Dans une interview exclusive accordée à notre confrère Challenge hebdo et devant paraître ce samedi 29 novembre, Salaheddine Mezouar, ministre de l'Economie et des finances, aborde les principaux thèmes d'actualité. C'est sans aucun détour qu'il aborde la question de la Bourse de Casablanca. L'utilisation que l'on dit excessive de l'article 51 de la Constitution, le rejet de la taxe sur l'alcool, la baisse des cours du pétrole, le refus de revoir à la hausse le prix du logement social, ce sont là autant de sujet que le ministre de l'Economie et des Finances aborde sans langue de bois. Il donne également son avis sur l'usage que l'on peut faire des rapports de la Cour des comptes. Les derniers évènements survenus sur la bourse de Casablanca ont naturellement retenu l'attention du ministre des finances. Salaheddine Mezouar affirme «qu'il faut faire une distinction entre le sensationnel et le réel». Néanmoins, même en essayant de coller uniquement au réel, on retombe vite dans le sensationnel, tant la question a été traitée avec désinvolture par les membres du directoire de la Bourse. Ils le savaient, ils ont même été avertis par le CDVM, mais ils n'ont pas levé le petit doigt pour parer à la fameuse faille informatique, objet de la vaste polémique. Selon Salaheddine, la place de Casablanca s'est mise au niveau des bourses européennes en matière de système d'information avec le logiciel V900. Cependant, s'il est possible qu'une erreur soit commise, il était inadmissible qu'elle ne soit pas corrigée. Et là, le ministre fait une révélation à laquelle on ne s'attendait pas. Le directoire de la bourse des valeurs de Casablanca a été rappelé à l'ordre à «cinq reprises par le Conseil déontologique des valeurs mobilières (CDVM), mais rien n'y fait. Le directoire de la bourse n'a pas réagi, jusqu'au fameux 15 septembre 2008, date à partir de laquelle les informations confidentielles commenceront à tomber entre les mains des clients de Boursomaroc, le diffuseur. Responsabilité collective Le ministre insiste néanmoins sur le fait qu'il s'agit surtout d'un problème de communication entre les membres du directoire et donc c'est une responsabilité collective plutôt qu'individuelle. Pour le moment, la recommandation du CDVM est suivie par le conseil de surveillance qui a entériné la décision de remplacer tous les membres du directoire. Ce n'est donc qu'une question de jours pour que le directoire cède la place à des membres provisoires. Adoption de la loi de finances oblige, l'éternel problème évoqué par les représentants du Parlement, en l'occurrence l'utilisation de l'article 51 de la constitution qui autorise le ministre des Finances à faire passer une disposition même si les deux chambres s'y opposent. Cette année, le ministre des Finances a brandi au moins 25 fois l'article 51. Cela a été le cas notamment pour l'augmentation de la taxe sur l'alcool. Mais pour sa défense, Salaheddine Mezouar affirme que beaucoup de propositions faites allaient dans le sens de l'aggravation du déficit par une réduction des recettes ou une augmentation des dépenses. Par exemple, pour la TVA, il a notamment affirmé que les communes sont bien contentes de voir leurs recettes progresser et planifier ainsi d'importants investissements. Alors, il voit mal pourquoi les députés demandent une réduction du taux de TVA pour certains produits. Surtout que cela fausse la neutralité de cet impôt si elles favorisent certains acteurs ou certains produits. Pour ce qui est de l'alcool également, il a fait remarquer que la proposition visait à décupler la taxe. Une telle mesure aurait poussé au développement de réseau parallèle. Sans évoquer la prohibition au début du siècle dernier aux Etats-Unis qui a fait la fortune de bandits comme Al Capone, il signale qu'une telle mesure aurait juste fait développer des réseaux parallèles. ■