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Le dégel
Publié dans La Gazette du Maroc le 28 - 03 - 2005


Maroc - Algérie
La rencontre, au sommet à Alger du Roi Mohammed VI et du président Abdelaziz Bouteflika, est un signe, longtemps différé, du dégel des relations entre les deux pays. Après de longues années de blocage, notamment sur la question du Sahara, la situation est condamnée à évoluer. L'avenir des relations avec les partenaires européens et américains ainsi que celui de l'UMA en dépendent.
Cette fois-ci l'annonce ne fut pas vaine. Le Roi Mohammed VI et le président Abdelaziz Bouteflika ont eu de longs entretiens en marge des travaux du 17ème sommet de la ligue arabe à Alger puis en tête-à-tête, pendant plus de deux heures, jeudi dernier avant le départ du Souverain. Le président et les officiels algériens n'ont pas ménagé leurs efforts pour exprimer la chaleur de leur accueil et multiplier les signes d'une volonté de réchauffement des relations bilatérales. Cette volonté démonstrative laisse-t-elle enfin augurer le dégel tant attendu dans les rapports entre les deux pays?
Quoi qu'aucun communiqué n'a été publié suite au long entretien dans le palais de Zeralda, tout semble concorder pour affirmer que les sujets les plus épineux ont été abordés et que la voie serait plus dégagée pour des consultations décisives.
Le fait même de se rencontrer et de se parler peut être considéré comme un événement, compte tenu de l'impasse où se trouvaient jusque-là les relations entre les deux pays. Il va de soi que tout ne peut être réglé d'un seul coup et que l'étendu du différend exigera encore des efforts et du temps.
A ce stade ce sont les signes lancés qui priment et qui indiquent que tout est possible. Si dans les régions limitrophes, les populations espéraient l'annonce d'une réouverture de la frontière terrestre et de la levée des visas pour les Marocains, il faut s'attendre, apparemment, à ce que ces retrouvailles au sommet produisent tous leurs effets. Va-t-on vers la réactivation des commissions mixtes et d'experts comme préalable à de telles mesures? Ou bien tout reste-t-il conditionné par l'évolution attendue sur le dossier principal qu'est celui du Sahara? Au cours de la conférence de presse tenue à la fin du Sommet de la ligue arabe, le ministre des Affaires étrangères algérien, Belkhadem, a répété la position de son pays sur l'examen dans le cadre onusien de la question du Sahara précisant toutefois que : “ce que conviendront les parties au conflit, le Maroc et le Polisario, aura l'appui et la bénédiction de l'Algérie”.
Simple formule pour éluder le problème ou nuance significative? Est-ce le signe d'une éventuelle recherche d'un compromis au-delà de la position rigide qui a jusqu'ici prévalu?
Autant de questions qui seront sans doute élucidées dans un proche avenir. En tout cas, la nécessité de faire évoluer cette situation de blocage est devenue pour tous incontournable. Quelle est aujourd'hui la donne algéro-marocaine?
La donne algéro – marocaine
Après avoir assisté aux obsèques de feu Hassan II en juillet 1999, Bouteflika n'avait croisé Mohammed VI qu'à l'occasion de rencontres internationales, la dernière en date étant celle de Madrid lors de la cérémonie à la mémoire des victimes de l'attentat terroriste du 11 mars. La situation bloquée depuis 1994 ne semblait guère pouvoir évoluer alors que le contexte tant régional qu'international l'exigeait de façon plus pressante qu'auparavant. Déjà lourdement grevée par le différend sur le Sahara depuis 1974, la situation fut aggravée en 1994 à la suite de l'attentat contre l'hôtel Asni à Marrakech. Le Maroc avait alors évoqué une implication algérienne dans cet attentat. Les frontières terrestres furent à nouveau fermées et les visas instaurés entre les deux pays. Depuis, la question du Sahara n'a cessé d'entretenir la mésentente chronique, Alger maintenant une position rigide sur ce dossier alors que la perspective d'un référendum devenait de plus en plus aléatoire. En effet, la préparation du référendum s'était enlisée au fil des années, du fait de la difficulté d'établir des listes incontestables des personnes originaires du Sahara. Les fluctuations de l'ex-envoyé spécial de l'ONU, James Baker, ont elles aussi semé le trouble. Il avait préconisé au départ une formule garantissant l'autonomie de cette région dans le cadre de la souveraineté marocaine. Par la suite, devant le refus d'Alger et du Polisario, il avait présenté une seconde formule du plan de règlement qui prévoit une phase d'autonomie de 5 années suivie d'un référendum d'autodétermination. À l'évidence, la nature impraticable de ce second plan Baker avait davantage mis en lumière le caractère régional du conflit impliquant directement l'Algérie. Seuls les diplomates et les journaux liés aux éléments les plus irréductibles de la hiérarchie militaire algérienne (tel le quotidien “El Watan”) persistent à prétendre le contraire.
