Le «bon» binôme DG/DRH est complémentaire et non pas fusionnel. Qu'attendent les dirigeants des DRH de nos jours ? Ce métier a connu des évolutions majeures qui ont activé l'intérêt d'étudier le binôme DG/DRH. Omar Benaini, consultant associé au sein du cabinet LMS-ORH, parle de ces évolutions et de leurs répercussions sur la fonction du DRH. Qu'attendent généralement les DG des professionnels RH ? Aujourd'hui, les dirigeants attendent du DRH d'être «business minded», c'est-à-dire avoir une vision large de l'entreprise, de ses métiers, connaître ses enjeux, et ses orientations doivent prendre en compte le retour sur investissement. Son métier a été fortement marqué par des évolutions majeures : partage de la fonction avec la ligne hiérarchique, soutien des opérationnels, rôle stratégique, amoindrissement de son rôle social traditionnel de médiateur auprès des salariés. Le directeur général attend ainsi qu'il soit pro actif et accorde moins de ressources aux missions administratives pour privilégier les activités à plus forte valeur ajoutée, comme la gestion des compétences et la motivation des salariés. Ces changements ont activé l'intérêt d'étudier le binôme DRH/DG. Si la décision de réduire les effectifs ou d'opérer une fusion/acquisition incombe à la direction générale, la complexité de ces opérations nécessite la compétence du DRH. Le DG le sollicite également de plus en plus parce que les investisseurs considèrent davantage le capital humain dans l'évaluation des performances de l'entreprise. Dès lors, le couple DG/DRH travaille en collaboration étroite sur tous ces sujets. Le binôme a une mission-clé : aider au «façonnage de l'organisation». Parce qu'il relaie les valeurs des opérationnels, il favorise la formulation et la mise en œuvre de politiques cohérentes, répercutées par l'encadrement. Il remplit également des missions modernes relatives au changement des attitudes et des comportements, comme l'intégration multiculturelle A lire : Comment les managers voient la fonction RH Quels sont les facteurs-clés de réussite ? Un «bon» binôme est capable d'écoute et dispose d'une capacité propositionnelle forte qui passe par un changement des mentalités des autres membres du comité de direction. Les relations avec les partenaires sociaux ne constituent plus le domaine réservé du DRH, elles comportent une dimension opérationnelle motivant l'intervention du directeur général. Le DRH tempère les idées parfois très arrêtées du DG à propos de ses collaborateurs directs ou des cadres dirigeants de l'entreprise. L'intensité de la relation du binôme peut être forte, voire plus forte que dans les autres binômes de l'équipe de direction. Par exemple, le départ d'un directeur général entraîne souvent aussi celui du DRH, ce qui n'est pas le cas pour un directeur financier, industriel ou juridique. Parmi les facteurs-clés de réussite du binôme, la capacité du DRH à décoder la façon dont son DG se comporte. Dans un bon binôme, chacun s'accorde à reconnaître à l'autre le droit à l'erreur, chacun s'offre la possibilité de dire aussi bien oui que non. Les confrontations d'idées et de points de vue, sources d'enrichissement et d'approfondissement d'un projet, ne peuvent avoir lieu et aboutir que dans une relation de confiance. Cette confiance est le résultat d'une alchimie dans laquelle entrent les croyances profondes. Un DRH doit accompagner les changements et dire la vérité. Il doit savoir dire «non», même si cela ne va pas dans le sens du DG. Ce dernier ne respectera jamais quelqu'un qui dira toujours oui. Ainsi, il est nécessaire que le DG et le DRH partagent le même système de valeurs et qu'il existe une certaine harmonie entre leurs visions sur la gestion de l'entreprise. Cela demande à ce qu'ils soient complémentaires ? Tout à fait ! Pour autant, le bon fonctionnement d'un binôme demande qu'il n'y ait pas trop de ressemblances entre eux. Sa force identitaire a tendance à réduire le pouvoir du DRH au profit de celui du DG. «Une trop grande similarité des personnalités provoquerait un manque de stimulation ou des rivalités tenant à des passions pour les mêmes sujets», estime le DRH d'une grande banque mutualiste. Le «bon» binôme est complémentaire et non pas fusionnel. Il doit regrouper «des personnes d'horizons, de caractères, de parcours différent pour pouvoir regarder les problèmes sous des perspectives contrastées», affirme le DRH d'un groupe hôtelier et de loisirs. De la même manière, lorsque le DG, dans son parcours antérieur, a assumé des responsabilités opérationnelles et n'a pas un profil de gestionnaire social, il sera très demandeur de l'expertise du DRH. Mais on est encore loin de l'époque où le DRH, pourtant membre du comité de direction, pourra prétendre devenir directeur général !