Les clients ne considèrent plus l'acquisition comme priorité et s'orientent de plus en plus vers la location. Les prix restent inchangés mais les critères de choix des biens immobiliers ont évolué. La stimulation de ce marché à travers des mesures encourageantes est nécessaire. Le secteur immobilier résidentiel est à l'arrêt, comme ne cessent de le répéter tous les opérateurs. Que ce soit pour les nouvelles productions, les mises en chantier ou encore les acquisitions, le marché semble davantage enfoncé. Comme l'ont prévu les professionnels, les clients qui, avant, étaient intéressés par l'acquisition, se sont effectivement orientés vers la location. «Par choix ou par dépit, l'acquisition n'est plus primordiale», souligne Yassine Meniari, directeur général de l'agence immobilière Aykana. Pour conforter cela, Mohammed Lahlou, ex-président fondateur de l'AMAI et DG de Carrefour Sakane ajoute : «Le marché immobilier affiche le dynamisme des années 1970 où la demande était largement portée sur la location, reléguant l'acquisition au second plan». En fait, si les clients préfèrent louer actuellement, c'est parce qu'ils n'arrivent pas à se projeter sur la durée de remboursement (25 ans maximum), de par le manque de visibilité quant aux perspectives économiques et l'ébranlement de la confiance vis-à-vis du secteur lui-même. M.Meniari ajoute que la pierre ne rapporte plus autant que pendant les années fastes si l'on intègre le coût de financement, les différentes taxes et charges payées tout au long de la période de la détention ou lors de la revente, ou encore l'amortissement du bien. Il faut dire que bien avant cette crise sanitaire, la demande était davantage tournée vers la location, en raison des difficultés que connaît le segment de l'acquisition consécutivement notamment à l'inadéquation entre l'offre et la demande, ainsi qu'aux prix jugés élevés. Qu'en est-il des concrétisations des intentions de location ? Elles restent tributaires des critères de choix des clients qui ont bien évolué. «Les exigences ont radicalement changé quant au choix du bien immobilier à louer. Les clients, la majorité en tout cas, requièrent une terrasse et un balcon. Ce qui est rarement inclus dans tous les étages d'un bien immobilier. Les terrasses sont généralement disponibles au niveau du RDC et du dernier étage. Il existe même des immeubles où les autres niveaux ne disposent même pas de balcon», se désole M.Lahlou. Au-delà de cela, M.Meniari explique que l'urbanisme qui touche la ville administrative, notamment au quartier Agdal, ne joue pas en la faveur des investisseurs immobiliers. «Le changement d'une zone villas à une autre destinée à la construction d'immeubles n'est pas automatiquement accompagné des infrastructures nécessaires, que ce soit en terme de voirie, de conduites d'eau, d'égoûts, de débit internet...». Du coup, les appartements des biens immobiliers, en remplacement des villas, obéissent à deux scénarii : Une faible demande au vu de la densité et des contraintes qu'elle génère, ou un changement de main rapide. Que ce soit à Casablanca ou à Rabat, les clients sont à la quête du même type d'espace de vie. Cependant, l'offre n'est pas toujours disponible, ne répond pas aux besoins ou est condensée dans certains quartiers. Cette situation devrait entraîner une hausse des prix des loyers. Aucunement, confirment les professionnels contactés. Ils restent stables, sachant qu'ils étaient assez corrigés les dernières années. A Casablanca, les appartements se louent entre 5 000 et 7 000 DH au quartier 2 Mars, en fonction de leur consistance. A Bourgogne, la location se situe en moyenne dans les 5 000 DH, contre 8 000 DH à Racine, et 10 000 DH à Val Fleuri. Alors que les appartements se louaient à 17 000 DH à Prestigia Hay Riad à Rabat, ils sont proposés à 11 000 DH actuellement. De même pour le nouveau quartier Orangeraie Souissi où les loyers tournent autour de 15 000 DH contre 18 000 DH en 2016. A Agdal et à Hassan, les appartements sont loués à partir de 4 500 DH et peuvent même atteindre 8 000 DH en fonction de la superficie. A travers ces exemples illustratifs, on a tendance à penser que le marché de la location, comme celui de l'acquisition d'ailleurs, répond à la loi de l'offre et la demande. M.Meniari réfute cette loi. Selon lui, «les transactions de tous types dépendent du bon vouloir des deux parties seulement. Dans un quartier, le même type de bien peut être loué à deux prix totalement différents. L'un, car son propriétaire prend en compte l'évolution du contexte, l'autre, parce que le bailleur souhaite le céder en location coûte que coûte». D'où la différence des taux de rendement entre un quartier et un autre ou même entre 2 biens similaires. En tout cas, il tend vers la baisse à Rabat jusqu'à atteindre 3% pour certains biens, et poursuit sa stagnation sur Casablanca entre 5% et 6%, selon les professionnels contactés. Compte tenu de la situation actuelle du marché, la location continuera à prendre le dessus sur les intentions d'achat. Tout l'intérêt est de développer ce marché locatif à travers la mise en place de mesures encourageantes. M.Lahlou fait allusion principalement à la refonte de la fiscalité immobilière, en mettant en place 4 tranches allant du logement social à celui du haut standing, à la préparation d'un texte qui réglemente le marché de la location et protège les deux parties en cas de force majeure, comme cette crise sanitaire, ainsi qu'à l'application de la location/accession à la propriété. M.Lahlou rappelle également la nécessité de raviver la confiance grâce à une assurance sur les loyers impayés.