Maroc/U.E En plus des contraintes habituelles auxquelles se heurte le textile, le risque d'un amenuisement des avantages acquis par le Maroc auprès de l'UE plane sur le secteur. L'élimination, en janvier 2005, des quotas sur les importations des produits du textile “secoue” la Commission européenne. Elle vient de communiquer son programme visant à renforcer la compétitivité du secteur, protégé durant une quarantaine d'années de l'invasion incontrôlée des produits concurrents provenant essentiellement de la Chine et des pays du Sud-Est asiatique. Le Maroc, quant à lui, figure sur la liste des pays partenaires dont il faut tenir compte lors de l'élaboration de la stratégie communautaire. C'est Pascal Lamy, Commissaire européen en charge du commerce international qui y a fait référence lors de la réunion tenue dernièrement à Bruxelles. Tout en soulignant l'importance de cette industrie pour l'économie européenne, il a mis l'accent sur sa valeur pour les pays en voie de développement. “Nous devons nous assurer que les nouvelles conditions de commerce du textile bénéficient à tous les pays pauvres, et en particulier au plus pauvres et vulnérables d'entre eux. Nous allons également continuer à renforcer les liens avec nos voisins de la zone méditerranéenne”, a-t-il lancé. Si l'annonce a été bien accueillie dans son ensemble par l'Amith (Association marocaine des industries du textile et de l'habillement), le risque d'une érosion de la zone de préférence et de l'amenuisement des avantages acquis par le Maroc n'est pas à omettre. “La volonté de l'UE d'aller vers un démantèlement des droits de douane nous sera favorable si le Maroc, la Tunisie et la Turquie étaient intégrés dans le label européen”, explique Salaheddine Mezouar, président de l'Amith. Concrètement, l'érosion de la zone de préférence signifie que tous les pays pourraient accéder au marché européen sans payer de droits de douane accusant ainsi des pertes insupportables pour le Maroc. “L'unique issue pour les pays de la zone euro-méditerranéenne consiste à adopter une logique de développement durable à travers la création d'une région intégrée qui base sa stratégie sur la différenciation, la créativité et l'innovation”, assure le président de l'Amith. Cette logique d'association régionale est fortement encouragée par la partie européenne qui y voit une locomotive pour réussir l'intégration avec les pays du Nord. “Il ne s'agit pas d'une segmentation comme ont tendance à l'interpréter certains, mais d'une fortification des économies émergentes. Et cela ne peut que leur être bénéfique dans le cadre de leurs négociations avec l'UE”, assure une source au sein de la Commission européenne à Rabat. A son niveau, notre pays est confronté à une donne globale matérialisée d'abord par la suppression des quotas et ensuite par la baisse progressive et générale des droits de douane. Sur les dix années à venir, il sera contraint d'opérer au sein d'un marché globalisé où la libre concurrence est le maître du jeu. “A ce stade, il est important de ne plus raisonner en tenant compte de notre modèle industriel actuel. Nous devons ainsi abandonner la façon et nous consacrer à la co-traitance et la fabrication de produits finis”, commente S.Mezouar. A ce sujet, le témoignage de la Commission européenne est en sa faveur. Elle atteste que le Maroc a compris depuis longtemps que le développement de son industrie du textile passe par son assainissement et sa mise à niveau et non par sa protection. Si l'Amith tente de bannir ce terme de son langage, il n'en demeure pas moins qu'elle réclame des mesures de soutien à son égard, à l'instar des entreprises européennes. “Nous continuons à compter sur les pouvoirs publics pour nous apporter leur soutien ou du moins nous aider à trouver des ressources auprès des organismes internationaux avec lesquels le Maroc a signé des accords”, lance S. Mezouar. A souligner qu'une demande de soutien pour accompagner les efforts de créativité et d'innovation fut formulée auprès de Pascal Lamy en marge de la réunion sur le textile, tenue au mois de mai à Bruxelles.