Le 20 septembre, un échange de tweets s'enclenche entre Ignacio Cembrero, le correspondant du journal espagnol El Pais dans la région du Maghreb et un certain Nouaama Malainine qui demande au journaliste ses motivations derrière la diffusion d'une vidéo d'Al-Qaïda appelant à tuer des Marocains. Cembrero répond alors qu'il s'agit d'"un pamphlet politique fait par des terroristes, mais intéressant à voir!", en rappelant que des sites américains avait publié la même vidéo. Lahcen Haddad entre en lisse Aussitôt, c'est le ministre MP du tourisme, Lahcen Haddad qui réagit au tweet du journaliste espagnol en s'interrogeant : "pourquoi à voir? Pour inciter des jeunes à se faire exploser et tuer des innocents? Qu'advient-il de l'éthique du journalisme?". Le ministre précise également qu' "il ne s'agit pas d'un travail de journalisme mais de la transgression de normes éthiques dont la règle la plus fondamentale est de ne pas donner la parole aux tueurs". Cembrero explique alors au ministre que "la vidéo d'AQMI est en ligne sur les sites américains qui s'intéressent au terrorisme", "Savez-vous que de grands médias de Paris ont mis en ligne des vidéos menaçantes d'AQMI ? Savez-vous qu'El País publie les communiqués d'AQMI qui menacent l'Espagne de reconquérir Sebta, Melilla et l'Andalousie ?" Demande l'espagnol. Le ministre répond qu'il ne trouve pas « normales » les publications d'El Pais. Cembrero s'étonne alors de cette "étrange approche de la liberté de la presse" Pour lui, les lecteurs sont "adultes" et "ont le droit de savoir et de voir, avec la nécessité de préciser qu'AQMI est une organisation terroriste". Haddad, le nazisme, le sexe et le terrorisme Dans ces tweets, le ministre insiste sur l'importance de l'éthique dans le travail journalistique et s'en prend à la conception in extenso que se fait Cembrero du droit à l'information. Une logique qui, selon le ministre permettrait la diffusion de contenu pornographique ou antisémite. Le journaliste espagnol exprime alors son désaccord avec cette "vision très restrictive de la liberté d'expression". Mais se dit "content qu'un ministre marocain dialogue". Lahcen Haddad esquive la question sur la poursuite judiciaire des sites américains Cembrero demande à Haddad "si Ramid va porter plainte contre les sites américains qui ont diffusé la vidéo comme il l'a fait pour El Pais et Lakome". Haddad suggère à Cembrero de poser la question directement à Ramid et de préciser que "le droit à l'information qui conduit au meurtre n'est plus un droit. C'est être de connivence et une caution pour le tueur" avant d'ajouter : "le fait que Ramid ne poursuive pas ces sites ne vous donne pas le droit de diffuser ce contenu qui incite les jeunes à tuer". Cembrero : Anouzla n'est-il pas victime de sa ligne éditoriale ? La discussion prend alors un autre tournant et le journaliste espagnol reproche au ministre de penser que "les marocains ne sont pas assez mûrs pour regarder des vidéos d'AQMI". Il interroge alors le ministre si le Maroc n'est pas embarrassé par la position "de dizaines d'ONG qui estiment qu'Anouzla a été arrêté non pas pour une vidéo mais pour sa ligne éditoriale". A brûle-pourpoint, Haddad répond à Cembrero qu'il « cherche toujours à nuire au Maroc et aux marocains et par n'importe quel moyen » et de poursuivre qu'il s'interdit de se prononcer sur une enquête en cours. Haddad contredit son parti, le MP Ignacio Cembrero demande alors pourquoi "le MP peut se prononcer sur le cas Anouzla" et pas le ministre "sur les poursuites éventuelles de Ramid contre des sites américains »? Haddad a répondu que son parti, le MP "s'est prononcé avant qu'Anouzla ne soit arrêté et placé en garde à vue". Mais une personne qui avait pris part au fil de discussion rappelle au ministre que le communiqué du MP est paru le 17 septembre, c'est-à-dire le même jour de l'arrestation du journaliste Ali Anouzla. Lahcen Haddad a quitté alors la conversation pendant plus de 24H, pour revenir à la charge et déclarer que "les marocains doivent être protégés par leur gouvernement contre les terroristes d'Aqmi qui trouvent un support gratuit chez des médias irresponsables », entendez Lakome et l'ensemble des sites professionnels d'information, européens et étrangers ayant travaillé sur la vidéo d'Aqmi, menaçant le régime marocain.