Les sceptiques et Hassan Khattab Les voilà qui reviennent. Même argument, mêmes obsessions. Les familles des victimes des attentats qui ont frappé Casablanca de plein fouet viennent d'enterrer leurs chers. D'autres attendent, n'en déplaise à Dieu. La plaie est encore saignante, douloureuse. Le mal torture encore l'esprit. Eux, les sceptiques aguerris, les esprits qui nient tout, sauf leur médiocrité, déterrent les mêmes arguties. Sans aucun respect pour les innocents que le terrorisme a fauchés ce vendredi noir, sans retenue, ni recueillement. Ils brandissent la même phobie sécuritaire, le même raisonnement creux. Sur les sécuritaires, sur l'Etat, sur la politique. Ils nous mettent en garde contre la tentation de la main de fer…, un alarmisme qui balaie d'un revers de la main les morts, les blessés, le traumatisme, les pleurs, mais qui n'hésite pas à chercher des excuses pour les bourreaux. Les victimiser ! Ce ne sont, entend-on dire, que des pauvres hères, des laissés-pour-compte que la modernité a oubliés, des loques humaines que l'élite a trahies. Simple variante locale de la misère humaine. Ne les chargez donc pas, ne chassez surtout pas leurs acolytes, leurs semblables. Cette pseudo lucidité est un affront. Une injure qui en dédouanant les terroristes, leurs escadrons idéologiques de la mort, culpabilise les victimes. Pour en fin de compte, lier les mains de l'Etat. Beau raisonnement qui fait d'une mélancolie bohémienne aussi perverse que dangereuse une raison politique. A y voir de près, l'anarchie sied mieux à la démocratie. Combien de morts faut-il pour faire une démocratie et un sot ? Peu importe, il n'y a de bons démocrates que morts. Un bon moderniste est un moderniste mort. L'Etat ne serait démocratique donc à l'image de ce que veulent ces esprits-là que s'il tremble, s'atterre et rampe. Peu importe que plus de quarante victimes sont tombées, le problème c'est de mourir sans l'aide de ses “médecins imaginaires” qui semblent apporter la panacée pour la démocratie. Trépasser, c'est bien, mais avec l'Etat en spectateur, c'est encore mieux. Voilà le résultat : une démocratie-cimetière, un grand cimetière où les électeurs s'abstiennent en masse. Quel cynisme ! Joindre le boycott très cher à tous les ultras – à la mort – purificatrice pour les assassins ! Le paradis, la république vertueuse de Platon ! Il y a une certaine presse qu'il faut lire : “comme on aime le bandeau sur les yeux”. Marcel Proust, l'auteur de “A la recherche du temps perdu” ne croyait pas si bien dire. Aveuglément, donc. Car les vérités sont incontestables pour la simple raison que ce sont des imposteurs qui se sont chargés de s'y exprimer. Le cas par exemple de ce sieur Hassan Al Khattab, alias Abou Oussama. Vous ne connaissez pas ? N'essayez pas de l'inventer. Vous serez horrifiés d'apprendre ce qui lui passe par la tête. Commentant les attentats de Casablanca, pour “Assahifa” de cette semaine, il n'a pas sourcillé : “le but de ces attentats est de porter atteinte aux intérêts du Parti de la justice et du développement”. Quelle horreur ! “On vise, ajoute-t-il, à faire peur aux gens pour que le PJD ne réalise pas des résultats positifs escomptés”. Le barbu Khattab se proclame anti-élections, il ne s'en évertue pas moins à donner son avis sur les urnes. Pour ce faire, il fait un effort. Horrible, un cas d'école sur la raison perverse et les idées macabres qui pullulent dans sa tête. Il n'a pu s'élever qu'à des idées… basses. Rompu du monde, qu'il est, il n'a trouvé que cette explication d'un autre temps. Homme des grottes, sa voix caverneuse (au sens propre du terme) claironne pour nous remettre dans l'esprit un fallacieux argument qu'on croyait inhumé sous les décombres des dernières explosions. L'homme, par contre, est droit sur ses chevaux, pour défendre perfidement, pernicieusement une pathologie sanguinaire. Dessein électoral : voilà le vice, de fond et de forme, qui ne cesse de revenir. Immanquablement. Lui, le salafi jihadi, le change en pis : une machination. Entendez par là ce que Chamfort appelait : “le sarcasme de la gaieté avec l'indulgence du mépris” ! Décidément, Hassan Khattab et ses semblables n'ont pas réussi à tuer eux-mêmes ceux qui ont péri sous les bombes de leurs idoles, alors ils s'en vengent en médisant. Honteusement, ignoblement. Ils ne sont pas que complices, car il affiche leur “estime intellectuelle” à peine voilée pour les bourreaux, mais sont aussi dangereux car ils affichent avec autant de sournoiserie, leur mépris pour les victimes. Un caractère que les sceptiques passent sous silence. Assourdissant, à l'instar des déflagrations du vendredi noir.