Myriam El Karzazi responsable recrutement et évaluation au cabinet Diorh «Une reprise timide mais les perspectives sont bonnes» «Il est encore tôt pour parler de reprise effective, d'autant plus que cette année, particulièrement, le mois d'août s'est caractérisé par un certain attentisme. Même si les cabinets de recrutement enregistrent des requêtes de plus en plus nombreuses, ces dernières ne sont pas encore concrétisées. En somme, les données actuelles augurent de bonnes perspectives sans qu'on puisse parler de réelle reprise. Le marché marocain reste assez classique par rapport aux types de profils recherchés, qui se caractérisent surtout par la finance, le commercial, le marketing et l'assistanat de direction. Le contrôle de gestion et les ressources humaines se confirment de plus en plus et les formations qualifiantes sont hautement recherchées à ce niveau. Si l'on doit dégager une tendance, on peut dire que l'on assiste à une forte demande sur des fonctions organisationnelles qui touchent directement les achats et la logistique. Là aussi, la formation et une expérience reconnue sont garants d'un bon positionnement pour les années à venir. Le problème est que le tissu économique marocain n'a pas encore une véritable force de production qui permettrait à l'ingénierie d'être plus demandée. Il existe surtout des industries de transformation et des activités d'importation de produits manufacturés à la vente. Dès lors, avec l'ouverture du marché et la baisse des droits de douane, la nouveauté s'inscrit particulièrement dans le cadre de la compétitivité et la baisse de certains prix. Il y a donc plus de choix et cela crée une certaine dynamique sur le marché, qui favorise directement les fonctions à dominante commerciale et marketing. On constate que même les ingénieurs sont de plus en plus sollicités pour des postes de technico-commerciaux ou l'ingénierie de la finance. En ce qui concerne les secteurs dynamiques en matière de recrutement, on trouve tout d'abord les centres d'appel. Ces derniers s'installent en force sur le marché marocain, mais demandent des niveaux relativement moyens. Mais comme partout ailleurs, les postes de responsabilité sont toujours confiés à des profils dotés de formations reconnues et d'expériences probantes. Autre point : le secteur agroalimentaire reste toujours le fleuron du marché au même titre que le secteur financier. Par ailleurs, la chimie et parachimie et, dans une moindre mesure, la cosmétique et le tourisme, sont en train de confirmer les attentes en matière de recrutement. Parmi les secteurs qui retrouvent un certain dynamisme, on liste le bâtiment et les travaux publics ainsi que le textile et l'habillement. Les méthodes restent cependant anciennes et les recrutements sont rarement confiés à des prestataires de services professionnalisés.» Mohamed Bennouna DG de F2V consulting «Le marché manque de bons commerciaux» «Actuellement, certains secteurs connaissent une reprise en matière de recrutement, surtout à la veille du mois de Ramadan. Je citerais particulièrement le cas de la grande distribution et de l'agroalimentaire. Comme nous sommes un cabinet spécialisé dans la force de vente, je dirai que les entreprises qui opèrent dans ces secteurs sont à la recherche de deux types de profils de commerciaux. Les premiers, de type traditionnel, sont surtout des profils de vendeurs, livreurs, chefs de secteur ou de zone… Les seconds sont particulièrement des profils de commerciaux chevronnés, à l'image des technico-commerciaux ou des conseillers commerciaux. Les entreprises recherchent également des chargés d'affaires qui ont pour mission de monter des projets à partir des besoins du marché. Ce métier exige de bonnes connaissances en analyse financière et en gestion des risques ainsi qu'une vraie dimension commerciale et des qualités de négociateur. Malheureusement, ces profils sont très peu disponibles sur le marché de l'emploi. C'est pourquoi nous essayons, dans le cadre de notre mission, d'orienter et de former certains lauréats d'écoles vers ces nouvelles niches plus prometteuses. En somme, le marché de l'emploi souffre d'un manque réel de commerciaux. Dans la plupart des cas, soit on trouve des profils surdimensionnés au poste qui, généralement, déclinent la proposition pour des questions de dévalorisation ou de rétribution, soit on retrouve des profils sous-dimensionnés au poste et qui, pour des questions d'élocution, de savoir-être et de savoir-vivre ne correspondent pas aux besoins des entreprises.» Chantal Aounil responsable recrutement chez Bil Consulting «Forte baisse des besoins dans les nouvelles technologies» «Il est difficile