Driss Hanni, Baba Hammou “Le Maroc est un pays chiite”. Il fallait que l'homme apprenne à se taire, aurait dit Marguerite Duras. Mais il paraît que c'est là une chose très douloureuse pour le “Hojjat Al Islam” bien de chez nous, Driss Hanni. Comme son patronyme l'indique, seigneur Driss a l'esprit tranquille et résolu. Serein, il l'est, et même trop. Car pour l'autorité chiite qu'il est, le chiisme est la règle. L'exception, c'est la Sounna. 80 % des Marocaines et Marocains seraient des adeptes de Qom à leur insu. Les 20 % restants ce n'est que… culture. Et s'il n'ya pas de femmes en tchador et d'hommes en turbans c'est que “le chiisme est encore en expansion”. L'interview accordée à Al Watan Al Arabi du vendredi 20 courant, aurait été une interview ratée. Il aurait fallu pour ce faire laisser le lecteur marocain intact. C'est-à-dire, indifférent. Tel n'a pas été le cas. Pour moi, en tout cas. Chiite moi ? Et sans le savoir ? Arrête ! Ce n'est pas une bêtise, c'est une faute. Ce qui l'aggrave, en plus, c'est que tout indique que Driss Hanni est sérieux. La réalité, toute sunnite et malékite qu'elle soit, le prend en défaut. Mais, lui est résolu, très résolu. Et ce sentiment a, il faut l'avouer, un fond inconnu. C'est peu de dire que Driss Hanni s'invente un Maroc propre à lui et s'échine à en convaincre les Marocains. Il s'invente un Maroc sans… Marocains. Il y aurait sûrement des tchadors, des pasdarans, des Khamenaï et autres Nateq Nouri… mais sûrement pas des Marocains. Car il n'est bon que tous les Marocains (excusez les répétitions, c'est voulu pour convaincre!) lisent ce qu'il dit en fin de son interview pas du tout manquée, faut-il le rappeler : “nous pensons canaliser et théoriser ce chiisme pour que tout se fonde dans un parti politique”. Driss Hanni n'éclaire pas le lecteur sur la nature de son futur parti. Serait-il de tendance Khatemi ou au contraire, serait-il conservateur ? Mais parti il y aura. C'est conséquent, c'est décidé. La vraie confession, la confession enfin éclaircie, la seule réellement vécue, c'est le chiisme. N'en déplaise à tous ces Marocains, jurisconsuls et docteurs en foi. La preuve ? Cherchez-là dans le ciel. Non pas le ciel-ciel, mais le bleu qui a fait rêver tous les vagabonds célestes communément appelés poètes : “l'arc-en-ciel, nous édifie. Driss est pour les Marocains le substitut symbolique de la ceinture de Lalla Fatima Zahra”. Savourez le style, l'imagination. Puisque imagination et confession il y a, il serait vraiment pénible le cas échéant de ne pas se rappeler ce que Rousseau disait il y a belle lurette : “ne voyant rien d'existant qui fut digne de mon délire, je le nourris dans un monde idéal que mon imagination créatrice eut bientôt peuplé d'êtres selon mon cœur”. Bientôt ? c'est déjà fait, par le soin de notre Hoja. Imaginez un peu le spectacle : Mouna Fettou en tchador, Driss Jettou habillé en Rafsanjani et Ahmed Taoufik à …Qom. Délirant ? Pas du tout. Surtout ne cherchez pas à comprendre pour croire. Soyez chiite, après on verra. Sinon ? Sinon… vous serez une minorité que l'Imam excommuniera sans coup férir. De toute manière, avec l'approximation qui pèse sur notre actualité c'est normal que Driss Hani n'en fait qu'à sa barbe. C'est peut-être même souhaitable ne serait-ce que pour amuser la galerie. D'ailleurs on n'en est pas à une bêtise près cette semaine. Un certain Moussa Ben Baba Hammou, a fait d'énormes efforts et s'est déplacé pour visiter les locaux de l'hebdo arabophone Al Ousboue pour réaffirmer que les “Sahraouis sont les descendants d'un ancêtre israélien”. Cet étudiant à l'université Mohammed V aurait même adressé une lettre à Ariel Sharon pour, semble-t-il, lui faire part de ses origines. Délirant, encore ? Non, c'est que la bêtise a parfois l'allure d'une science anthropologique, une maladie convulsive du savoir dont le patient ne peut être guéri que par la dérision. Fin mot de l'histoire : la bêtise n'est jamais simple, elle consiste à avoir beaucoup d'idées… des idées b…