La vague de la semaine dernière se résume en cinq lettres : fatwa. Figure de proue de la " Confrérie des frères musulmans " télé-prêcheur attitré, Youssef Qaradawi en a été l'origine. Prié, en sa qualité de moufti transnational, de donner son avis à propos des "emprunts bancaires en vue d'accéder à un logement", la voix religieuse satellitaire a "jugé possible de recourir aux crédits en cours en la matière" en dépit des préceptes de la religion. Raison invoquée : "il est permis aux Marocains, dixit le fakih ce qui est permis aux communautés musulmanes en Europe ou ailleurs". Insinuation jugée grotesque qui fait des Marocains des MRE dans leur propre pays. Pis encore : "la législation marocaine serait ainsi de nature laïque, voire ir-religieuse" s'insurgent à la fois des jurisconsules sensés proche du télévangiliste islamique, tel Le fakih Rouki ou autre Ahmed Khamlichi, le directeur de Dar Alhadith Al Hassania, notre Imam Académy. Pour le gouvernement, la fatwa du cheikh ne "concerne, en aucune façon les Marocains" selon les propres termes de Nabil Benabdellah, ministre de la communication et porte parole du gouvernement. S'ensuit une polémique qui a opposé le PJD, et précisément son organe officieux, ATTAJDID et l'USFP. Fait remarquable : souvent prompt à ruer dans les brancards, à chaque fois que pointe une fatwa, Ahmed Raissouni, le maître à penser du Mouvement Unification et Réforme, l'alter ego du PJD et son bras intemporel, a fait plutôt dans la mesure, en ne privilégiant aucune des fetwa : ni celle de Qaradawi ni celle de Rouki. Par ailleurs, encore une fois, le décret de Qaradawi met sur le tapis la question de "l'autonomie religieuse" d'un Maroc religieusement jaloux de son rite et de son choix en matière de jurisprudence. Mais surtout, la capacité des institutions religieuses et cultuelles à réagir à temps. Et sans complaisance. Dans un monde où la télé invente la "télé-religiosité", le remodelage des conseils des oulémas, décidé dans le sillage de la restructuration du champ religieux, et autres mesures audacieuses, n'auront bien évidemment aucun effet s'ils restent lettre morte.