d'avoir une tendance précise du marché de l'emploi parce que chaque cabinet de recrutement est spécialisé dans une niche particulière. Pour nous, par exemple, il n'y a pas eu d'interruption pendant l'année du fait que les entreprises avec qui nous travaillons ont budgétisé leur recrutement sur toute l'année. Les demandes vont des profils d'assistantes de direction, de commerciaux, de financiers jusqu'aux postes plus stratégiques en ressources humaines, finance ou de direction générale. Parmi les points les plus marquants depuis plus de deux ans, on a enregistré une grande mobilité des cadres. Ces derniers sont de plus en plus conscients de l'opportunité et n'hésitent plus à la saisir. C'est le cas par exemple des jeunes cadres féminins. Du point de vue géographique, les grands centres régionaux restent prisés par les cadres. Ce qui n'est pas le cas en revanche pour les petites villes. Par ailleurs, la reprise des métiers des nouvelles technologies n'aura pas lieu encore cette année, à part pour le secteur des centres d'appel. Alors que 65 % de nos recherches concernaient des profils sépcialisés en technologie en 2001, celles-ci ne représentent que 10 % cette année. Les entreprises demandent principalement des «petits» profils comme les programmeurs, référenceurs… D'un autre côté, nous avons constaté que les PME s'organisent de plus en plus dans leur phase de recrutement. Les pratiques RH leur ont permis de mieux analyser leur situation, d'évaluer leur personnel et elles ne procèdent au recrutement qu'en dernier lieu, pour des postes spécifiques.» Jamal Amrani DRH d'Accor Maroc «Nos métiers évoluent constamment avec les exigences de la clientèle» «Conjoncture ou pas, nous avons un programme annuel à respecter concernant notre politique de recrutement. Nous n'attendons pas l'ouverture des chantiers pour commencer à recruter. Nous constituons en permanence notre vivier de compétences au fur et à mesure que nous trouvons des profils intéressants, que ce soit pour la restauration, l'hébergement, la maintenance, la finance, les ressources humaines ou autres. D'ailleurs, nos métiers sont assez diversifiés. Malheureusement, beaucoup de ces profils ne correspondent pas à nos besoins, surtout pour des raisons de savoir-être. Ceci dit, quand on arrive à les dénicher, ces derniers n'ont toujours pas d'attentes précises concernant leur devenir. Pour des raisons économiques, nous procédons principalement par messagerie électronique quant à la sélection des candidats. Cela nous permet de réagir rapidement à toutes les demandes. Nous procédons par voie de presse en cas de besoin pour un poste stratégique. Vu les perspectives de notre secteur d'activité, il y a lieu de souligner que nos métiers évoluent constamment avec les exigences de la clientèle. C'est pourquoi nous envisageons souvent de reconvertir certains profils lorsque la demande l'exige. Quand nous nous apercevons que certains profils n'ont pas les aptitudes possibles ou la capacité d'être une force de proposition, nous n'hésitons pas à cibler des profils de gestionnaire (Bac+4) pour les reconvertir vers d'autres métiers.» Zakaria Rbii DRH de Kraft Foods «Maîtrise des langues et des nouvelles technologies : un atout déterminant» «Les métiers ont beaucoup évolué dans notre secteur d'activité depuis quelques années. Je citerai comme exemple celui des commerciaux. Alors qu'on parlait de vendeur traditionnel, dont la fonction se limitait à l'approvisionnement des points de vente en marchandises, son profil a beaucoup changé avec les changements introduits dans les circuits de distribution. Actuellement, le marché a besoin de véritables gestionnaires, capables de gérer efficacement les circuits de la supply chain. Chez nous, on les appelle des superviseurs de grands comptes. Le métier de formateur de distributeurs est également appelé à se développer en raison de la complexité des circuits de distribution (techniques de gestion des stocks, gestion des équipes, qualité de service et de transport…). Par ailleurs, notre politique de recrutement s'est stabilisée ces trois dernières années et nous recrutons en moyenne dix à quinze cadres par an, pour des remplacements ou créations de nouveaux postes. Ceci dit, la particularité des multinationales est connue. On recherche avant tout de jeunes profils bénéficiant de trois à quatre ans d'expérience dans un domaine similaire au nôtre. Bien évidemment, nous mettons l'accent principalement sur l'aspect comportemental des candidats. Ils doivent avoir la capacité de se développer vers de nouveaux métiers. Par ailleurs, la maîtrise des langues et des nouvelles technologies sont des atouts déterminants.».