C'est ainsi qu'aussi bien à Paris, Madrid et Washington qu'au sein de l'ONU, il devenait clair que cette question ne saurait être résolue sans une solution négociée à l'échelle régionale.
Discordances en Algérie
Les risques de déstabilisation de la région, aux portes de l'Europe, sont apparus avec plus d'évidence. En Algérie même, les voix discordantes sont devenues plus nombreuses et plus osées. A l'instar du général à la retraite Khaled Nizzar qui fut l'un des principaux hiérarques de l'armée et du pouvoir, plusieurs leaders de partis politiques algériens ont remis en cause la position officielle. Pour eux, celle-ci n'est ni une cause nationale intangible ni un dogme. Ils ne considèrent pas qu'il faille mettre en péril toute la région et déstabiliser le Maroc pour un différend hérité du clivage entre les deux régimes.
Les partenaires européens expriment plus nettement leur souci d'un règlement équilibré et négocié de cette question. Notamment la France et l'Espagne (depuis l'arrivée au pouvoir du socialiste Zapatero) qui, historiquement, ont été impliquées dans les différentes phases de colonisation du Maroc, zones sahariennes comprises. Au moment où les regroupements régionaux sont souhaités et encouragés afin de créer de meilleures chances de développement et d'assurer plus de sécurité par ces temps de hantise du terrorisme, les Européens sont très préoccupés par le maintien d'une tension au Maghreb porteur de menaces. La présence de Rodriguez Zapatero, Premier ministre espagnol, au sommet arabe d'Alger fut très éloquente à ce sujet. En clarifiant sa position, le Maroc de Mohammed VI prône la seule solution viable, “ni vainqueurs ni vaincus”, qui garantit aux populations des zones sahariennes une large autonomie dans le cadre de la souveraineté nationale. Cette perspective est considérée comme “réaliste” et “équilibrée” est seule à même de relancer la dynamique maghrébine jusqu'ici bloquée. Elle s'inspire d'une vision et d'une approche qui n'excluent pas une participation plus démocratique des populations et qui tablent sur une adhésion de plus en plus confiante, à mesure que les réformes démocratiques et leurs retombées sociales seront consolidées. Faut-il s'étonner de l'attitude outrancière de Driss Basri rejetant cette perspective et épousant à contre courant le plan Baker et de l'accueil que lui réserve le journal des “durs” en Algérie, “El Watan”? L'ex-ministre représentait une conception manipulatrice et qui privilégiait la poigne plutôt que la recherche de l'adhésion, semblable en cela à ses derniers compères algériens.
Le blocage de la situation n'est plus acceptable tant au niveau des deux principaux pays du Maghreb que des partenaires européens et américains. C'est “El Watan” lui-même qui est obligé de constater que “les pressions de Washington et de l'Europe ne cessent de s'accentuer pour voir les deux Etats locomotives du Maghreb se rapprocher davantage”. Dans quelle mesure le pouvoir d'Alger pourra-t-il assouplir son parti-pris et ses réflexes concernant la question du Sahara? On se doute que celle-ci était devenue une composante quasi-structurelle des rapports de force internes de la hiérarchie militaire. Alors que nombre de mythes liés à la guerre de libération nationale sont actuellement remis en cause ainsi que le mythe de la construction socialiste qui ont longtemps servi de fondements d'auto-légitimation du pouvoir et de son noyau militaire, il serait temps de reconsidérer aussi le dogme du Sahara. Il est manifeste qu'une telle remise à plat nécessitera un débat et un rééquilibrage internes qui ne seront pas toujours aisés. Cependant, on peut parier que l'évolution générale de l'Algérie va conditionner les priorités de l'avenir à mesure que la démocratisation avancera et obligera à se concentrer sur les vrais problèmes d'ordre économique, social et culturel vécus par la majorité des populations.
