Il n'y a pas de processus de réforme dont le chemin ne soit pavé d'embûches. La logique du changement rencontre tout naturellement des résistances. Une réforme n'est pas un acte technique. Elle est avant tout une remise en cause d'intérêts bien établis. Les changements que le Maroc a introduits dans les structures et le mode de gestion des affaires publiques sont réels. Mais il a toujours éprouvé des difficultés à consolider ces réformes, faute d'un terrain institutionnel réceptif et surtout d'une approche adéquate du processus. Les différences entre nations excluent toute idée d'une voie idéale et unique de la réforme. L'on doit donc se pencher sur les questions de fond auxquelles est confrontée la dynamique des réformes dans notre pays. Comment améliorer le rendement de la machine gouvernementale dans un environnement de prise de décision caractérisé par d'importants chevauchements des centres de pouvoir? A examiner le fonctionnement du gouvernement, on conviendrait aisément qu'il doit gagner en efficacité. Les lieux d'intervention sont apparents: fréquence des conseils de ministres, rôle des conseillers, mission du Secrétariat général du gouvernement, coordination interministérielle, préparation des arbitrages. Le rendement de l'Etat dépend de la valorisation des fonctions d'impulsion et d'orientation du travail gouvernemental, de la cohérence de l'action publique, de la fluidité des étapes par lesquelles transite la décision publique. Le gouvernement se doit donc de développer une capacité stratégique de pilotage des réformes pour qu'elles soient conçues et appliquées de manière à se renforcer mutuellement. Comment renforcer la capacité de l'administration à mettre en œuvre les réformes? Un gouvernement s'emploie à fixer le cadre général, il ne peut prescrire en détail comment les gestionnaires opérationnels devraient agir. Or, un ensemble de faiblesses de l'Administration entravent la mise en œuvre de politiques décidées au plus haut niveau. Des procédures paralysantes et opaques. Des décisions de nominations soumises à un processus de validation lent, à l'avis de départements qui parfois tendent à excéder leurs compétences. Des contrôles tatillons qui, pour autant, ne permettent pas une évaluation des politiques publiques. Des institutions qui végètent dans l'oubli. Des conseils d'administration qui tardent à se tenir. L'inertie, l'imprévisibilité ou tout simplement l'absence d'une organisation adéquate des tâches peuvent susciter une démotivation ou des comportements qui conduisent à douter de l'efficacité des efforts entrepris. Comment faire en sorte que les réformes jouissent d'un appui politique soutenu, de façon à surmonter les résistances au changement? Pour réussir, les réformes doivent être appuyées aux échelons les plus élevés. Mais cet appui risque de s'affaiblir s'il n'est pas relayé par le pouvoir législatif et le pouvoir local. La clarification des rapports du gouvernement à l'administration territoriale est nécessaire pour que le lien entre autonomie et responsabilité dans les décisions publiques soit établi. Il convient d'évaluer la portée et les implications effectives à un niveau pratique des missions et attributions que confère la loi aux gouverneurs et aux services extérieurs des ministères. Dans un souci d'amélioration des conditions de la décentralisation et de la déconcentration. Enfin, comment introduire davantage de participation dans la conduite des affaires publiques? Les réformes ne peuvent plus «s'imposer» d'en haut. Il est crucial de faire assumer les enjeux des réformes par les acteurs économiques et politiques. L'aboutissement d'une réforme ne se joue plus simplement dans la clarté des objectifs. A cette condition, s'ajoute le degré d'adhésion des protagonistes et la capacité d'absorption de la société. La pression en faveur des réformes va continuer, voire s'intensifier. Le problème n'est pas dans le choix entre une stratégie de choc et une stratégie des petits pas dans la mise en œuvre des réformes. Il est dans le renforcement des cadres institutionnels dans lesquels s'inscrit la gestion de la performance. La réforme est un voyage et non une destination