Elections présidentielles S'éveiller au caractère pervers d'une nouvelle compétition électorale en Algérie relève une fois de plus de Lapalisse. Mais pour les présidentielles d'avril prochain, les débats politiques déletères, le goût du ravage et la vigueur corrosive de l'opposition ainsi que la jubilation imperturbable du cercle Bouteflika a transformé la maison des candidats revanchards en un ring où le cynisme dissimule mal les extraordinaires appétits de pouvoir. De même qu'un horticulteur ne parfume pas ses roses, un homme politique ne se soucie point de scrupules. Néanmoins, dans la course à la présidentielle algérienne, les voltiges des candidats pourtant issus des pouvoirs rampants, les girouettes de personnalités politiques opportunistes et les tentatives désespérées de torpiller à l'international un deuxième mandat pour Abdelaziz Bouteflika choquent l'imaginaire. Toutes les voies ont été empruntées pour exorciser la détresse politique de l'opposition, en réalité une simple et viscérable soif du pouvoir. Le chapiteau “8 avril 2004” crépite de vacheries, de coups adressés en plein cœur de l'historique parti FLN, de trahison à l'image de celle qui a séparé l'ancien chef du gouvernement Ali Benflis du président algérien, et plus fraîchement encore, de l'inattendue volte-face du leader MSP (ex-Hamas), Abou Djera Soltani, chef de file des islamistes modérés reparti grossir le clan de Bouteflika après avoir longuement trempé dans les manœuvres du bloc anti-Bouteflika animé par dix anciens hauts rangs de l'Etat. Même l'administration compétente orchestrée par Yazid Zerhouni, ministre de l'Intérieur et infatigable collaborateur du président sortant a cédé à la facilité du règlement de comptes contre divers acteurs directs ou indirects d'un environnement politique féroce, qui dévoile les enfers intimes et désintègre la tranquillité d'une société prise en otage. Dans cette atmosphère de rivalités quotidiennement relayées par les médias, la population algérienne sourit ou méprise, du fond de sa loge de spectateur dans laquelle les autres générations, aussi méfiantes, surmontaient leurs difficultés sociales et leur impuissance. Au départ, 35 prétendants Bien évidemment, le Maroc pose un regard discret mais attentif sur les événements qui vont se bousculer de l'autre côté de ses frontières orientales. Aussi, faut-il savoir qu'à l'heure où nous mettions sous presse, l'expression des candidatures à la succession de Abdelaziz Bouteflika arrivait à échéance. Le chef de l'Etat sortant confirmait son manifeste pour une seconde investiture, la dernière autorisée par la constitution algérienne. Cette même législation qui autorise n'importe quel citoyen à briguer les fonctions de premier magistrat du pays à condition de recueillir, en préalable à la date butoir de ce lundi 23 février 2004. 75.000 signatures de soutien avec obligation d'en présenter 1.400 noms au moins dans 20 des 48 wilayas du territoire. Ces critères ne pouvaient recueillir beaucoup de candidats anonymes et insolites à la magistrature suprême s'ils n'avaient pas été assortis de l'imposition de la fameuse légalisation notariée de l'ensemble des paraphes conçus et accrédités par le département de l'Intérieur afin de contourner les fraudes et les fausses signatures, cette mesure a finalement tamisé l'ampleur des engagements aux présidentielles du 8 avril prochain. Entre le 10 janvier et le 15 février, pas moins de 35 prétendants échafaudèrent des illusions à la présidentielle. Situation caustique,qui a engendré les commentaires les plus narquois. Mais le droit constitutionnel restant sacré et imperméable, l'échelle des valeurs des profils surprenants surgirent alors dans la course. De vieux chevaux de bataille du pouvoir écartés des affaires, six anciens Premiers ministres en quête de réhabilitation populaire, Mohamed Sifi, Mouloud Hamrouche, Ahmed Benbitour, Ahmed Ghozali, Réda Malek et Ali Benflis. Pour compléter ce labyrinthe, se joignirent le général à la retraite Rachid Benyellès, opposant farouche de Bouteflika, Ahmed Taleb Ibrahimi, toujours débouté dans sa demande d'agrément du parti islamiste Wafa, plus les personnalités politiques endémiques chargées d'entretenir l'opposition du haut de leurs formations respectives, à savoir le fondamentaliste déclaré Abdallah Jaballah, patron d'El Islah, numéro trois de l'Assemblée nationale, l'irascible Dr Saïd Saâdi qui sourit à l'avènement des Aarouches dans la gestion du dossier Kabylie. Et enfin, la première femme postulant à la présidence algérienne, Louisa Hanoune, secrétaire générale et fondatrice du très régulier parti des travailleurs. Dans le registre des anonymes insolites, la société algérienne nota avec un air respectueux mais amusé, l'émergence dans cette compétition de figurants, tel ce commerçant algérois inconnu dans les salons politiques, un chômeur ex-émigré en Suisse, puis un vénérable gardien de la maison de la presse.Des intrépides dont on ne citera pas les noms, tellement ils ont été emportés par la bourrasque après avoir alimenté les boutades populaires. Tout le monde à l'instar des anciennes pièces du décor, finira un jour par rêver de devenir président. Alliances prospectives au profit d'Ouyahya Aujourd'hui, ne subsiste sur la ligne droite menant au palais présidentiel d'El Mouradia que six cartes de visite consistantes. Le duel attendu entre Abdelaziz Bouteflika et Ali Benflis, pour l'histoire son directeur de campagne lors des élections de 1999, son confident et chef de la primature survoleront les velléités politiques de Louisa Hanoune, Sid Ahmed Ghozali, Saïd Saâdi et Abdallah Jaballah, la carte islamiste qui déterminera l'issue du scrutin dans