Le principe du développement durable a vu le jour au Maroc en 2005. Aujourd'hui, 76 entreprises ont décroché le Label RSE de la CGEM et une quinzaine ont exprimé leur volonté de rejoindre ce cercle. Le défi est de pousser les PME à adopter une démarche RSE adaptée. S'il y a une chose que nous ont appris les différentes crises économiques et financières, les soulèvements populaires, les révolutions politiques mais aussi et surtout le dérèglement climatique, c'est la nécessité d'instaurer un nouveau modèle économique à l'échelle mondiale. «Les crises nous invitent à changer de comportement, elles nous indiquent de nouvelles voies, nous incitent à nous engager sur le chemin d'une croissance repensée et à construire un modèle de développement qui prenne en compte les causes de ces crises et fasse de la prévention», estime Aziz Derj, président de l'association RSO au Maroc. Ce modèle doit ainsi allier aussi bien la croissance que la durabilité, en intégrant les bonnes pratiques du développement durable et de la responsabilité sociétale des organisations, particulièrement les entreprises. Actuellement, ces deux notions (RSE et DD) sont désormais incontournables dans la recherche d'un nouveau modèle économique adapté au contexte mondial. «Ce qui implique une profonde métamorphose du mode de gouvernance, du mode de production et de consommation tout en impliquant toutes les parties prenantes et tous les acteurs de la société», ajoute M. Derj. Cette mutation impose d'inclure les conditions d'acceptabilité sociale et de répartition équitable des efforts dans les projets et les décisions et ce, tout en déployant tous les efforts requis pour la réduction des inégalités, la lutte contre le chômage et la précarité, la prévention des risques, la bonne gouvernance... Au Maroc, le principe du développement durable a été lancé par Sa Majesté le Roi Mohammed VI dans son discours prononcé lors des Assises de l'investissement le 1er décembre 2005. Les directives et les grandes orientations y ont été clairement définies au sujet de la responsabilité sociale et environnementale des entreprises. Avec le lancement du projet Pacte Mondial en 2006, la CGEM a développé la charte de responsabilité sociale des entreprises et son label RSE. Trois ans plus tard, le discours du Trône a lancé la mobilisation pour l'élaboration de la Charte nationale de l'environnement et du développement durable à travers une large concertation avec l'ensemble des parties prenantes, à savoir le secteur public, les opérateurs privés et la société civile. Suite à cela, le Conseil économique et social (CES) a vu le jour en 2010, dont les prérogatives ont été étendues aux questions environnementales en 2011, pour devenir le CESE. Sa création a été considérée comme le coup de pouce nécessaire pour éditer un référentiel de normes et d'objectifs pour impulser des contrats partenariaux au service d'une charte sociale marocaine tournée vers l'avenir. Par ailleurs, l'IMANOR (Institut marocain de normalisation) et l'ISO, ont lancé le Projet Mena 26000 (2011-2014) pour la formation d'experts nationaux (16) et dont la mission consiste en l'accompagnement à la mise en place de la démarche ISO 26000. Et ce n'est qu'en 2012 que la loi cadre 99-12 portant Charte nationale de l'environnement et de développement durable a été adoptée, constituant ainsi la référence pour les politiques publiques du Maroc en termes de développement durable. Les entreprises marocaines sont les mieux positionnées dans la région MENA Conformément à ses dispositions, une Stratégie nationale de séveloppement durable (SNDD) a été élaborée. «Reste maintenant à mettre en place les plans d'actions et leurs déclinaisons aux différents niveaux sectoriels et régionaux» souligne M. Derj. Et d'ajouter: «Afin d'accélérer l'adoption des techniques du développement durable, un fonds de développement durable est en train de se mettre en place, incluant des incitations fiscales et financières». En 2013, l'association RSO au Maroc a été créée, avec pour mission de développer, appuyer et promouvoir l'esprit de la Responsabilité sociétale des entreprises, des organisations et des personnes pour un développement durable, économiquement viable et équitable dans un espace où le bien-être de l'homme est central. Actuellement, la RSE est bien développée au Maroc au sein des entreprises. D'ailleurs, d'après Vigeo Rating, organisme