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L'université comme enjeu politique majeur
Publié dans La Gazette du Maroc le 03 - 02 - 2003


L'histoire de la confrontation
Il y a trente ans, le 24 janvier 1973, l'UNEM allait être interdite par les autorités au terme d'un long conflit ayant opposé les étudiants progressistes au pouvoir. Les contradictions ayant atteint leur paroxysme, cette organisation ne s'est pas relevée depuis et l'espace universitaire continue à servir de terrain pour les luttes politiques qui ont pris d'autres dimensions.
Ayant considéré les étudiants comme une force d'avant-garde, les forces politiques de l'ancienne opposition ont tout fait pour maîtriser l'espace universitaire. Cet espace était le seul habilité à assimiler les thèses de ces partis politiques et de par sa dynamique, il était en interaction permanente avec les événements nationaux et internationaux. Par conséquent, l'université était le lieu idéal pour conjuguer sur le terrain les contradictions politiques, puisqu'elle est avant tout un espace où se reproduisent les contradictions sociales.
Les étapes de la lutte
A partir de ce constat, on peut dire que l'histoire de la lutte politique depuis l'indépendance est indissociable de la lutte dans l'espace universitaire. Cette histoire se caractérise par trois étapes essentielles.
La première étape a débuté lors de la tenue du sixième congrès de l'Union nationale des étudiants du Maroc où se sont exacerbées les contradictions entre les forces réformistes réunies autour de l'UNFP et les forces conservatrices alliées au pouvoir.
La deuxième étape a commencé avec le treizième congrès de l'UNEM qui a vu naître des contradictions politiques entre la nouvelle gauche et les forces réformistes.
La troisième étape a débuté en 1990 avec la confrontation entre les forces laïques et les islamistes.
Dans une tentative visant à récupérer l'espace estudiantin, les militants de l'OADP ont élaboré une plate-forme qu'ils ont soumise aux autres composantes en 1989 dans la perspective d'une restructuration par le haut de l'UNEM. Ce document préconisait la mise en place d'une direction provisoire composée des mouvements estudiantins historiques, de quelques membres de l'ancien comité exécutif qui devait être soutenue par les anciens présidents et par les partis démocratiques. Cette direction devait, selon ce document, préparer les conditions nécessaires à la tenue d'un congrès extraordinaire qui débouchera sur la restructuration définitive de l'UNEM. Le document a même proposé la création d'un journal, porte-parole de l'organisation, dont la direction devait être assumée par le comité provisoire.
Mais les étudiants de la mouvance bassiste (Kayïdiyne) ont opté, pour leur part, pour une restructuration à la base, notamment par la mise sur pied de comités des facultés qui devaient mener la lutte et représenter les étudiants dans les négociations avec les responsables. Ces comités devaient par la suite se transformer en comités universitaires transitoires.
Dans cette quête de restructuration, et pour mieux contrôler l'espace universitaire et barrer la route aux étudiants islamistes, cinq mouvements estudiantins historiques ont pris l'initiative en 1991 de réunir un certain nombre de comités provisoires à Fès pour créer un comité national provisoire chargé de préparer un congrès extraordinaire. Mais cette réunion a échoué pour deux raisons. Il y avait d'abord une recrudescence des conflits entre les différentes composantes et ensuite une tentative désespérée d'exclure la mouvance islamiste. Après l'échec de cette initiative, les mêmes promoteurs devaient tenter de se réunir en 1994 pour entamer un processus de dialogue. Mais ils n'ont pas retenu les leçons précédentes et commis l'erreur de vouloir exclure les islamistes au nom de la légitimité historique. Et encore une fois, le dialogue a buté sur les contradictions internes et débouché sur l'échec. Cependant, les étudiants ittihadis ont vite assimilé les causes des échecs répétitifs et lors de leur quatrième congrès tenu à Kénitra en 1995, ils ont abandonné l'idée du dialogue entre les composantes historiques pour avancer l'idée d'un dialogue estudiantin large. Toutefois, cet appel s'est avéré tardif, puisque, entre-temps, l'espace universitaire a vu la naissance du mouvement des étudiants d'Al Adl Wal Ihsane en mars 1991, et en avril 1992 du mouvement des étudiants d'Attajdid, devenu par la suite mouvement Al Wahda wa Attawasûl, et en 1993 du mouvement des étudiants d'Al Mithaq.
