ue veulent les laïcs dans ce pays ? s'est interrogé le quotidien "Attajdid", paru jeudi 6 mars 2005. Apparemment théorique, la question est aussi polémique que d'actualité. Non sans acrimonie, elle fait au fond, l'écho à une plate-forme, très iconoclaste, rendue dernièrement publique par l'Association "Alternatives" ; de Driss Benali. Dans ce brûlot, préparé en vue de son assemblée élective qui aura lieu en avril prochain, Alternatives appelle à une "sécularisation" très avancée de l'Etat marocain. En substance : "La question de la laïcité se pose à nous comme elle s'est posée auparavant à des pays comme la France puis l'Espagne où l'attachement du peuple à la religion, comme c'est le cas chez nous, reste très fort". Au lieu de préconiser une " laïcité qui couvre parfois une consolation négative à l'égard de la religion", Alternatives plaide pour une référence " à la notion de sécularité à l'anglo-saxonne ". Autrement : "on peut très bien continuer à faire référence à l'Islam comme religion d'Etat dans notre constitution, au sens d'un référentiel en termes de valeurs et de culture, et laisser les règles et les normes à la responsabilité d'une autorité religieuse présidée par le Roi, indépendante du pouvoir politique et agissant par exhortation et non par cœrcition". Il est donc clair que "Alternatives opte pour une véritable séparation entre le champ politique et le champ religieux". Une vision que les amis de Driss Benali défendent pour séparer le "religieux du politique par rapport aux règles de fonctionnement de la société". Au niveau institutionnel, ceci implique une révision de la gestion de l'autorité religieuse ; dont "l'indépendance du pouvoir politique nécessite sa refonte organisationnelle". Celle-ci appelle, obligatoirement des mesures inédites : "le gouvernement ne devant pas recouvrir de ministère des affaires religieuses, l'autorité religieuse doit évidemment être restructurée". Plus prosaïquement, on doit faire l'économie du ministère des Habous et des affaires religieuses. En contrepartie, force est de créer une "instance regroupant des représentants des Oulémas sortis des institutions religieuses comme la karawiine et Dar Al Hadith Al Hassania comme elle doit faire appel à des personnalités de culture universaliste au fait des questions religieuses". Le Monarque "pourrait être à la tête de cette autorité religieuse", qui n'aurait, au demeurant, "qu'un pouvoir de prédication et d'exhortation sans jamais ordonner quoi que ce soit". Pour "Attajdid", ce sont là des "thèses périlleuses". Prônées dans un pays musulman "qui est le Maroc, leurs seuls objectifs ne peuvent être que déstabilisation et anarchie dont pâtiront les citoyens et le pays". La question de "laïcisation" ou de sécularisation est certes loin d'être à l'ordre du jour d'un pays dont la spiritualité a été l'essence même de son Etat, ceci n'empêche pas l'organe très proche d'Attajdid ", de voir dans la plate-forme " une revendication, clairement et audacieusement déclarée qui a été apparemment soutenue par des parties étrangères qui ne veulent pas du bien à notre pays ". Ces " égarés laïcs ", pour reprendre les termes d'Attajdid, joueraient le rôle d'un fer de lance d'un projet " déjà mis en œuvre en Tunisie et en Turquie ". Mais, voué à l'échec, il ne saura être un modèle " de société pour le Maroc ". Le pays, très à cheval sur ses constantes religieuses, civilisationnelles et culturelles, " ne cédera pas aux vertiges " de ces appels. Attajdid s'en prend, ensuite, à Abdelali Benamor. Le président fondateur de la même Alternatives a, lui également réitéré les mêmes idées. Ses déclarations "sont très dangereuses", juge le quotidien. Et d'ajouter "il y a lieu de craindre que derrière ces revendications et appels se trouvent des commanditaires et autres parties malveillantes visant le désordre (Fitna) la déstabilisation et l'atteinte à la monarchie, le rempart de toujours contre la déstabilisation, la laïcité et l'occidentalisation". Fait à noter : A part cette virulente réaction d'Attajdid, la plate-forme n'a, sur ce point précis, suscité aucun retentissement. Ni pour ni contre. Est-ce là la preuve que ce débat sur la laïcité et la sécularisation est un vrai-faux débat ?