladite enquête, la fonction est citée parmi les trois premières fonctions stratégiques. Le paradoxe est que quand il s'agit de lister les principales missions de la fonction, une majorité des dirigeants citent en premier lieu la gestion administrative, la paie, la conformité sociale ou les relations avec les partenaires sociaux. Rien de stratégique dans tout cela. Même la mise en place d'outils RH peut lui échapper. Dans tous les cas, le tandem DG/DRH est la clé de la réussite d'une bonne gestion des ressources humaines. Le binôme a une mission-clé : aider au «façonnage de l'organisation». Parce qu'il relaie les valeurs des opérationnels, il favorise la formulation et la mise en œuvre de politiques cohérentes, répercutées par l'encadrement. Il remplit également des missions modernes relatives au changement des attitudes et des comportements, comme l'intégration multiculturelle Pour de nombreux spécialistes, un «bon» binôme est capable d'écoute et dispose d'une capacité propositionnelle forte qui passe par un changement des mentalités des autres membres du comité de direction. Les relations avec les partenaires sociaux ne doivent pas constituer un domaine réservé au DRH, mais comporte une dimension opérationnelle motivant l'intervention du directeur général. Le DRH tempère les idées parfois très arrêtées du DG à propos de ses collaborateurs directs ou des cadres dirigeants de l'entreprise. L'intensité de la relation du binôme peut être forte, voire plus forte que dans les autres binômes de l'équipe de direction. Par exemple, le départ d'un directeur général entraîne souvent celui du DRH, ce qui n'est pas le cas pour un directeur financier, industriel ou juridique. Parmi les facteurs-clés de réussite du tandem, la capacité du DRH à décoder la façon dont son DG se comporte. Dans un bon binôme, chacun s'accorde à reconnaître à l'autre le droit à l'erreur, chacun s'offre la possibilité de dire aussi bien oui que non. Les confrontations d'idées et de points de vue, sources d'enrichissement et d'approfondissement d'un projet, ne peuvent avoir lieu et aboutir que dans une relation de confiance. Cette confiance est le résultat d'une alchimie dans laquelle entrent les croyances profondes. Un DRH doit accompagner les changements et dire la vérité. Il doit savoir dire «non», même si cela ne va pas dans le sens du DG. Un DG ne respectera jamais quelqu'un qui dira toujours oui. Ainsi, il est nécessaire que le DG et le DRH partagent le même système de valeurs et qu'il existe une certaine harmonie entre leurs visions sur la gestion de l'entreprise. Pour autant, le bon fonctionnement d'un binôme demande qu'il n'y ait pas trop de ressemblance entre les deux parties. Une trop grande similarité des personnalités provoquerait un manque de stimulation ou des rivalités tenant à des passions pour les mêmes sujets. En d'autres termes, le binôme doit regrouper des personnes d'horizons différents, de caractère, de parcours différents pour pouvoir regarder les problèmes sous des perspectives différentes. De la même manière, lorsque le DG, dans son parcours antérieur, a assumé des responsabilités opérationnelles et n'a pas un profil de gestionnaire social, il sera très demandeur de l'expertise du DRH. Reste que le dernier mot revient toujours au DG quand il s'agit de prendre des décisions d'une grande portée stratégique.