54% des personnes atteintes du cancer ne croiraient pas vraiment en leurs chances de guérison et 67% d'entre elles considèrent que le coût du traitement est trop cher, se tournant ainsi vers la médecine traditionnelle… Deux éléments qui en disent trop sur le manque total d'information autour de la maladie du cancer au Maroc. Le cancer n'est pas une maladie fatale, il n'est pas contagieux, et pour peu qu'il soit dépisté à temps, un cancer peut être tout à fait curable. C'est en quelques mots le message que tente de faire circuler parmi la population l'Association Lalla Salma de lutte contre le cancer. Une enquête récemment menée par cette dernière, et dont les résultats ont été communiqués la semaine passée, dévoilent cette “peur générée par le caractère meurtrier du cancer” chez la quasi-totalité de la population marocaine, notamment chez les couches les moins instruites. Une peur, certes légitime, mais qui agit immanquablement en tant que “frein psychologique” qui n'est pas pour faciliter le déroulement du traitement ni son aboutissement. Et pour cause, un énorme déficit d'information à combler, notamment au niveau des symptômes dont la méconnaissance conduit aux consultations tardives. Un an et demi est donc, en moyenne, le temps souvent écoulé avant que la personne atteinte du cancer ne réagisse aux premiers signes de la maladie. En effet, chez un bon nombre de gens, certains signes censément indicateurs du cancer ne semblent pas tellement alarmer ni inciter à consulter. Ainsi, ganglions, kystes, saignements, amaigrissement et autres symptômes n'inquiètent que lorsqu'ils atteignent des niveaux importants, ce qui équivaut à un stade assez avancé du cancer, plus difficile à guérir si ce n'est irréversible. Pour le corps médical, rien n'est encore gagné lors d'une première consultation. Il s'agit donc souvent de “fidéliser” le malade et le faire revenir et l'impliquer dans le traitement. Car, pour des raisons matérielles ou simplement culturelles, les malades pour plusieurs ne reviennent plus après une première consultation. Les raisons en sont souvent liées à la faiblesse des moyens matériels. Peu de villes disposent de centres de traitement chimiothérapiques. “Certains malades habitant loin de Casablanca font leur première séance de chimiothérapie puis abandonnent”, affirme-t-on à l'Association. Faire adhérer le malade au traitement médical s'annonce donc souvent très peu évident. Les freins culturels en sont également pour beaucoup. Il semblerait, en effet, que dans la plupart des cas, le patient, faute de moyens et d'informations, s'oriente vers le charlatanisme et autres moyens dits “médecine traditionnelle”. C'est là toute une mentalité qu'il est carrément question de réorienter. Lorsqu'on évoque l'attitude des gens à l'égard du cancer, on ne s'étonne plus beaucoup de ce genre de réticences quant à son traitement. L'étude dévoile dans ce sens une terminologie spontanée associée à la maladie. Pour éviter de prononcer le vilain et effrayant mot “cancer”, la population sondée préférera donc parler de “Al Mard Li makaytssamach”, “Al Mard el khaïb”, “Al mard laqbih”, “Laâdou”…