Les étudiants d'Al Adl Wal Ihsane ont réussi à s'implanter avec force dans l'espace universitaire, notamment en optant pour une restructuration à la base. Leur action s'est basée sur les recommandations du 16ème congrès de l'UNEM, notamment en ce qui concerne la création des corporatives qui devaient superviser les élections des comités de classe et des comités des étudiants. Cette forte implantation a soulevé pour la première fois au Maroc la problématique du référentiel. Or, toute l'histoire du mouvement étudiant marocain était encadrée par l'idéologie de la gauche. De 1959 et jusqu'en 1968, la gauche traditionnelle, notamment l'UNFP et les communistes ( PLS), a de tout temps imposé ses orientations et aucune autre mouvance ne pouvait se considérer membre de l'UNEM. D'ailleurs, c'est pour cette raison que les étudiants du parti de l'Istiqlal ont créé leur propre organisation appelée Union générale des étudiants du Maroc (UGEM) en 1962. Mais, à partir de 1969, l'UNEM est tombée sous la coupole des étudiants de la nouvelle gauche, notamment le front des étudiants progressistes qui appartenaient à la mouvance marxiste-léniniste. Après cet épisode, ce sont les Kayïdiyne (bassistes) qui devaient occuper les devants de la scène.
Mais malgré les contradictions internes, les mouvances de la gauche ont tenu à agir dans le cadre du référentiel basé sur quatre principes : progressisme, caractère de masse, démocratie et indépendance.
Cette unicité du référentiel, qui a prévalu depuis 1959, a dans une grande mesure déterminé la nature des contradictions qui demeuraient secondaires pour un bon bout de temps. La contradiction principale se situait au niveau de l'opposition au Makhzen et a contribué à cimenter les rangs estudiantins pour éviter les assauts du pouvoir, notamment avec l'interdiction de l'UNEM le 24 janvier 1973 ou après l'échec du 17ème congrès en 1981.
Les groupes estudiantins ont résisté à cette multitude d'échecs, et paradoxalement, ce sont les étudiants d'Al Adl Wal Ihsane qui devaient se montrer plus actifs à partir du début des années quatre-vingt dix. Ce groupe a élargi sa présence au sein de l'université et commencé à agir dans le cadre et au nom de l'UNEM, en tant qu'organisation islamisée. Mais cette nouvelle situation allait provoquer des confrontations entre la gauche et les islamistes qui ont atteint leur paroxysme le 13 mars 1996, lorsque la direction de l'USFP voulait organiser une université de printemps à la faculté de droit de Casablanca. C'est alors, qu'au nom de l'indépendance de l'université, les étudiants d'Al Adl Wal Ihsane ont interdit l'accès aux Ittihadis. Cet événement a ouvert la voie à une véritable guerre de référentiels et incité les pouvoirs publics à envoyer des signaux à l'adresse des partis politiques. Ces signaux ou messages voulaient signifier que l'intégrisme constitue un danger non seulement pour le pouvoir, mais aussi pour toute la classe politique. Les formations politiques traditionnelles ont compris qu'elles avaient perdu leur bastion et qu'elles devaient contracter des alliances avec le pouvoir. C'est à partir de là que le processus du consensus politique a débuté.
A la recherche d'un ennemi commun
Pour faciliter le consensus entre le pouvoir et les partis de l'ex-opposition, il fallait définir un ennemi commun. Cet ennemi est vite trouvé dans la mouvance islamiste. En effet, après les événements du 13 mars 1996, les autorités ont poussé les partis de la Koutla à considérer l'alliance avec le pouvoir comme tout à fait naturelle. Cette alliance devait avoir pour objectif principal de contrer l'ennemi commun. Et c'est pourquoi on comprend aisément l'adhésion des partis de la Koutla au projet de la constitution de 1996. En effet, ces partis n'ont pas voté pour le contenu de la constitution, mais pour le processus global qui sous-tend sa révision.
Les partis politiques ont tenu, à cette occasion, plusieurs réunions de leurs instances dirigeantes pour s'exprimer au sujet du projet de constitution. A cet effet, le comité central de l'OADP s'est réuni entre le 31 août et le 1er septembre pour débattre de cette question. Or, au moment où le courant de Bensaïd appelait à prendre les distances vis-à-vis d'un projet qui n'a apporté aucune nouveauté, un autre courant appelait en revanche à le soutenir. Ce dernier courant devait par la suite faire scission et créer le parti socialiste démocratique (PSD) pour renforcer les institutions de l'Etat et le champ politique appelé à combattre l'intégrisme. C'est ainsi que les partis ont soutenu le projet de constitution et comme l'intégrisme s'était implanté au sein de l'université, c'était donc dans cet espace que la lutte devait être menée. C'est dans ce contexte que fut élaborée la circulaire tripartite du 20 février 1997. Cette circulaire visait à imposer le déroulement normal de l'activité au sein de l'université et à éviter les dérapages. Mais l'analyse de son contenu fait ressortir trois remarques.
