Les taux actuels sont de 6,2 à 6,5% pour les crédits à la consommation et de 4,5 à 4,8% pour les crédits immobiliers. Les banquiers estiment que le potentiel de baisse n'est pas entièrement consommé. La contribution des revenus des intérêts dans le PNB des banques baisse : 69% en 2016 contre 72% en 2015. Le crédit bancaire coûtera moins cher aux particuliers cette année ! Les taux des crédits à la consommation et à l'habitat devraient poursuivre la tendance baissière amorcée début 2016. C'est ce qui ressort d'une revue sommaire des conditions appliquées par les banques sur le terrain, corroborée par les témoignages de responsables de réseaux particuliers des banques. Actuellement, les taux de crédits à la consommation se situent dans une fourchette de 6,2 à 6,5% en moyenne. Pour les crédits immobiliers aux acquéreurs, les taux pratiqués tournent autour de 4,5 à 4,7%. «A ces niveaux, les banques ont sacrifié plusieurs points de base comparativement aux taux en vigueur sur les trois dernières années», informe d'emblée le directeur réseau d'une grande banque de la place. Il rappelle que les taux d'alors dépassaient facilement les 7% pour les crédits à la consommation et 5,25% pour les prêts immobiliers. Il en a découlé une baisse de la contribution des revenus des intérêts dans le PNB des banques (28 milliards de DH en 2016, en baisse de 3,5% par rapport à 2015, soit 69% du PNB contre 72%). Les conseillers clientèle interrogés confient que les dossiers de crédit récemment approuvés l'ont été à des taux en nette baisse. Ils ajoutent qu'ils avancent de plus en plus cette détente du coût des financements dans leur argumentaire face aux emprunteurs. De son côté, le directeur d'agence d'une banque française informe que les taux des crédits conventionnés de plusieurs entités, par définition accordés à des conditions préférentielles, ont été également revus à la baisse à partir d'avril 2017. Le directeur régional d'une autre banque tempère le propos. Pour lui, les crédits accordés par son établissement sont pratiquement au même taux que ceux des deux dernières années, à quelques points de base près. Baisse des charges, du coût du risque et du taux de refinancement Il faut dire qu'en 2017 déjà, les taux des crédits avaient baissé. Selon le rapport de Bank Al-Maghrib sur la politique monétaire de décembre 2017, les crédits à la consommation ont été accordés en moyenne à 6,60% au troisième trimestre 2017 contre 6,64% à la même période de 2016. Pour les crédits immobiliers, les taux sont descendus de 4,94 à 4,68%. L'institut d'émission ajoute que la tendance baissière s'est poursuivie sur novembre et décembre 2017 (non inclus dans les calculs du rapport). Une source à la Direction de la supervision bancaire (DSB) soutient que les taux n'ont pas encore consommé tout leur potentiel de baisse. «Les conditions globales du marché et la dynamique du secteur plaident pour une poursuite de la détente sur l'année», indique-t-elle. Pour expliquer cette tendance, les banquiers avancent en premier lieu le niveau historiquement bas du taux directeur (2,25%). Se financer auprès de BAM et des établissements confrères sur le marché interbancaire (à un taux de 2,27% en décembre 2017) est devenu nettement moins cher. Ce qui s'est ressenti sur le coût des ressources. De plus, les conditions de liquidité du marché aident dans ce sens grâce à l'amélioration des réserves de change et à la bonne tenue des dépôts collectés auprès de la clientèle, dans un contexte de hausse modérée du crédit (autour de +4%). Compte tenu de ces progressions, le coefficient d'emploi est resté stable à 95%. Ajusté des certificats de dépôt, ce ratio ressort à 90%, soit un point de moins qu'en 2016. A fin décembre, le déficit de liquidité s'est établi à 50 milliards de DH en moyenne contre plus de 63 milliards il y a deux ans. Un autre adjuvant, et pas des moindres, est la décélération soutenue des charges totales d'exploitation des banques sur les deux dernières années. En effet, elles ont augmenté de 3,9% à 22,2 milliards, contre une hausse de 5,4% en 2015, induisant une amélioration du coefficient moyen d'exploitation de 3 points, à 46,2%. Dans un contexte de digitalisation du secteur bancaire, les banques recourent de plus en plus à de nouveaux canaux de distribution, à faibles coûts et s'appuyant sur des solutions technologiques innovantes. Ce qui allège drastiquement leurs charges. Aussi, les banquiers évoquent-ils à l'unanimité la baisse du coût du risque pour justifier la détente des taux de crédits. «Cela ne veut pas dire forcément que l'on est en face d'une clientèle moins risquée, mais les banques se sont doté de systèmes performants et verrouillent davantage leur process d'octroi pour se prémunir contre les défauts», analyse un directeur général en charge des métiers support d'une banque. Ce durcissement des conditions de l'offre tire la prime de risque à la baisse et impacte in fine le taux de sortie du crédit. Selon BAM, le coût du risque a poursuivi sa décélération amorcée depuis 2013. Il s'est établi à 8,7 milliards de DH en 2016, limitant sa hausse à 4%, après celles de 7,4% et 5,6% enregistrées respectivement en 2014 et 2015. Plusieurs données sont recoupées par les banques pour jauger une probabilité d'impayés en fonction de l'âge, de la profession de l'emprunteur, de la CSP, etc. Il existe des banques qui ont cumulé un savoir-faire particulier sur des clientèles précises (fonctionnaires, entrepreneurs, professions libérales) qui leur permet de minorer, voire annuler la prime de risque sur ces populations. La concurrence comprime les marges commerciales A côté de tout cela, les banquiers ne laissent aucune occasion pour rappeler qu'ils sont bien moins gourmands qu'auparavant ! «Composante qui pèse dans le taux d'intérêt, les marges commerciales actuelles sont historiquement des plus réduites», indique le responsable régional d'une banque. Ce n'est pas un choix d'ailleurs. Le jeu de la concurrence leur force la main pour préserver leurs parts de marché. «La clientèle reste très portée sur le coût final de son crédit. Elle peut changer de maison pour une très petite différence de taux», note le directeur d'agence. Pas que cela ! La bataille est également engagée sur un autre front, celui des sociétés de financement. Pour se démarquer de ces spécialistes du crédit et récupérer leur clientèle, les banques sont tenues de baisser les tarifs au maximum. Si elles réussissent le coup sur une partie des prêts, notamment le crédit personnel octroyé par ces organismes (en baisse de 3,7% en raison des taux de sortie souvent rédhibitoires appliqués qui dépassent 12% actuellement), les sociétés de financement leur dament encore le pion côté location avec option d'achat (en progression de 25% grâce principalement à la bonne tenue des ventes automobiles).