de notation RSE, les entreprises marocaines sont les plus avancées en termes de RSE au niveau de la région MENA. Pour l'histoire, «on peut dire que ERAMEDIC a été la première entreprise du Maroc à avoir obtenu le Label de Responsabilité sociale de la CGEM en 2007», indique M. Derj. Actuellement, «Ce sont 76 entreprises qui ont décroché le Label et une quinzaine ont manifesté leur mobilisation pour la labellisation ou sont en cours d'évaluation», assure Said Sekkat, président de la commission RSE et Label à la CGEM. Les entreprises labellisées RSE par la confédération mettent en place des stratégies sur le long terme, intégrant tous les paramètres de la Charte de responsabilité qui, elle-même, se base sur les principes universels édités par les normes publiques internationales, des conventions fondamentales et des recommandations des institutions telles que l'OCDE, l'OIT et l'ONU. Et les résultats attendus d'une politique RSE peuvent se mesurer à travers notamment l'accroissement de la capacité d'attirer et de fidéliser une clientèle de qualité et de gagner de nouvelles parts de marché ; le développement d'un marché du travail attractif ; l'amélioration du climat de travail dans l'entreprise et la capacité d'établir un dialogue social serein. De même, l'implication plus forte des salariés déclenche une augmentation de la productivité et de la qualité de la production à long terme. Par ailleurs, en adoptant une approche proactive, l'entreprise labellisée voit sa capacité de gestion des risques augmenter. Parallèlement, elle tire profit de plusieurs avantages vis-à-vis des établissements bancaires, de l'administration fiscale... A tout cela s'ajoute la consolidation de l'image de marque et la réputation de l'entreprise. Si les grandes entreprises sont vivement intéressées par l'adoption d'une démarche RSE, les PME ne le sont pas moins, sauf qu'elles considèrent qu'elle est réservée aux firmes internationales et à quelques grandes entreprises nationales. «Certains patrons avancent le manque de ressources financières comme étant l'un des principaux freins à l'engagement des PME en matière de RSE. Or, souvent les PME font de la RSE sans le savoir ; c'est un concept peu connu par les dirigeants», se désole M. Derj. Cela dit, étant donné l'impact de plus en plus grand des PME, tant sur les plans économique, social et environnemental, ainsi que les exigences des clients, des investisseurs et de l'évolution de la réglementation, ces entreprises ne peuvent plus agir en dehors de leurs responsabilité sociale. D'où la nécessité de les sensibiliser, de former leurs cadres et de les accompagner dans la mise en place d'une démarche RSE adaptée à leurs enjeux, leurs activités et à leur taille. Il est également nécessaire de leur fournir les incitations, les financements et la reconnaissance des progrès accomplis. A côté du CESE, de la CGEM, de l'IMANOR et de RSO au Maroc, GRI (Global Reporting Initiative), cabinet spécialisé en reporting extra-financier a pris pied au Maroc. Hassan Bouchachia, qui en est le représentant, estime que le Maroc est bien avancé en la matière depuis 2014. D'ailleurs, le reporting extra-financier concerne une dizaine d'entreprises actuellement, à savoir BMCE Bank of Africa, OCP, Managem, ONCF, Lafarge, BMCI, Banque Populaire, Attijariwafa bank, Maroc Telecom et Lydec. Beaucoup reste à faire certes, mais l'on peut se targuer d'affirmer que le pays, grâce aux différentes initiatives royales et incitations des pouvoirs publics et organismes privés, est bien positionné en la matière et avance à pas sûrs. [tabs][tab title ="L'Afrique du Sud, 1er pays africain à publier des reportings extra-financiers"]Le reporting extra-financier ne se limite pas aux sociétés cotées, ni celles qui sont labellisées RSE par la CGEM. Le Maroc est bien avancé certes, mais est dépassé par l'Afrique du Sud qui est le 1er pays africain en terme de nombre de reportings extra-financiers publiés, avec plus de 274 en 2015. En fait, ce classement pourrait s'expliquer par le cadre juridique instauré dans ce pays, qui fait désormais de ce rapport une obligation pour les sociétés cotées. Au Maroc, ce n'est pas encore une obligation légale. Toutefois, le Conseil économique, social et environnemental a émis une recommandation l'année dernière aux sociétés cotées à la Bourse de Casablanca pour prendre cette initiative.[/tab][/tabs]