Les ventes de machines neuves devraient atteindre 400 unités en 2013 contre 800 en 2008. En cause, la montée en puissance des importations de matériel d'occasion qui pèse actuellement 70% des ventes. Le marché du matériel de BTP est au plus bas. Au mieux, l'année 2013 se terminera avec 400 ventes de machines neuves, alors qu'«avant l'éclatement de la crise, il y a 5 ans, la demande représentait le double», relate Jaâfar Tahiri, président de l'Association des importateurs de matériel de BTP (AIM BTP) qui rassemble la vingtaine d'importateurs de matériel neuf en exercice au Maroc. «Depuis 2008, le volume écoulé a baissé de 15 à 25% par an et l'on est revenu à présent au volume de vente d'il y a 10 ans», renchérit Eric Lefort, directeur général de SRM, un des leaders du marché. Comment en est-on arrivé là ? Voyant leur carnet de commandes se dégarnir ces dernières années, les entreprises de BTP ont eu nécessairement tendance à ralentir leurs investissements en matériel, précisent les professionnels. Mais il y a surtout le fait que, depuis 2008, le marché a été inondé de matériel d'occasion importé qui a généré un important manque à gagner pour les distributeurs de machines neuves. «Une grande partie de ces importations sont le fait de sociétés de financement espagnoles qui ont saisi le matériel d'entreprises ibériques défaillantes et qui ont écoulé ces produits, généralement en bon état, à prix bradé, au Maroc», éclaire M. Tahiri. Les importations de matériel d'occasion sont également le fait d'entreprises étrangères de BTP qui décrochent des marchés publics au Maroc et qui ramènent leurs propres machines en admission temporaire au lieu d'acquérir du matériel au Maroc. Les opérateurs formels veulent des mesures de régulation «Et même si ces entreprises lancent des consultations pour acquérir des produits locaux, elles finissent par commander du matériel auprès de distributeurs dans leur pays d'origine avec lesquels ils entretiennent des relations commerciales de longue date leur donnant droit à des réductions», tient à expliquer M. Lefort. Il y a aussi les acteurs effectuant des opérations ponctuelles et exerçant le plus souvent dans l'informel qui dopent ces importations. Tous ces facteurs ont fait qu'actuellement plus de 70% du volume du marché revient au matériel d'occasion, selon les estimations des professionnels. «Cette prédominance des importations de produits d'occasion désavantage le secteur et l'économie nationale dans son ensemble», soutient le président de l'AIM BTP. Les entreprises de BTP étrangères, qui importent en admission temporaire, induisent par exemple un manque à gagner fiscal étant donné que la TVA qui est payée par l'importateur à l'entrée du matériel est récupérée à sa sortie. Plus encore, lorsqu'il s'agit d'importations ponctuelles initiées par des acteurs informels, la perte est sèche. Ces importateurs ne fournissent pas de service après-vente, ni de garantie aux acheteurs, sans compter le coût environnemental étant donné la vétusté du matériel acheminé vers le Maroc. Partant, l'Association des importateurs de matériel neuf œuvre auprès des pouvoirs publics pour interdire l'entrée sur le territoire national de produits d'occasion. M. Tahiri avance l'exemple de l'Algérie pour démontrer l'intérêt d'une telle mesure. «A partir de 2008, l'Algérie a vu une quantité conséquente de matériel d'occasion se déverser sur son marché. Mais, dès 2009, le pays a interdit ces importations et son marché représente actuellement 6 000 machines dont une partie est même produite localement». Mais conscient qu'une interdiction des importations de matériel d'occasion pourrait être difficile à obtenir vu les accords commerciaux conclus par le Maroc, les professionnels proposent, à défaut, des mesures de régulation. L'idée est que ces importations ne soient autorisées que pour les distributeurs agréés déjà en exercice au niveau national ou des entreprises organisées. L'objectif étant de fournir la garantie et le service après-vente aux acheteurs de ces produits. A plus court terme, l'AIM BTP collabore avec la FNBTP pour mettre au point une classification des entreprises de BTP prenant en considération la vétusté des machines détenues, et ce, afin de pousser au renouvellement régulier de ce parc. Autant de mesures qui contribueront, selon les professionnels, à porter le marché national vers une taille critique, pouvant à terme faire émerger une industrie nationale.