l'éventualité d'un second tour. Depuis que le MSP de Aboudjera Soltani, fidèle à l'école de feu Mahfoud Nahnah ainsi que la centrale syndicale UGTA, première force électorale algérienne avec 3,5 millions d'adhérents se sont ralliés au RND d'Ahmed Ouyahya pour cautionner l'Etat, les pronostics accréditent la thèse de Bouteflika se succédant à lui-même. D'ailleurs, l'allégeance du MSP au cercle présidentiel véhicule les germes d'une gestion s'étalant jusqu'à l'horizon 2014. Selon le contrat scellant cette alliance, la formation politique de Soltani se verra attribuer sept ministères, six postes de walis sur les 48 de la carte administrative et six représentations diplomatiques à l'étranger. Quant à Ahmed Ouyahya, sa fidélité au président Abdelaziz Bouteflika lui vaudra une cooptation pour les présidentielles de 2009. En attendant, franchir l'obstacle Benflis le 8 avril prochain n'équivaut pas à une sinécure. Même si avant de confirmer sa propre candidature dimanche 22 courant, Abdelaziz Bouteflika a anticipé sur la campagne électorale en sillonnant pratiquement toutes les régions du pays, particulièrement le grand Sud, prenant à témoin l'ensemble du peuple algérien sur les réalisations socio-économiques cumulées durant les cinq années de son mandat.Dans le camp adverse, le rapprochement des dix premières personnalités s'étant intéressées au scrutin avait accouché du groupe prénommé “10+1”. Réduit à 10 après le revirement du MSP réconcilié avec le RND et l'entourage du président, cette entité n'en finit pas d'interpeller l'institution militaire algérienne sur sa neutralité proclammée par son chef d'état-major, Mohamed Lamari. Une décision “non partagée par toute la chaîne de commandement” selon Mouloud Hamrouche. “Et qui devront s'accompagner d'une neutralité réelle de l'administration”, enchaîne l'ex-candidat, général à la retraite Rachid Benyellès. Les alliés d'Ali Benflis, par stratégie ou par dépit, maintiennent le débat de fond sur le désengagement de l'armée par rapport à la sphère politique. Cependant, leurs appels en direction de la grande muette pour empêcher Abdelaziz Bouteflika de briguer un second mandat paraissent volatilisés dans les airs. Les “10” que tout sépare idéologiquement s'accordent ainsi de l'esprit putschiste ancré dans le système. Un quotidien à grand tirage précise même que “si le clan présidentiel a usé et abusé des moyens de l'Etat pour inculquer Bouteflika dans les subconscients, les “10” ne proposent pas mieux que d'appeler au putsch, une autre manière vile d'abuser de l'Etat”. Comme les sorcières de Middle way Pour convaincre les décideurs de l'armée, la coalition anti-Bouteflika a rédigé un mémorandum pour l'armée, les deux chambres parlementaires et l'ONU. Ce document de six pages retient “les violations en série des principes constitutionnels” ainsi que “les prémices d'une compétition déloyale annoncée”. Véritable pamphlet à l'égard du président, ce texte confine l'opposition organisée dans des positions anti-fraude et anti-Bouteflika qui exhume la grande faillite d'idées. Au chapitre des projets de société, de la prospection et des alternatives aux appréhensions des 20 % de chômeurs que compte la population algérienne, les candidats du groupe des “10” ne s'illustrent guère. Pour l'heure et en attendant la campagne électorale qui démarrera fin février, le seul enjeu du scrutin réside dans une fixation sur la personne du chef de l'Etat candidat. En remontant ces séquences, on replonge dans le livre de fiction de Paule Constant “Confidence pour Confidence”, véritable ballade entre les sorcières de Middle way qui s'affrontent pour exorciser leur détresse sentimentale. A la différence que dans les péripéties pré-électorales des présidentielles d'Algérie, la détresse est politique. Le nœud secret de l'histoire n'éclatera pas de sitôt au grand jour. Envenimés par les rivalités des candidats, voire par leurs jalousies épidémiques, les préliminaires du scrutin du 8 avril présagent que pour les Algériens, demain ne sera pas forcément différent des autres jours. Surtout qu'avec la carte de boycott brandie par les Aarouches en Kabylie, les conditions d'un plébiscite pour l'un ou l'autre des favoris ne sont pas réunies. IDE en Algérie : 2,3 milliards de $ en 2003 Notre correspondant à Alger, Fayçal Haffaf, indique que parmi les hôtes africains des flux d'investissements étrangers, l'Algérie remonte aux premières loges, derrière l'Afrique du Sud et l'Egypte. 2,3 milliards de $ y ont été débloqués pour des projets hors hydrocarbures, d'où la nouveauté de la tendance. En dépit des réserves de la compagnie française d'assurances-crédits (COFACE) qui maintient son appréciation du risque Algérie au niveau B, c'est-à-dire “spéculatif et caractérisé par un environnement économique et politique incertain”, le volume des IDE a rebondi durant l'exercice écoulé grâce notamment à des projets majeurs : un joint-venture Black and Vealth Africa (USA) – Algerian energy company pour la réalisation d'une unité de dessalement de l'eau de mer à Arzew, site pétrochimique d'Oran, une usine qui combinerait le gaz naturel et l'électricité. Montant de l'ouvrage : 450 millions de $. L'octroi de la troisième licence GSM au groupe koweïtien Al Watanya sur la base de 1,9 milliard de $ d'apports en achat et investissement, ainsi que l'implantation en Algérie du numéro 2 mondial du ciment, le Suisse “OLCIM” et d'Orascom Egypte pour une autre unité de ciment participent à cette performance avec une enveloppe de 380 millions de $. Enfin, Henkel, le spécialiste allemand des produits de consommation, a tenté une pénétration du marché algérien avec des expériences engageant 132 millions de $.