Grippe aviaire et chikungunya Entre grippe aviaire et chikungunya, les risques sont énormes. Pourtant au Maroc, on rassure en disant que nous sommes toujours “ à l'abri d'une catastrophe”. C'est ce que l'on espère. Comme un malheur ne vient jamais seul, voici qu'à peine la guerre totale déclarée au virus rampant de la grippe aviaire que le monde se voit débordé, sur sa droite, par un nouveau fléau autrement plus meurtrier. Si l'Europe est en train d'encaisser les premiers cas de grippe aviaire constatés sur les oiseaux sauvages et domestiques, France, Allemagne, Italie…, la maladie de la terreur du nouveau siècle, que nous croyons confinée à l'influenza H5N1 transmise par la volaille, vient de prendre tout le monde à contre-pied après le décès de 77 habitants de la Réunion suite à des piqûres de… moustiques. Et comme 130 000 personnes sont déclarées atteintes dans ce département français d'outre-mer flanqué à l'est de l'Afrique dans l'océan Indien, la pandémie est galopante, nettement plus rapide que la grippe aviaire, puisque la population totale de l'île n'excède guère les 600 000 âmes. Après la vache folle qui avait mis la planète en émoi et terrassé l'économie agroalimentaire européenne, on nous annonce encore des cas d'infection sur les viandes rouges à l'abattage de bétail atteint de tuberculose. Non seulement les prix de la viande du cheptel sont hors de prix, mais la consommation du poulet sur lequel se rabattent toutes les bourses modestes a chuté vertigineusement de 60%. Et c'est toute la production nationale qui s'en trouve menacée. Sur ce chapitre de la tuberculose bovine, le mutisme des pouvoirs publics est inquiétant comme l'est tout autant l'entêtement des décideurs sanitaires à persister et signer que le Maroc est toujours à l'abri d'une “catastrophe aviaire”. Et les surprises ne sont pas à écarter car la tuberculose bovine est une maladie contagieuse pouvant infecter l'homme et dont on ignore encore les véritables conséquences. C'est comme ces scientifiques qui ont trôné, longtemps, pour affirmer que « le chikungunya ne tue pas ». Assertion vite démentie par des dizaines de cadavres et des centaines d'hospitalisés dont on s'attend au pire. Le nombre de malades annoncés à Mayotte s'élève à 1365 Réunionnais. Et l'on ne peut que déplorer la langue de bois officielle et l'absence d'une communication préventive et de crise en pareille situation d'urgence. Les plus grands spécialistes de communication de crise sont de plus en plus sollicités pour dédramatiser les informations sur la santé animale et humaine dans l'opinion publique. Et même si la grippe aviaire ne se manifeste encore qu'à l'état de menace potentielle, des agences sont déjà sous contrat pour mettre en place des dispositifs communicationnels de lutte contre une pandémie grippale. Les estimations des scientifiques internationaux sont, on ne peut plus alarmantes : si la pandémie grippale venait à se déclarer, on aurait à déplorer entre 150 et 450 millions de morts. Horrible, tout simplement. L'heure est grave pour continuer à tout nier en bloc. Et les sorties du gouvernement «consommant publiquement du poulet» n'arrangent rien à la dégringolade accélérée de l'industrie de l'élevage des volailles dans le Royaume et ailleurs dans le monde. Au lieu de s'user à un scénario se contentant de renier en bloc toute infection virale décelée au Maroc en phase trois dans l'échelle de gravité de la lutte contre l'influenza, c'est-à-dire contrôle et surveillance renforcés des mouvements d'oiseaux migrateurs, il serait plus indiqué de passer au cran supérieur de prévention et secourisme en cas de déclaration du fléau aviaire dans le Royaume. Et tout ce dispositif est encore à installer, sinon gare aux dégâts à grande échelle. Sur l'heure, le confinement du poulet et les cordons sanitaires sont les seules mesures du plan d'attaque mis en œuvre chez nous. En tout cas, les indices de nervosité gouvernementale sur la probabilité d'occurrence de l'épizootie ne trompent personne et la panique dans les esprits des consommateurs continue de faire des ravages. L'Europe, mise dans les mêmes conditions que le Maroc et redoublant de vigilance pour détecter, précocement, toute infection des oiseaux domestiques confinés, a inclus dans ses programmes préventifs les estimations de capacité des cimetières régionaux et locaux pour parer à tout impondérable. En attendant les moustiques… car aux dernières nouvelles, des dizaines de cas auraient été suspectés à Paris et que d'autres pays africains seraient confrontés à des cas de contamination du virus “Chi” transmis par les moustiques. Le plus grave, en cas de pandémie virale, non seulement ce genre de maladie reste un mystère pour la recherche scientifique, mais, plus grave encore, les scientifiques estiment qu'il ne faut pas moins de cinq années pour être en mesure de fabriquer le vaccin correspondant. Entre temps, il serait dommage de comptabiliser les victimes à grande échelle.