L'heure est à la refonte institutionnelle devant consacrer la séparation des pouvoirs dont le chantier le plus décisif se traduit par une réforme globale de la justice et du système judiciaire marocain dont le Souverain vient d'en annoncer le calendrier imminent. En effet, le Message Royal à l'occasion du colloque international sur l'avenir de la justice au XXIème siècle organisé, la semaine dernière, dans le cadre du cinquantenaire de la Cour Suprême est ferme et sans équivoque: «Nous entendons engager une réforme profonde et globale du secteur de la justice, réforme dont Nous annoncerons, à brève échéance, les grandes lignes». Mieux encore, la volonté déterminée du Président du Conseil Supérieur de la magistrature, le Roi Mohammed VI, a tenu l'engagement, devant un parterre international très relevé d'éminents magistrats dont des présidents de Cours Suprêmes, tous continents confondus, de pousser la «révolution judiciaire» le plus loin possible en annonçant, dans le même contexte, que «toute la famille de la justice s'investira, avec efficacité et en toute responsabilité, dans cette réforme radicale et déterminante, qui constitue un préalable à l'exercice d'une citoyenneté pleine et entière et à la réalisation du développement global». Au bilan, il faut bien reconnaître que bien des étapes significatives ont été franchies à l'issue de la transition démocratique depuis l'alternance instituée il y a une décennie maintenant. Le lourd passif qui avait violé les droits de l'homme pendant les années de plomb est quasiment intégralement absorbé et les réparations morales et matérielles des cas toujours en instance sont sur le point d'être concrétisées par le CCDH qui a reconduit la courageuse et bénéfique mission historique de l'IER de feu Benzekri. Une initiative unique au monde, est-il besoin de le rappeler, qui a assis les fondements solides d'une réconciliation durable entre l'Etat et la société marocaine. En effet, le registre des droits humains, pour lesquels souscrit entièrement le Maroc qui en a décliné constitutionnellement l'engagement formel et écrit, s'est élargi à d'autres franges du pays, enfin réhabilitées dans leurs droits fondamentaux. Ainsi en va-t-il de la Moudouwana pour la femme et la famille, des enfants exploités et victimes de la violence qui sont mieux protégés du fait de l'entérinement par le Royaume des chartes universelles et des conventions internationales ad hoc. Ainsi en va-t-il tout autant pour une représentativité plus expressive et une participation plus directe de nos ressortissants vivant à l'étranger satisfaits de la décision Royale annonçant la création de leur Conseil supérieur chargé des Marocains résidant à l'étranger. Ces progrès conséquents sont de nature à inspirer le respect et l'admiration des plus grandes chancelleries démocratiques du globe à l'adresse des réformes tous azimuts mis en chantier à ciel ouvert dans notre pays. En effet, à ciel ouvert car la transparence fait désormais organiquement partie des processus électoraux garantissant une démocratie représentative honnête et crédible. Une démocratie où la séparation des pouvoirs est à l'ordre du jour en attendant le grand projet national de réforme institutionnelle annoncée pour bientôt par le Souverain. Une démocratie qui a, effectivement, émergé de toutes ses forces à l'issue des urnes du 7 septembre accouchant de la réalité de la carte politique du Royaume et mettant en place un Exécutif conforme à la logique d'un scrutin universellement reconnu comme conforme aux règles d'usage dans les nations les plus confirmées. Une démocratie qui a, aussi, forgé la nouvelle majorité bicamérale renforçant la crédibilité d'un pouvoir législatif dont l'étendue des prérogatives a été réaffirmée lors du discours Royal à l'ouverture de la première session de la nouvelle législature. Et comme jamais deux sans trois, il reste à capitaliser l'ouverture appréciable du «troisième larron» parachevant l'édifice de la démocratie institutionnelle, le pouvoir judiciaire dont les évolutions récentes incitent à l'optimisme. D'abord, parce que la plus haute magistrature de l'Etat marocain incarnée dans la personne du Chef de l'Etat, avait proclamé la «normalité démocratique» dans son discours du Trône du 30 juillet dernier. Ensuite, toujours au plus haut niveau de la décision publique, le discours Royal du 20 août 2007 avait annoncé le nouveau défi démocratique du Maroc nouveau : l'indépendance de la justice. Si cette dernière a longtemps constitué le maillon faible du processus de démocratisation de la société marocaine, il faut bien se rendre à l'évidence que des avancées décisives ont été capitalisées sous la nouvelle ère. D'abord, parce que le Département gouvernemental en charge de ce portefeuille ne relève plus directement du cercle très sélectif des ministères dits de souveraineté en étant confié, désormais aux partis politiques de la majorité gouvernante. Une indépendance de la justice sur laquelle veille, également, une Cour suprême, qui savoure un demi-siècle d'existence en accouchant d'un siècle de «jurisprudences éclairées», pour ne pas citer le procureur général du Roi près cette Cour, Taïeb Cherkaoui. Un cinquantenaire, qui a permis au premier président de la plus haute juridiction du Royaume, Driss Dahak, de revitaliser le processus de d'édification des fondements et de consolidation des piliers de l'Etat de droit sans lequel la démocratie populaire resterait un vœu pieux. Cet évènement fut salué comme il se doit par le Souverain qui a assuré, en substance : «Cette commémoration marque donc d'une pierre blanche l'histoire de notre pays. Elle incarne une ère foisonnant de chantiers pour l'édification d'un Etat marocain moderne, ayant pour socle la monarchie constitutionnelle, démocratique et sociale, et pour piliers le renforcement de l'Etat de droit et les institutions, l'attachement au principe de la séparation des pouvoirs, la consolidation de la règle de la primauté de la loi et l'administration de la justice dans l'équité». Sans l'ombre d'un doute, le nouveau défi Royal d'une réforme judiciaire radicale sera couronné par l'émergence tant espérée d'une démocratie populaire conforme aux valeurs et aux pratiques universelles.