Des sondages d'opinion périodiques permettent de jauger le moral des collaborateurs. Le fait de bien fixer les objectifs contribue à instaurer un climat de confiance. Les opérations de motivation évènementielles ne résolvent pas le fond des problèmes. Personnelles ou professionnelles, les raisons qui concourent à la démotivation d'une équipe sont très diverses. Omar Benaini, consultant associé chez LMS ORH, affirme qu'un manager ne peut jamais être totalement mis hors de cause puisque parmi ses multiples responsabilités figurent en tête de liste l'écoute de son équipe, la résolution des conflits et l'instauration d'un climat de travail favorable. Les salariés se plaisent souvent à invoquer la démotivation pour expliquer leur manque d'implication. Dans cette conjoncture assez difficile, il y en a beaucoup qui sont dans ce cas. Comment appréciez-vous la situation ? Je ne parlerais pas de démotivation mais d'immobilisme généralisé. Nous vivons dans une période de transition où on a l'impression que tout le monde est aigri. Par contre, on ne peut généraliser la démotivation dans toutes les structures. Dans beaucoup de cas, l'attentisme peut conduire à une baisse de moral dans certaines structures. Il faut dire aussi que les effets de crises récurrentes minent les initiatives. Du coup, cela engendre une double peur : peur de prendre des décisions ou peur de rendre compte aux instances de contrôle que ce soit un conseil d'administration, une inspection, la Cour des comptes, la presse… Or, quand la situation se dégrade, nous constatons une seule réaction : les managers se limitent à constater les dégâts et à chercher des coupables. On finit ainsi par briser l'esprit collectif ; on ouvre la porte à un système de lutte pour la survie de son poste ou de son pouvoir ; on engage la polémique entre managers, entre départements… Les gens ne prennent pas le temps de mesurer l'impact d'un problème, alors que réagir à chaud ne fait qu'aggraver la situation. La démotivation est donc un problème de management…? Autrefois, travailler était en soi un facteur de motivation. Et lorsque le manager faisait un compliment sur le travail accompli, le collaborateur se sentait gonflé à bloc … Aujourd'hui, cela n'est plus suffisant : le collaborateur se positionne. Et au passage, il domicilie toute la responsabilité de son propre bien-être au travail sur les épaules de son management. On voit donc des managers qui multiplient les team building, les signes de reconnaissance matériels et immatériels, les encouragements… sans pour autant pouvoir, dans certains cas, maintenir le «moral des troupes» dans la durée… Car les collaborateurs oublient parfois qu'ils sont également attendus sur leur capacité d'engagement et d'auto-motivation. Mais, dans tous les cas, le manager ne peut jamais être totalement mis hors de cause puisque, parmi ses multiples responsabilités, figurent en tête de liste celles de l'écoute de son équipe, de la résolution des conflits, de la motivation et enfin de l'instauration d'un climat de travail favorable à l'épanouissement individuel. Selon vous, quelles sont les raisons objectives qui peuvent engendrer un malaise dans une équipe ? Les raisons sont nombreuses et variées. A mon sens, les malaises sont naturels et font partie de la vie d'une entreprise et d'une équipe. Dans tout collectif humain, il y a des confrontations d'idées, des divergences d'opinions, la recherche de statut et d'inclusion, la diversité (d'origines, de formation, de genres, de caractères…), etc. Ce qui, forcément, provoque parfois des frictions, des frustrations, des incompréhensions, voire des conflits… C'est pourquoi je dis souvent qu'il faut d'abord faire le deuil de la situation et faire ensemble une analyse sereine pour mieux rebondir. Justement, comment diagnostiquer les problèmes ? J'ai toujours pour devise de revenir aux fondamentaux, c'est-à-dire essayer de jauger le moral des effectifs à travers des sondages d'opinion périodiques. Il est préférable que l'opération soit orchestrée par des experts externes à l'entreprise pour garantir la neutralité des jugements mais aussi pour dégager les leviers de progression. En tant que consultant, comment vous agissez pour aider les managers ? Le premier souci d'un consultant est d'abord d'instaurer les conditions d'un dialogue dans la confiance avant d'entamer n'importe quelle démarche. Il est fondamental que les gens s'expriment ouvertement sans crainte pour qu'on puisse répertorier réellement les vrais problèmes et les actions à dégager. J'incite souvent les entreprises à impliquer le personnel à travers les comités d'entreprise. Quand on instaure la confiance, les décisions les plus difficiles peuvent être acceptées. Nous recommandons également de mettre en place des solutions rapides qui ne coûtent rien. C'est ce que nous appelons des «Quick Win». C'est le fait d'arriver rapidement à un résultat tangible, même modeste. Dans certaines entreprises, la lenteur administrative était tellement pesante, qu'elle en décourageait plus d'un. Rien que le fait de faciliter ces démarches contribue à l'amélioration des conditions de travail. Souvent, c'est la définition des objectifs jugés élevés qui est à l'origine des coups de blues. Comment procéder ? En effet, le risque majeur est l'impossibilité, en fin de période, d'apprécier véritablement les apports des uns et des autres et de reconnaître ainsi la place et la contribution de chaque membre de l'équipe. Ceci est un facteur pouvant très rapidement provoquer un malaise important, et affecter significativement la motivation d'une partie, voire de la totalité de l'équipe ! Le meilleur mix est selon moi la combinaison d'objectifs individuels et d'équipe. Cela permet à la fois d'encourager les interactions des membres et l'émergence d'une «intelligence collective», tout en reconnaissant les apports de chacun pris séparément… Comment remonter le moral de l'équipe dans ces cas ? Dans le cas ou une équipe est démotivée en raison d'un manque de reconnaissance de la contribution individuelle de ses membres, il n'existe qu'une solution pour les remotiver : supprimer la cause qui a produit cet effet, c'est-à-dire instaurer un système transparent et partagé qui permette d'apprécier l'effort de tout un chacun. Il faut surtout éviter de faire de la motivation événementielle. Organiser des sorties sur trois jours pour se défouler en pensant que les problèmes seront résolus est un leurre ! A mon avis, il faut s'attaquer aux vrais problèmes tout en assurant et assumant les actions correctives.