Rentrée sous haute tension L'entrée en vigueur de la loi sur les accidents de travail dès le 19 novembre prochain rend obligatoire, pour une entreprise, la souscription à une police d'assurance pour le compte de ses employés. Bonne nouvelle pour ces derniers, en attendant d'autres acquis. Bouffée d'oxygène pour les compagnies d'assurances, longtemps déficitaires dans cette branche. Coup dur pour les chefs d'entreprise, qui verront leurs charges salariales grimper en flèche. A l'approche de l'entrée en vigueur de la loi sur les accidents de travail et le relèvement des tarifs de leurs primes à partir du 19 novembre prochain par les assureurs marocains, les associations professionnelles, leurs entreprises, leurs conseillers et experts multiplient les doléances à l'adresse des autorités de tutelle pour qu'elles interviennent dans ce dossier considéré comme épineux par de nombreux spécialistes avertis. La conjoncture politique et économique du pays y est certainement pour quelque chose. Le discours des présidents des associations et des groupements professionnels des entreprises est clair : l'augmentation des primes, décidée par la Fédération des compagnies d'assurances, de l'ordre de 132%, est exorbitante. Cette augmentation a été décidée d'un commun accord entre les compagnies d'assurance de la place sur la base des statistiques et des informations dont elles disposent. “ Elle met tout le monde dans le même panier. Nous sommes pour le renforcement des droits des travailleurs et de l'amélioration de leurs conditions. Mais pas au risque de voir disparaître des centaines d'entreprises. L'augmentation doit être décidée au cas par cas ”, note M. Yacoubi, président de l'UGEP. Et d'ajouter que “ ni les autorités de tutelle ni les compagnies ne se sont concertées avec les associations et les groupements professionnels afin qu'ils les aident à compléter les informations dont elles disposent. Que ce soit pour l'élaboration de la loi ou pour la décision de l'augmentation des primes. En bons gestionnaires, les assureurs devaient décider d'une augmentation variable en fonction des affaires de chacun de leurs clients ”. Du côté du ministère des finances, Thami El Barki, responsable de la direction des assurances et de la prévoyance, affirme que “dès les premières étapes d'élaboration du texte, la CGEM a été invitée par deux lettres, avec accusé de réception, à participer aux travaux. Et que les responsables en place à l'époque ne se sont jamais manifestés ”. Un responsable au sein d'une compagnie d'assurances de la place explique pour sa part qu' “actuellement, il est techniquement impossible pour une compagnie d'assurances de fixer un prix variable en fonction de chaque affaire apportée. Même avec le niveau d'augmentation décidé, la branche est encore déficitaire et elle le sera encore peut-être pour deux à trois années encore. Pour l'instant, on ne cherche pas à réaliser des profits économiques dans cette branche. Ce qui intéresse la profession, c'est le prix d'équilibre”. Thami El Barki, lui, note que “la base de calcul des indemnités a changé. Il est tout à fait logique que les prix changent. Les compagnies d'assurances doivent augmenter leurs primes pour faire face à leurs engagements. Actuellement, toute la branche des accidents de travail est déficitaire”. L'UGEP qualifie cette démarche entreprise par les assureurs marocains “d'entente illicite”. M. Yacoubi renchérit qu' “ elles n'ont pris en compte que leurs intérêts ! Beaucoup de petites et moyennes entreprises n'ont pas les moyens de payer ce prix”. Mais si les compagnies d'assurances se sont basées sur des études statistiques et actuarielles pour décider du niveau de l'augmentation, les groupements professionnels des entreprises, eux, versent dans les discours vides sans disposer ni d'indicateurs ni de statistiques pour appuyer ce qu'ils avancent. Aussi, peut-être pris à court par l'évolution rapide des événements, sont-ils dans l'impossibilité de formuler des propositions concrètes pour solutionner ce problème. C'est du moins ce qui ressort pour l'instant de leurs sorties médiatiques. D'un autre côté, plusieurs entités ne contractaient pas de polices d'assurances pour leurs employés, même pour ceux opérant dans des secteurs à haut risque. La sécurité des employés était le dernier des soucis d'entrepreneurs peu scrupuleux, avides de gains faciles, rapides et importants. La loi est venue renforcer la déontologie dans bien des secteurs, comme celui du bâtiment et travaux publics. Un acquis important pour des centaines de milliers de travailleurs… oubliés parfois de tous.