Opération “Départs volontaires” Interview d'Ahmed Lahlimi, Haut Commissaire au Plan L'opération des départs volontaires dans l'administration publique a pris fin le 30 juin dernier. Jusqu'à présent environ 10.000 fonctionnaires ont déjà quitté leur emploi et touché leurs indemnités. Parmi eux, les secteurs sociaux, comme l'Education et la Santé, ne dépassant pas les 2 %. Le ministère des Finances compte environ 1.400 départs, et le ministère de l'Habitat et de l'Urbanisme a autorisé 450 départs. Mohamed Boussaïd, a estimé que "cette opération est une réussite totale qui a amplement atteint les objectifs assignés". La direction du département de Mohamed Boussaïd qui a élaboré et exécuté toute cette opération, en étroite collaboration avec l'ensemble des ministères, s'était fixée trois objectifs. D'abord, remédier au problème du sureffectif que connaissent tous les ministères, dans des catégories professionnelles, ou dans des régions bien déterminées. Le second objectif consiste à réduire sensiblement la masse salariale. Et l'objectif numéro trois, a trait à la création d'entreprises par les fonctionnaires qui quittent la fonction publique pour investir dans le secteur privé. A l'heure des premiers bilans, une série d'interrogations s'imposent pour saisir toute la portée de cette opération. Dans ce sens, LGM a envoyé une série de questions à tous les ministres du gouvernement Jettou. Voici les réponses de Ahmed Lahlimi, du Haut Commissariat au Plan. La Gazette du Maroc : que pensez-vous de l'opération " départs volontaires " qui a pris fin le 30 juin 2005 ? Ahmed Lahlimi : je souhaite bonne chance à ceux qui ont bénéficié de la manne que leur a procurée cette opération, même parmi eux, à ceux qui n'ont rendu au pays qu'un service approximatif au cours de leur carrière. Quel pourrait être l'impact social d'une telle opération ? Difficile à évaluer sans une étude circonstanciée. Des milliers de fonctionnaires ont quitté volontairement leurs fonctions. Quelles sont les implications financières que cela va engendrer sur le budget de l'Etat ? C'est semble-t-il le taux élevé de la masse salariale par rapport au PIB qui a justifié cette mesure. Ce taux restera le même, il augmentera ou diminuera selon le niveau de croissance du PIB, des recrutements et de la productivité de l'Administration après cette opération et de l'effet de celle- ci sur les équilibres du système de retraite. Si chaque candidat arrivait à se lancer dans les affaires avec l'argent des indemnités perçues, pensez-vous que ce serait un moyen de réduire le taux de chômage ? Si c'est le cas, jusqu'à quel niveau selon vos estimations ? Cela dépendra du devenir des bénéficiaires de l'opération. Ayant moins de 60 ans, leur impact sur le niveau de l'emploi serait nul s'ils ont acquis des compétences reconnues et recherchées et auraient trouvé un nouvel emploi dans le privé ou des organismes internationaux. S'ils n'en trouvent pas, ils seraient comptabilisés comme demandeurs d'emploi et augmenteraient d'autant le nombre de cette catégorie. Bien sûr, ceux parmi eux qui se lanceraient dans les affaires probablement, cela ne serait, en grande majorité, que pour créer des entreprises individuelles. Ils pourraient, pour quelques uns, relever alors, selon les statuts de leurs entreprises, du secteur informel ou pour ceux qui réussiraient, devenir à leur tour employeurs. Dans quelle proportion ?, difficile à prévoir ! Dans les deux cas, ils resteront, à titre personnel, comptabilisés comme actifs occupés comme auparavant. Encore faudrait-il remarquer que la gestion d'une entreprise demande des dispositions qui ne sont pas celles qui prévalent dans la gestion administrative. Au moment où en Europe on cherche à trouver des emplois pour des seniors (justement la quasi-totalité des fonctionnaires qui quittent volontairement aujourd'hui), pensez- vous que c'est une bonne opportunité de laisser toute cette compétence partir à la retraite très tôt alors que le pays en a besoin ? De telles évaluations s'inscrivent dans une politique globale qu'il ne m'appartient pas de juger. D'autant plus qu'il est admis aujourd'hui que la pyramide des âges des pays du Maghreb et de l'Europe occidentale sont sensiblement les mêmes. Pas tout à fait. Nous sommes dans une phase de transition démographique. Nous tendons vers une pyramide des âges dont le profil s'approche de celui des sociétés modernes. Nous n'y sommes pas encore. Connaissez-vous d'autres exemples de départs volontaires dans le monde qui ont donné les résultats escomptés économiquement ? Si oui, lesquels ? Personnellement, je n'en connais pas. Je pense que les organismes internationaux qui ont recommandé cette opération et ont aidé à son financement doivent connaître, s'ils existent, d'autres exemples. L'Administration se déleste de 30.000 fonctionnaires, cela ne représenterait que 5% des effectifs globaux. Est – ce suffisant pour réaliser tous ces objectifs visés par l'opération ? Il est trop tôt pour répondre à votre question. L'avenir le dira.