Au niveau des établissements d'enseignement supérieur, l'accent est particulièrement mis sur l'adaptation de la formation au contexte socioéconomique. En plus d'assurer son rôle d'enseignant, ce dernier doit faire de la recherche un pilier important pour assurer son auto-formation. La qualité de la formation dispensée aux étudiants de l'enseignement supérieur a toujours été au centre des préoccupations des équipes gouvernementales qui se sont succédé. Il est vrai que les réformes qui ont été mises en place n'ont pas abouti à 100%, mais il n'en demeure pas moins qu'elles visaient toutes un certain nombre d'objectifs dont notamment assurer une formation de qualité à même de produire un diplômé aux compétences adaptées au contexte national et aux différentes évolutions. D'ailleurs, une agence dédiée à assurer et à veiller sur la qualité de l'enseignement a été instaurée récemment (voir encadré). En tout cas, une formation de qualité passe essentiellement par la disponibilité d'enseignants avertis, qui actualisent leurs programmes de formation et ne rechignent pas sur les moyens pour les faire évoluer. Compte tenu de cette volonté d'améliorer l'enseignement supérieur au Maroc, surtout au niveau des universités publiques où la qualité de la formation est souvent mal jugée, Saaid Amzazi, président de l'Université Mohammed V à Rabat assure : «Nous sommes loin du temps où les enseignants dispensaient le même programme de formation pendant 30 ans». Cela n'est pas un fait nouveau puisque parmi les principales innovations de la réforme pédagogique de 2003 figure l'instauration d'un système d'accréditation/autoévaluation/ ré-accréditation de chaque filière tous les 5 ans pour les licences et tous les 3 ans pour les masters. «Ce qui nous permet de réajuster régulièrement et de mettre à jour les contenus de nos programmes», souligne-t-il. Ceci constitue une opportunité de s'adapter aux exigences du milieu socio-professionnel et du marché du travail et ce, en fermant certaines filières et en ouvrant d'autres. De même pour l'université Cadi Ayyad (UCA) par exemple, qui dispose d'une carte de formation en réajustement perpétuel suivant les mutations et l'évolution du contexte socioéconomique. «Notre offre de formation se donne comme but de répondre aux nouveaux défis et aux nouveaux métiers du Maroc», explique Abdellatif Miraoui, président de l'UCA. Pour cela, plusieurs objectifs ont été fixés dans ce sens, à savoir l'élargissement du nombre d'inscrits dans les filières professionnalisantes et la diminution de la pression sur les licences fondamentales à travers la politique de délocalisation de certaines filières et l'institutionnalisation des passerelles structurelles ; la mise en place d'une pédagogie plus efficiente par le choix de la formule hybride et inversée et en optant pour la numérisation de l'université, et l'établissement d'une carte de formation lisible et efficiente par la finalisation d'un cahier des charges pour l'accréditation des filières, la mise en place d'une instance de veille sur l'évolution des offres d'emploi et le suivi des taux d'insertion... Cela est bien beau, mais ne peut être réalisable si l'enseignant ne met pas du sien pour s'auto-former. «Un enseignant est avant tout un chercheur, et c'est dans la recherche qu'il devra puiser le savoir qu'il transmettra à ses étudiants. Les études ont montré que les connaissances acquises à l'université sont généralement obsolètes au bout de quelques années, particulièrement dans des disciplines comme l'informatique», insiste M. Amzazi Auprès de HEM, «les enseignants assurent leur auto-formation en s'efforçant de suivre les nouvelles tendances, en renouvelant leurs cours et méthodes et en étant, par conséquent, constamment dans l'innovation pédagogique», explique Yasmine Benamour, administrateur directeur général de l'école. A cet effet, la direction des études Groupe a mis en place un programme d'accompagnement des enseignants reposant sur trois dimensions complémentaires à savoir des cycles de conférences (rencontres plénières avec des conférenciers de haut niveau), des séminaires (séances organisées en groupes réduits et portant sur des thématiques bien précises) et des ateliers d'échange et de partage pédagogiques (ateliers animés au niveau des campus dont la finalité est de partager, entre les enseignants qui le souhaitent, les bonnes pratiques pédagogiques). Une série de Journées «Hackathon pédagogique» ont d'ailleurs été organisées dans ce sens en juin dernier. De même pour l'UCA, les enseignants ont recours à l'auto-formation sous ses différentes formes avec l'accompagnement de l'université. En effet, elle a pris en charge la formation aux langues de son personnel pour ainsi développer leurs compétences linguistiques. Elle a également pris en charge des missions de formation et d'actualisation des connaissances à l'étranger et ce, en vue de la préparation de nouveaux modules. D'autant qu'elle a mis l'accent sur la formation par la recherche à travers la restructuration de la recherche scientifique en pôle autour d'axes prioritaires de développement et implantation des filières. Par ailleurs, comme la bi-diplomation figure parmi les axes de développement de l'université, cette dernière privilégie aussi la formation par l'échange d'expériences dans le but de lancer des filières conjointement avec les partenaires étrangers. En plus de faire de la recherche la pierre angulaire de son auto-formation, «l'étude d'articles scientifiques, la participation à des congrès et à des comités de lecture, l'interaction avec le monde professionnel qui permet l'élaboration d'études de cas contextualisés, l'accès à nos bibliothèques numériques communautaires, permettent aux enseignants de constamment actualiser leurs connaissances et d'en faire bénéficier leurs étudiants», détaille Mohamed Knidiri, président de l'Université Privée de Marrakech, qui ajoute : «Nous pouvons constamment faire évoluer nos programmes et actualiser également les travaux dirigés en laboratoires pour nos étudiants scientifiques ou les études de cas pour nos étudiants dans les filières de management». Ainsi, l'autoformation de l'enseignant devient intrinsèque à sa mission de chercheur qui, elle-même, est tributaire des actions qu'il entreprend dans ce cadre comme les travaux de recherche et d'encadrement, les publications, les participations aux congrès, l'organisation de manifestations scientifiques... Toutefois, un enseignant chercheur ne peut accomplir sa mission que si une formation de base en pédagogie est dispensée. Pour cela, «au sein de l'université, nous sommes en train de mettre en place une formation systématique pour tout nouvel enseignant recruté avant que celui-ci ne débute ses activités d'enseignement», conclut M. Amzazi. [tabs][tab title ="des référentiels d'évaluation verront bientôt le jour"]L'Agence nationale d'évaluation et d'assurance qualité de l'enseignement supérieur et de la recherche scientifique (ANEAQ), prévue dans la loi 01-00 portant organisation de l'enseignement supérieur a été enfin créée. Sa mission principale consiste à effectuer, pour le compte de l'Etat, des évaluations du système de l'enseignement supérieur et de la recherche scientifique afin d'en garantir la qualité. Elle intervient ainsi dans 5 domaines axés sur la qualité, à savoir l'évaluation des filières pour accréditation ou renouvellement des accréditations, l'évaluation des Centres d'études doctorales (CEDOC), de la recherche scientifique, des établissements et de la coopération universitaire. Pour mener à bien cette mission, un consortium de bureaux d'études européen a été mis en place, en vue d'établir des référentiels d'évaluation concernant les 5 domaines d'intervention de l'agence. Ainsi, d'ici novembre prochain, un texte incluant plusieurs critères d'évaluation sera publié, et prendra en compte aussi bien les standards étrangers que les spécificités du marché marocain. Le but, in fine, est de pouvoir évaluer autant la formation et la gouvernance que les moyens financiers, techniques et humains, ainsi que l'ouverture de l'université.[/tab][/tabs]