• Au niveau de la cible, il apparaissait clairement que les étudiants d'Al Adl Wal Ihsane étaient les premiers visés.
• Au niveau du langage, cette circulaire a utilisé la terminologie de gauche notamment en parlant de “courant obscurantiste ”.
• Au niveau de l'organisation de l'espace, la circulaire a donné pleins pouvoirs à l'Administration pour encadrer les étudiants. Par conséquent, c'est la restructuration de l'UNEM qui est mise en cause.
Cette mobilisation contre cet ennemi commun allait susciter une réaction de la part d'Abdeslam Yassine qui a traité de cette situation dans deux ouvrages, notamment “dialogue entre le passé et l'avenir” et “dialogue avec un ami amazigh ”.
Confrontation avec les Islamistes
Au moment de sa constitution, le gouvernement de l'alternance consensuelle s'est vu conditionné par le contenu de la circulaire tripartite. Dans ce contexte, les autorités universitaires ont tenu à appliquer les dispositions de ladite circulaire malgré l'opposition farouche des étudiants d'Al Adl Wal Ihsane qui ont continué à restructurer l'organisation estudiantine. Ainsi, ce groupe a organisé les 25, 26 et 27 juillet 1998, son dixième congrès couronné par une déclaration qui souligne que la situation politique et sociale au Maroc nécessite plus de clarification pour atteindre la justice et la dignité. Pour ce faire, la déclaration préconise de prendre les mesures suivantes :
• Lever l'embargo sur le mouvement islamiste, sur ses symboles et ses actions éducatives, politiques et syndicales notamment à travers la levée de l'assignation à résidence qui frappe Abdeslam Yassine tout en garantissant à tous la liberté d'expression et d'organisation sans aucune forme de tutelle.
• Libérer tous les détenus politiques, surtout les détenus islamistes dont les détenus du groupe des 12 et autoriser le retour des exilés.
• Suspendre la campagne d'enlèvements et de séquestrations des militants et étudiants d'Al Adl Wal Ihsane et autoriser l'UNEM à reprendre son action en toute liberté.
Ce congrès a présenté, en outre, un certain nombre de recommandations dont notamment la nécessité de créer un front national de protection de l'université, la poursuite de la restructuration de l'UNEM à travers la mise en place d'une commission préparatoire.
Cette commission devait effectivement se réunir à El Jadida en date du 18 septembre1998 et a élaboré un plan d'action qui consistait à mettre en place un comité national de coordination chargé de superviser la restructuration de l'organisation estudiantine, tout en évaluant la situation matérielle dans chaque université.
A cet effet, la commission a adressé un mémorandum au Premier ministre et au ministre de l'enseignement supérieur les appelant à réhabiliter l'université et a invité les anciens membres du bureau exécutif de contribuer à ressusciter l'UNEM. Bien entendu, ce mémorandum revendiquait l'amélioration de la situation matérielle des étudiants, la suppression de la circulaire tripartite, la démilitarisation de l'espace universitaire en renvoyant les vigiles, la libération des étudiants emprisonnés, la restitution des locaux de l'UNEM et l'ouverture d'un dialogue franc et responsable avec les représentants de l'organisation estudiantine.
Le 23 février 1999, ce processus allait aboutir à la création du comité national de coordination qui a élu Hassan Bennajeh secrétaire général.
Mais, au vu de l'évolution de la situation, le gouvernement de l'alternance consensuelle a commencé à appliquer les dispositions de la circulaire tripartite du 20 février 1997. La première décision prise à cet effet fut l'élaboration d'un arrêté ministériel en date du 8 novembre 1998 qui ordonne aux recteurs et doyens d'interdire toute manifestation ou activité organisées par quelque association politique ou culturelle que ce soit au sein de l'espace universitaire à moins d'une autorisation dûment délivrée par les autorités locales. Le même ministre devait récidiver en mars 1999 pour rappeler que les dispositions prises ne sont pas appliquées comme il se doit et invité les responsables à plus de fermeté et de vigilance. Mais il faut rappeler également qu'en date du 23 février 1999, le ministre de l'Intérieur, Driss Basri, a lancé un ordre d'interdire toute activité politique ou associative dans les édifices publics. Paradoxalement, cet ordre a été émis le jour même de l'organisation à Rabat de la sixième rencontre estudiantine d'Al Adl Wal Ihsane qui devait créer le comité national de coordination. Cet ordre du ministre de l'Intérieur était venu élargir le spectre des interdictions prévues par la circulaire et l'arrêté ministériel puisque les autorités se sont rendu compte que les islamistes s'activent au-delà de l'espace universitaire, notamment à travers la multitude d'associations culturelles et sportives.


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