Amusons-nous un peu et jouons à nous imaginer appliquer (tous) les vrais préceptes de l'islam pendant Ramadan. Je vous rassure d'emblée, ce n'est qu'un jeu ! Essayons d'imaginer comment notre islam, modéré et ouvert, pourrait nous aider, pendant le mois sacré, à nous développer, nous organiser, nous structurer ; et à prendre soin de nous, de nos proches, de l'espace public et de l'intérêt général. Le jeu consiste à se dire qu'il y a des attitudes et des comportements, pour ne pas dire des péchés, qui annuleraient la journée du jeûne, de la même manière que quand on mange ou boit avant le ftour. Des péchés qui annulent le jeûne Ainsi, mentir intentionnellement pendant le jeûne serait une cause suffisante pour devoir expier ce péché. Le menteur devrait alors, pour chaque journée annulée, appliquer la sentence et jeûner deux mois successifs ou nourrir 60 pauvres, à défaut d'émanciper un esclave. Augmentons le niveau de difficulté et étendons les causes de l'annulation d'une journée du jeûne au fait de ne pas respecter un feu rouge, de jeter un bout de papier par terre au lieu de le mettre à la poubelle, passer devant les autres dans une administration ou une épicerie... Et à des comportements plus durables tels que la cupidité de quelques commerçants qui profitent de «l'aubaine» inflationniste pour anticiper les augmentations qu'ils appliquent avant qu'elles ne soient effectives et qu'ils ne baissent plus ou alors longtemps après le retour à la normale. Elargissons encore la liste des péchés à la convoitise, l'avidité, l'hypocrisie, la corruption, la contrefaçon, la tricherie. Et amusons-nous à compter l'infinité des deux mois ou des 60 pauvres à nourrir pour chacun d'entre nous. Un rêve citoyen inachevé Peut-être que ce jeu, pris au sérieux, nous montrerait nos villes et villages sous un autre visage. Les gens seraient différents, gentils et avenants à toute heure et pas agressifs parce que sevrés de tabac ou de café. Nos espaces publics seraient plus propres et agréables à vivre. Fermons les yeux et imaginons des avenues et des routes avec une circulation organisée et des conducteurs aux visages sereins, parce qu'ils ne sont pas obligés de surveiller la voiture qui va brûler un feu rouge ou une priorité à toute vitesse, à tout instant. Parce qu'elle est pilotée par un individu guidé par son appétit et aveuglé par un cerveau lent en manque de calories. Et que le ftour, l'unique rendez-vous qui réussit à rendre tous les Marocains ponctuels, est dans une demi-heure. Une différence que nous risquerions d'aimer Nous verrions alors la différence entre l'avant et l'après. Le résultat risquerait de nous plaire et de nous pousser à garder les mêmes réflexes pendant toute l'année. Que du positif. Nous considérerions ce mois sacré de Ramadan comme un mois pilote pendant lequel nous aurions expérimenté une citoyenneté halal et aboli l'incivisme en tant qu'ensemble d'attitudes illicites (haram). Ainsi Ramadan nous aiderait à mieux vivre ensemble positivement et ne serait pas que le mois du sous-jacent contrôle collectif qui augmente et oppresse un peu plus que le reste de l'année. La foi nous aiderait, alors, à devenir encore plus citoyens. Et les gens respecteraient le feu rouge non pas par peur du policier mais par crainte de Dieu. Ce sera toujours ça de gagné, au moins pour la sécurité routière. La culture est la solution.