Dès le mois d'avril 2007, la France va connaître plusieurs scrutins décisifs pour l'avenir des relations franco-marocaines dans la mesure où leurs résultats pourraient entraîner d'importants changements dans l'attitude de Paris. Le Maroc a tout intérêt à surveiller de près le déroulement et le résultat des élections présidentielles et législatives en France car celles-ci pourraient se traduire par un changement de l'attitude française à son égard, contrastant avec le soutien du président Jacques Chirac à Rabat, notamment dans le dossier du Sahara. De fait, Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy semblent partager une sorte de «consensus mou» concernant les grandes options politico-stratégiques de la France, avec une certaine continuité de la diplomatie française et de ce que l'on appelle «la politique arabe de la France». Les deux challengers principaux de l'élection présidentielle ne peuvent toutefois se désintéresser totalement de la politique étrangère en général et du Maroc en particulier. Selon certaines statistiques, il y aurait en France près de 1, 2 million de Franco-marocains dont la moitié seraient inscrits sur les listes électorales. Le scrutin de 2007 sera le premier scrutin présidentiel où le «vote arabe» ou le «vote des banlieues» jouera un rôle important. Ce sera la première fois où s'exprimera massivement la «deuxième génération», les enfants issus de l'immigration, nés en France et qui entendent y rester. La mobilisation en faveur de l'inscription sur les listes électorales, s'est doublée de l'ouverture d'un débat sur la meilleure représentativité, dans les institutions et les partis politiques, des «minorités dites visibles». Beaucoup considèrent que ces générations issues de l'immigration voteront majoritairement en faveur de la gauche. Toutefois, il faut tenir compte de l'existence d'une certaine «bourgoisie» qui pourrait apporter son soutien massif à Nicolas Sarkozy pour marquer sa désapprobation de l'échec radical de la gauche en matière d'intégration alors qu'elle était au pouvoir. Des élus, fortement intégrés dans la société locale, revendiquent haut et fort leur marocanité. Pour eux, «Les identités ne s'opposent pas, elles se renforcent» même si Rachida Dati, porte-parole de Nicolas Sarkozy, refuse tout contact avec le pays de son père. Pourtant, «un tiers des militants de l'UMP sont issus de l'immigration, surtout parmi les nouveaux adhérents». Que peut attendre le Maroc des prochaines élections présidentielles et législatives ? S'agissant des deux principaux candidats, Nicolas Sarkozy et Ségolène Royal, il ne fait aucun doute que l'élection de l'un ou de l'autre aura d'importantes conséquences sur les relations franco-marocaines. Certes, pour la première fois depuis 1981 le/la futur(e) président(e) de la République n'aura pas un fort lien, quasi-naturel, d'empathie avec le Maroc ou d'amitié instinctive pour celui-ci comme cela était le cas, pour des raisons différentes, de François Mitterrand et de Jacques Chirac. Avec Ségolène Royal, cette dimension passionnelle, personnelle, disparaîtra probablement. Cela sera moins le cas avec Nicolas Sarkozy. Certains de ses proches, un Jean Reno par exemple, ont conservé de forts liens sentimentaux avec leur pays natal. Si elle était élue présidente de la République, Ségolène Royal pourrait être à l'origine d'un relâchement des liens entre Paris et Rabat et se montrera encline à privilégier l'axe Paris-Alger, ce qui serait préjudiciable aux intérêts du Maroc. Nicolas Sarkozy, même s'il n'aura jamais avec le Maroc la proximité d'un Jacques Chirac, aura une attitude plus positive. Il voit dans le Maroc un allié potentiel, infiniment plus fiable que l'Algérie, dans la lutte contre le fondamentalisme religieux et il a pu mesurer, lors de son passage au ministère de l'Intérieur, la part active prise par le Maroc dans la prévention de l'immigration clandestine en provenance d'Afrique sub-saharienne. Cela l'amènera naturellement , si ce n'est à renforcer, du moins à maintenir, dans l'intérêt commun des deux pays, les relations privilégiées entre la France et le Maroc et à défendre la position marocaine sur le Sahara.