Les dispositifs "Idmaj" et "Tahfiz" ont permis l'embauche respectivement de 77 942 et 3 932 personnes sur les neuf premiers mois de 2018. Le nombre de bénéficiaires du programme "Taehil" a augmenté de 38% sur la même période. Cela fait partie des caractéristiques de l'économie marocaine, et, plus généralement, des économies en voie de développement : l'emploi (comme la fiscalité, d'ailleurs) peut, de temps en temps, réaliser des hausses fulgurantes sans que cela soit nécessairement le résultat d'une croissance forte. Il ne s'agit pas ici de ranimer le vieux débat sur la corrélation entre croissance et emploi, mais simplement de constater que c'est précisément au moment où le PIB, au Maroc, croît à un rythme plutôt lent que le nombre d'emplois créés est le plus élevé depuis cinq ans. Comme nous le rapportions dans notre précédente livraison, les créations nettes d'emplois au troisième trimestre de 2018 se sont élevées à 122 000 contre 89 000 à la même période de 2017, selon la dernière enquête du HCP sur le marché du travail. La croissance économique, elle, est estimée à 2,8% par le HCP pour le troisième trimestre et à quelque 3,1% pour l'ensemble de l'exercice. Inversement, sur les douze mois 2017, alors que le niveau de progression du PIB était plutôt correct (4,1%), le nombre d'emplois nets créés n'a pas dépassé 86 000 postes. Conclusion – au moins provisoire –, si les emplois créés ne sont pas en totalité générés par la croissance, par quoi le sont-ils alors ? Visiblement par l'action volontaire des pouvoirs publics, ou plus exactement par les mécanismes incitatifs mis en place dans le cadre des politiques publiques d'emplois ? Et en effet, selon les statistiques du ministère du travail et de l'insertion professionnelle, 81 874 embauches ont été réalisées, à fin septembre 2018, à travers deux des programmes actifs de promotion de l'emploi, "Idmaj" et "Tahfiz" : le premier avec 77 942 insertions et le second avec 3 932, soit des augmentations respectives de 19,3% et 74%, comparativement à fin septembre 2017. Ainsi, sur les 122 000 emplois créés, la part de "Idmaj" et "Tahfiz" réunis représente plus de deux tiers (67,1%). Et si on y ajoute le dispositif "Taehil", conçu dans l'objectif d'améliorer l'employabilité des demandeurs d'emploi, on comprend que les créations d'emplois doivent beaucoup aux politiques publiques en la matière. Selon les chiffres du ministère du travail, sur les neuf premiers mois de 2018, le nombre de bénéficiaires de ce programme a augmenté de 38,2% à 20 254, comparativement à la même période de 2017. Ce dispositif, pour mémoire, comporte trois composantes: la formation contractualisée pour l'emploi (FCE), la formation qualifiante ou de reconversion (FQR) et la formation au profit des secteurs émergents (FSE). Pour les deux premières composantes, l'Etat apporte une contribution financière plafonnée à 10000 DH par bénéficiaire (voir encadré pour les avantages liés à "Idmaj" et "Tahfiz"). Nécessaire évaluation de l'ensemble des programmes actifs de promotion de l'emploi Quelles que soient les imperfections qu'ils renferment, ces programmes ont au moins l'avantage de réduire sinon de supprimer la barrière, souvent difficilement franchissable, de l'inexpérience des candidats à un premier emploi, et, surtout, de soulager, au moins pour un temps, les entreprise des charges sociales et fiscales. Logiquement, les coûts que cela engendre pour le Budget de l'Etat ne sont pas perdus. L'augmentation, d'année en année, de l'emploi rémunéré (d'ailleurs, grâce, entre autres, à ces programmes), est un moyen pour l'Etat, via la TVA sur la consommation, de récupérer sa mise. Cela dit, une évaluation complète de l'ensemble des dispositifs de promotion de l'emploi mérite d'être menée : Combien cela a coûté à l'Etat depuis leur mise en place, les stagiaires et les salariés concernés ont-ils bénéficié d'un CDI à l'issue de la période d'exonération, etc. ? Cela permettrait de remédier éventuellement aux dysfonctionnements qui auraient été constatés. Selon de nombreux témoignages, les insertions, dans le cadre de "Idmaj", ne se traduisent pas toujours par l'intégration dans l'entreprise. Certaines entités continueraient à tirer profit de ce dispositif, quand bien même celui-ci est assorti de l'obligation de recruter par CDI 60% des stagiaires. Il semble bien que le ministère du travail, dans le cadre de l'observation du marché du travail, a l'intention d'effectuer ce travail d'évaluation. L'opération concernerait, cependant, le programme "Taehil", uniquement. Pourquoi pas les autres ? [tabs][tab title ="Les avantages de "Idmaj" et "Tahfiz""]Le programme "Idmaj" (insertion, dans la langue de Molière), qui a vu le jour en 1993, mais a été ultérieurement amélioré, est un dispositif qui accorde des avantages aux entreprises organisant des stages de formation insertion. Ces avantages portent sur l'exonération pendant 24 mois des cotisations sociales, de la taxe professionnelle et de l'impôt sur le revenu au titre de l'indemnité de stage versée aux stagiaires. Cette indemnité est plafonnée à 6 000 DH. L'Etat prend en charge les cotisations dues à la CNSS afin que le stagiaire puisse bénéficier de prestations sociales. La dernière retouche apportée à ce programme, sans doute motivée par les abus constatés dans son utilisation, consiste pour les entreprises bénéficiaires des exonérations à s'engager à recruter, à titre définitif, au moins 60% stagiaires. L'idée principale derrière cette mesure, c'est à la fois d'accroître l'employabilité des jeunes et d'améliorer les ressources humaines, en particulier l'encadrement des entreprises. Le dispositif "Tahfiz", lui, est destiné aux entreprises nouvellement créées ainsi qu'aux coopératives et associations. Là encore, l'Etat prend en charge les cotisations sociales et exonère de l'impôt sur le revenu les salaires distribués, plafonnés à 10 000 DH. Ces avantages sont offerts pour 10 salariés au lieu de 5 dans la première version du programme. La validité de celui-ci court jusqu'à décembre 2022.[/tab][/tabs]