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Au cinéma, on s'aime dur
Publié dans La Gazette du Maroc le 13 - 03 - 2006

Nous avons été dans quatre salles de cinéma de Casablanca. Quatre endroits très prisés par tous ceux qui sont en mal de sexe et qui n'ont aucune autre solution que l'obscurité d'une salle de cinéma pour goûter à un plaisir volé. Lux, Empire, Ritz ou Lutetia… Que de beaux noms pour des lieux où l'on s'aime, où l'on donne son corps, où l'on reçoit l'autre moyennant quelques dividendes et beaucoup de patience et de métier.
Ce qu'il faut d'abord savoir, c'est que vu que les salles de cinéma sont, excepté quelques-unes qui continuent de tirer leur épingle du jeu, presque vides à longueur de semaine, il y a des gens inventifs qui ont su s'adapter à la misère ambiante. Une salle vide, c'est deux chances à exploiter. On est perdu dans l'immensité noire de ce lieu clos. Et ensuite, on peut échapper à la vigilance. Non pas que les propriétaires des salles soient complices, mais bon, quand on a une salle vide, on est tout de même content de voir quelques silhouettes s'aventurer dans le noir en attendant un écran et des images.
Khadija devant le Ritz
Devant le cinéma Ritz, Khadija est très connue. Elle fait des entrées et sorties durant les deux séances de l'après-midi. Et parfois si le cœur lui en dit, elle vient travailler le soir. « Je la connais très bien. Elle est là tous les jours. C'est ici qu'elle bosse. C'est simple, elle se fait cinq ou six clients pour dix dirhams au cinéma. Ici au Ritz personne ne viendra les déranger. On s'en fiche, parce que ça ne marche pas de toute façon ». Ce garçon de café connaît la chanson. Khadija a des clients. Ils n'ont pas de piaules pour faire leurs petites affaires. Alors, ils viennent voir Dija qui leur offre ses rondeurs dans le noir pour 10 dirhams la passe avec, évidemment, les deux tickets aux guichets. Sans oublier qu'il faut glisser quelques pièces à l'ouvreuse qui fait comme si elle n'avait jamais vu Dija qui défile au moins cinq fois en l'espace de deux heures à chaque fois avec un visage différent. Khadija n'est pas une fille sans intérêt. Elle a des atouts à faire valoir. D'abord elle est assez jolie. Un visage agréable sans être beau. Ensuite, elle est bien montée, Khadija. Et elle sait dodeliner du derrière. Il faut marcher derrière elle pour se rendre compte que ce déhanchement ne s'apprend pas en deux tours trois mouvements. On s'applique, on travaille la hanche et la croupe, et on sait poser un pied devant l'autre. Bref, si tu es en manque ou en goguette et que le cœur t'en dit, Dija est la personne qu'il faut avoir devant soi.
Hanane tient son QG
Le cinéma Empire a sa clientèle. Quelques ouvriers à la petite semaine, des désœuvrés en manque de sensations intimes, des cireurs de chaussures, des couples oisifs, quelques serveurs de cafés et beaucoup de chômeurs qui arrivent à se payer une séance d'un film arabe ou un nanar d'action avec en prime une chaloupée sur le savoyard comme dirait un ami qui en connaît un large chapitre sur la nature humaine. Hanane traîne sa djellaba bleue dans les parages entre les bars, le passage du coin et un kiosque où elle se laisse aborder par des candidats à une séance rapide dans la salle Empire pour quelques pièces de monnaie. « Elle n'est pas la seule. Elles sont au moins une douzaine qui travaillent dans le secteur. Tout le monde le sait. Et dans un sens, ça rend service à tous. Que voulez-vous qu'elles fassent ? Il n'y a que ce travail qui puisse marcher en ce moment ». Pour ce vendeur de survêtements qui tient boutique sur le dallage, c'est une aubaine pour beaucoup de « pouvoir se payer des filles bon marché sans avoir à payer ni l'hôtel, ni la mère maquerelle, ni personne d'autre ». Les clients, eux, que nous avons vu faire un rapide saut en salles, le temps de conclure et de ressortir, disent que le film était très mauvais comme s'ils avaient le luxe de sortir après un quart d'heure de bobine parce que le produit ne correspondait pas à leurs goûts ! Bref, tout le monde trouve son compte dans cette petite industrie du film. Hanane se fait entre 50 et 70 dirhams par jour, les mecs se soulagent les tripes de la crasse des jours, le cinéma fait un soupçon de recettes et les ouvreuses ferment les yeux pour un petit bakchich.
Le Lux et le Lutetia
Le hasard géographique et urbanistique a fait que ces deux cinémas très connus de la ville ont leurs devantures devant des cafés et des bars. La journée, on fait ses emplettes en sirotant un café dégueulasse. Il suffit de pointer dans un café, de commander et d'attendre. Les filles font plusieurs passages devant le cinéma comme lors d'un défilé très couture. Quand on a pris son courage à deux mains (chose très facile quand on a la trique), on se lève, on marche et on demande à la fille qui regarde les affiches si elle veut voir le film. Elle dit toujours oui et une fois le guichet passé, elle empoche son dû, avant d'être consommée par le client. C'est la règle. Il paraît qu'il y a eu des gars qui ont vite fait de tourner casaque en niant tout rapport avec la femme qui réclame sa paye. Pour cette ouvreuse audacieuse, c'est habituel : « Vous avez l'air surpris, mais c'est connu. Et vous croyez que l'on va poster un policier devant la porte et dans la salle pour surveiller tout ça ! Les filles font leur travail et nous on a pour ordre de les placer. Le reste, on s'en fiche. On n'est pas ici pour faire la serpillière et observer les gens dans la salle. D'ailleurs, les gens qui font ça sont discrets, ils savent comment le faire. Et les filles ont peur, il ne faut pas croire ». Oui, on peut avoir peur et il y a de quoi, parce que, selon les dires de plusieurs ouvreuses, il y a eu des scandales entre femmes et hommes pour des parties de plaisir gâchées. Alors, on en est venu aux poings et aux chignons et les choses ont dégénéré. Bien sûr, il fallait rétablir l'ordre et veiller à la réputation du cinéma. On a fait venir un policier qui a tancé tout le monde en emmenant le fautif dehors avec sa dulcinée qui a perdu son fard. La suite est prévisible et le plus important dans tout ceci est de savoir que pour beaucoup, il vaut mieux raser les murs et les fauteuils dans le noir, ni vu ni connu, que de crier au hold-up même si on se fait blouser par quelqu'un.
Quoi qu'il en soit, chacun peut aller faire l'expérience par lui-même devant quelques salles de cinéma de la ville. Souvent, dans l'après-midi, il n'y a pas un chat. Les clients se font rares. Et parfois, on a été obligé d'annuler des séances par manque de spectateurs. Alors quand les gens ont soif d'amour et de sexe et qu'ils n'ont pas où aller faire leurs galipettes, il reste le film que l'on va pas voir, mais que l'on va vivre avec en se passant pour son propre héros.


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