Contentieux cumulés
La situation de blocage s'est aussi traduite dans les autres domaines des relations entre les deux pays. On sait que les régions limitrophes ont subi les conséquences néfastes de la fermeture de la frontière terrestre. Au lieu de favoriser les échanges humains et économiques, celle-ci a engendré un face-à-face stérile, produisant de la méconnaissance entre des peuples très proches et favorisant les activités de contrebande. Il faudra désormais envisager une politique concertée pour à la fois stimuler et réguler les échanges pour éviter de nouveaux déséquilibres porteurs de nouvelles mésententes. Il y faudra, le moment venu, beaucoup de doigté et de sens de l'intérêt mutuel. On sait que les “durs” en Algérie hostiles à une normalisation des relations avec le Maroc ont à chaque fois ressorti des griefs, exagérés à souhait sinon tout à fait imaginaires, pour bloquer toute tentative de réconciliation. C'est ainsi qu'ils reprochent au Maroc d'avoir “spolié” d'anciens investisseurs algériens alors que des éleveurs ont été victimes de vols de leur cheptel à la frontière. Ils font grief aussi au Maroc de pomper la nappe phréatique de zones algériennes et de déverser des déchets toxiques en provenance d'Oujda dans l'oued Mouillah. Le reproche le plus récurrent porte sur la devise algérienne qui serait bradée (1.000 dinars s'échangeraient contre à peine 90 dhs). Autant de griefs qui apparaissent vite assez futiles et qui ne sont que l'expression d'une hostilité que rien ne saurait justifier. Les contentieux qui ont pu exister peuvent être réglés sans trop de dommage si la volonté politique ne fait plus obstacle. Déjà des signes se sont fait jour, récemment, malgré leur caractère partiel. La levée des visas pour les Algériens a été plutôt bien accueillie par ces derniers, malgré la réaction ambivalente du pouvoir au moment de son annonce. Une nouvelle desserte aérienne entre Casablanca et Oran a été inaugurée début février. Une délégation du patronat algérien a effectué une visite à Rabat jugée assez encourageante. La réactivation de l'Union du Maghreb arabe sera sans doute l'une des premières conséquences d'une évolution des relations algéro-marocaines. C'est dans ce cadre régional que beaucoup de questions litigieuses pourraient faire l'objet de compromis et d'une baisse des tensions. Encore faut-il que les pays du Maghreb tirent les leçons des errances du passé faites d'illusions de leadership dominateur ou de petits calculs égoïstes de chaque régime.
Ils seraient aussi bien inspirés de tirer les leçons des impasses meurtrières où les pays du Machrek n'ont cessé de se fourvoyer.
Leçon pour l'UMA
La thématique des réformes peut être abordée au Maghreb avec moins d'appréhensions et plus de réalisme. Elle devrait permettre une intensification des échanges économiques et surtout humains. Les liens entre les sociétés civiles et les courants politiques des pays maghrébins seront la mesure de l'évolution à cette échelle et permettront de changer réellement la situation actuelle où les cloisonnements restent prédominants.
Au niveau des Etats, rien n'exclut d'entrevoir une harmonisation des positions concernant les questions liées aux relations avec l'Europe, à la lutte contre le terrorisme et à la régulation des flux migratoires. Ils pourraient aussi constituer un pôle modérateur vis-à-vis des convulsions du Machrek pour une solution de paix durable entre Palestiniens et Israéliens. Le Maghreb a tout intérêt à cette harmonisation interne même si la volonté politique et les vieux réflexes ne suivent pas toujours. Il faudrait encore que les suspicions latentes ou manifestes entre les pays de la région puissent être dépassées. Lors du sommet arabe d'Alger l'inimitié entre le Libyen Kadhafi et le Mauritanien Ould Tayaa était très manifeste, le second ayant auparavant accusé le premier d'avoir soutenu les deux tentatives de putsh à Nouakchot en 2003. Les méfiances de la Tunisie de Ben Ali vis-à-vis de ses voisins ne se sont pas dissipées.
Il n'y a plus eu de réunion au sommet de l'UMA depuis 1994. L'accord annoncé par les ministres des Affaires étrangères maghrébins pour la tenue d'un sommet à Tripoli en juin lèvera-t-il les obstacles cumulés? On craint déjà l'absence de Ould Tayaa à cette rencontre et les Tunisiens n'auraient renoncé qu'à contre-cœur à leur proposition de tenir le sommet à Tunis pour aplanir tous les contentieux.
Vis-à-vis du Moyen-Orient, on voit se dessiner une convergence des Maghrébins, notamment pour une réforme de la Ligue arabe, alourdie par une bureaucratie à 90 % égyptienne et soupçonnée de mauvaise gestion des fonds qui lui sont alloués. De même, à propos du conflit israélo-palestinien, les Maghrébins veulent relancer le rapprochement, le Maroc ayant invité Shimon Peres, le leader travailliste israélien et la Tunisie Ariel Sharon lui-même alors que Kadhafi, dans son style inénarrable, prône un Etat multiconfessionnel unique.
Le dégel algéro-marocain va-t-il permettre de dégager la voie obstruée d'une UMA qui est jusqu'ici restée synonyme de division et d'impuissance? On ne peut pas indéfiniment décevoir les peuples.


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