Les surestaries dans les ports marocains sont les plus chers en absolu sur l'ensemble des pays maghrébins. En 2012, ils ont coûté au Maroc 7 milliards de DH en devises. L'Office des changes prépare une étude pour mieux circonscrire la problématique. La problématique des surestaries n'en finit pas de s'inviter dans les débats du secteur maritime. Il en était ainsi, encore une fois, lors du deuxième colloque des Freight Forwarders tenu fin mai. Selon plusieurs opérateurs, ces surestaries conteneurs, qui ne sont en réalité que des pénalités que font payer les armateurs à leurs clients, en compensation de tout retard de restitution du conteneur après le transport maritime, ont vu leurs montants augmenter significativement pendant les dernières années, sachant qu'ils représentaient des sommes dérisoires une décennie auparavant. «Les armateurs et leurs agents n'ont eu de cesse d'augmenter les frais de surestaries sans aucune logique économique. Ainsi, ils sont passés d'environ 100 DH par jour il y a cinq ans, à environ 800 DH aujourd'hui. Ce montant peut atteindre plus de 2 500 DH par jour dans certains cas pour un conteneur 20 pieds. En plus, le délai de franchise, période d'exonération des pénalités de retard, a été revu à la baisse, de manière à activer le compteur le plus rapidement possible», explique un opérateur. Un benchmark réalisé sur les surestaries conteneurs et les délais de franchise appliqués au Maroc et dans d'autres pays de la région du Maghreb, pour un même armateur européen, a démontré clairement que le Maroc reste le plus cher en absolu. Par exemple, pour un délai inférieur à 15 jours, la Tunisie et la Libye sont très largement moins chers, tandis qu'aucun frais n'est facturé en Algérie. De l'avis du président de l'Association des freight forwarders du Maroc (AFFM), ces frais, qu'ils soient chers ou pas, constituent une aberration et doivent tout simplement être supprimés du moment qu'ils pénalisent lourdement les opérateurs du secteur et empêchent la bonne tenue de leur activité. «Au niveau des commissionnaires, il n'existe pas aujourd'hui un seul qui n'a pas une affaire en justice contre un armateur en raison de ces frais», confie un transitaire. Ces derniers ne sont pas d'ailleurs les seuls à faire les frais de ce problème. Vu que la totalité des frais en question est réglée en devise pour le compte d'armateurs étrangers, le solde extérieur du pays en subit un sacré coup. En l'absence de chiffres officiels, des sources bien placées au niveau du secteur parlent d'environ 7 milliards de DH de transfert à ce titre à fin 2012. Des opérateurs parlent de pratiques douteuses des armateurs et d'entente sur les prix Il faut dire qu'à l'origine, les autorités portuaires voulant régler le problème du congestionnement du port de Casablanca causé par le nombre élevé de conteneurs non récupérés à temps par leurs réceptionnaires, ont procédé à l'augmentation des tarifs de magasinage des conteneurs, pour dissuader les importateurs d'utiliser les terminaux portuaires comme lieux de stockage en attendant la vente de la marchandise importée. Leur emboîtant le pas, les armateurs et leurs agents ont également revu les tarifs des surestaries conteneurs à la hausse pour dissuader une autre pratique plus courante : celle d'utiliser le conteneur comme moyen de stockage à l'extérieur du port. Seulement, et c'est là que le bât blesse, c'est que cette pratique a été généralisée à l'ensemble des armateurs étrangers opérant au Maroc. «En principe, certains d'entre eux devraient faire jouer leur compétitivité en facturant des tarifs plus bas pour attirer la clientèle», explique un commissionnaire présent depuis 15 ans sur le marché. Mais «il semble bien que nous sommes face à un cas flagrant d'entente sur les prix et les pratiques au niveau des surestaries conteneurs. L'absence totale au Maroc d'une autorité de régulation qui puisse réglementer tout cela ou, à défaut, au moins plafonner les tarifs, a encouragé des pratiques qui manquent clairement de transparence», ajoute-t-il. Face à cet état de fait, et pour mettre de l'ordre dans ce dossier, l'office des changes a réinstauré depuis fin 2012 l'accord préalable sur toutes les opérations de transfert de devises au titre du règlement des surestaries conteneurs. Selon des sources bien renseignées, l'office suit également de très près le dossier, et est même très avancé sur une étude relative aux frais des surestaries conteneurs. «En plus de disposer de données chiffrées concernant ces frais, l'objectif est de circonscrire la problématique pour proposer les solutions adéquates qui deviennent de plus en plus urgentes», indique notre source.