L'activité touristique tourne au ralenti à cause du Coronavirus. Un effondrement du MICE international en mars/avril met les autocars en arrêt d'activité. Les professionnels espèrent une accalmie et un retour à la normale dès fin avril ou fin Ramadan. Annulation du Salon du tourisme ITB de Berlin, du Salon de l'agriculture «Siam» de Meknès où des délégations italienne, française, turque et portugaise étaient attendues... Les grands évènements qui drainent les visiteurs, engendrent les réservations de milliers de chambres d'hôtels et créent du business pour le transport touristique prennent un coup dur à cause de l'épidémie du Coronavirus (Covid-19). En mars, le directeur d'une chaîne hôtelière présente à Marrakech, Tanger et Agadir témoigne d'une annulation de 6 090 nuitées pour le mois de mars et 1 450 en avril qui ne s'arrêteront pas tant que l'épidémie fera la une des médias. «Les hôtels de Marrakech font face à une moyenne de 2000 nuitées annulées. Nous n'avons aucune visibilité pour les prochains mois. L'industrie hôtelière peut résister pendant un mois mais le problème réside dans le manque de contrôle à l'arrivée dans les aéroports. A titre d'exemple, à l'aéroport de Marrakech, il n'y a pas de thermomètre pour mesurer la température des passagers. On leur demande de remplir une fiche attestant de la non-contamination», déclare Abdellatif Kabbaj, président de la Confédération nationale du tourisme (CNT) et du groupe Kenzi. En réalité, le dispositif sanitaire dans les aéroports est mis en place par le ministère de la santé. D'après une source proche du dossier, le thermomètre infrarouge et la caméra thermique sont opérationnels dans tous les aéroports mais ont été activés pour les passagers en provenance d'Italie. D'ailleurs, le premier cas confirmé du Coronavirus au Maroc est celui d'un Marocain en provenance d'Italie. Le vol de RAM reliant Casablanca à Pékin a été certes annulé depuis 3 semaines. Mais des arrivées de touristes en provenance d'Asie (continent le plus touché par l'épidémie) via les compagnies du Golfe sont maintenus. Pour les professionnels, il est primordial de contrôler les passagers qui atterrissent dans nos aéroports et effectuer les tests de température à l'arrivée. Les réservations de vols des compagnies aériennes se font déjà moins nombreuses malgré les offres alléchantes et les réductions devenues sans effet. Des pertes jusqu'à 1 500 DH/jour/autocar dans le transport touristique L'industrie du tourisme, elle, n'est pas épargnée. D'après un rapport de l'OCDE sur l'impact du Coronavirus sur l'économie mondiale, le tourisme en provenance de Chine est quasiment à l'arrêt. A titre d'exemple, les arrivées de visiteurs à Hong-Kong (Chine) ont été, en février 2020, inférieures de 95% à la normale. Au Maroc, la demande touristique globale représente 8% du PIB national. A cause de la multiplication des annulations de colloques, MICE, salons et visites privées et en groupes, les manques à gagner pour le secteur risquent d'être considérables mais pas encore quantifiables. Taoufik Madih, président de l'agence de voyages ALM Business & Luxury Travel, relativise : «Il s'agit surtout de reports d'évènements organisés à Marrakech en mars/avril pour les mois de juin, septembre et octobre. Ces décisions sont prises par les multinationales au niveau des sièges. Dès la fin de mois de Ramadan, on s'attend à une reprise très rapide de l'activité touristique», remarque M. Madih qui est aussi président de l'Association régionale des agences de voyages de Marrakech-Safi (ARAVMS). Des prospections en cours pour l'automne prochain Les transporteurs touristiques essaient pour leur part de limiter les dégâts. Une réunion a été tenue au siège de la Chambre de commerce pour trouver des solutions aux transporteurs touristiques. «J'ai une vingtaine d'autocars à l'arrêt qui me coûtent en frais fixes (assurance, traite, taxes, CNSS...) entre 1200 et 1500 dirhams/jour/autocar. Nous essayons aujourd'hui d'ajourner nos échéances car on n'est plus en mesure de les honorer tant que l'activité est à l'arrêt», déplore Jalil Madih, DG d'Alizés Travel. Si les voyages des étrangers au Maroc se font moins nombreux, ceux des Marocains suivent la même tendance, ajouté à cela la suspension de la Omra pendant 10 jours par mesure préventive afin de limiter la propagation du Coronavirus. La Fédération nationale des agences de voyage (FNAVM) a annoncé la restitution des frais de visa, de logement, de transport et des autres services dès la fin des procédures administratives aux Marocains ayant réservé leur Omra pour les prochains jours. «Nous avons créé des commissions de veille stratégique opérationnelles dès cette semaine pour les voyagistes, les transporteurs et les hôteliers notamment pour la diversification des marchés, chinois et italien étant les plus touchés. Jusqu'à il y a une semaine, nous avons reçu à Marrakech une délégation hollandaise pour l'organisation d'un congrès en novembre 2020. Les prospections pour l'automne continuent», déclare Taoufik Madih. Face à cette situation exceptionnelle, le secteur de l'hôtellerie pourrait bien se rabattre sur le marché national en espérant que le MICE national soit épargné pendant les mois de mars et avril. «Si les plus importants donneurs d'ordre nationaux, banques, multinationales, assurances et grandes entreprises craignent la propagation du virus pour leur personnel, évitant ainsi les grands rassemblements, ils pourraient interdire les teambuldings, congrès et incentives au Maroc», remarque M. Madih. On n'en est pas encore là. Mais le tourisme interne pourrait reprendre des couleurs, à condition de ne pas augmenter les prix d'ici l'été prochain.