Création d'une bourse d'emploi interministériel, élaboration de référentiels des emplois et des compétences, finalisation de la stratégie globale de la formation continue, instauration d'une nouvelle méthode d'évaluation… Autant de dossiers entamés qui devraient améliorer le rendement de l'administration. Depuis que les pouvoirs publics ont décidé de prendre le taureau par les cornes, des chamboulements s'opèrent au niveau d'une administration longtemps sclérosée par la culture et les états d'esprit qui y régnaient. Il faudra certainement des années pour que toutes les personnes concernées adhèrent aux changements. C'est normal. L'instauration de l'horaire continu avait dès le départ soulevé un tollé. Le mécontentement était à son comble. Aujourd'hui, les esprits sont plus ou moins apaisés. Il faudrait s'attendre à ce que les mutations que va connaître l'administration se fassent en douceur pour qu'une fois encore, les fonctionnaires, mais aussi le citoyen, trouve son compte dans tout ce processus enclenché pour moderniser l'administration. Après le lancement de l'opération des départs volontaires, il était légitime de procéder à une opération qui va dans la continuité : créer un cadre de référence qui permette d'«asseoir une politique de recrutement et de mobilité des fonctionnaires, d'instituer un nouveau système d'évaluation des performances et de jeter des jalons d'une plate-forme pour un système de rémunération équitable et transparent», explique Rabha Zeidguy, directrice de la Réforme administrative au ministère de la Modernisation des Secteurs Publics. Il s'agit en fait d'un référentiel des emplois et des compétences (REC). Cet outil de gestion des ressources humaines permettra d'aboutir (idéalement) à une adéquation entre le poste et le profil. Aujourd'hui, deux départements précurseurs, l'Equipement et l'Agriculture, ont finalisé leur document. Le ministère des Finances et le MMSP sont en train de les réaliser. L'objectif étant de généraliser le REC au cours de l'année 2008. Les plus durs à concocter seront à l'évidence des ministères ayant un nombre impressionnant de fonctionnaires comme la Santé, l'Education ou l'Intérieur. Pour harmoniser les travaux, un guide des emplois communs est en cours de finalisation et sera distribué au mois de septembre à l'ensemble des ministères. Adéquation besoins-formation Du REC, il se dégagera divers moyens à mettre en œuvre pour arriver à maximiser l'adéquation poste-profil. Il est question, entre autres, de la formation continue régit par un décret datant de fin 2005. Généralement, elle se limitait à l'apprentissage de l'anglais, de la bureautique ou de la communication. «Il s'est avéré que ces formations n'étaient pas adaptées aux besoins réels», reconnaît Rabha Zeidguy. Et de poursuivre: «le texte de loi institutionnalise des normes générales à suivre lors de la planification, de la programmation, de la réalisation et de l'évaluation des programmes. Tous les départements ministériels seront alors obligés d'élaborer des plans de formation qui s'inscrivent dans la logique d'une stratégie globale de la formation continue». Cette dernière vient d'être présentée au réseau des directeurs de ressources humaines. Ils ont près de deux semaines pour émettre leurs remarques pour boucler la stratégie globale. Il en découlera des plans de formations sectoriels. Chaque département devra, d'ici 2008, consacrer 1% de sa masse salariale à la formation continue. Aujourd'hui, le niveau moyen se situerait aux alentours de 0,5%. Sur le plan des notations et des évaluations des fonctionnaires, un guide avec un système de fiches est en train d'être élaboré de manière à standardiser la procédure. Aussi, des formations des évaluateurs sont-elles en train de se mettre en place pour mener à bien cette mission. A priori, les évaluations doivent s'opérer au moins une fois tous les deux ans. «Mais rien n'empêche qu'elles aient lieu tous les ans», note la directrice de la réforme administrative. A propos du redéploiement du personnel et de la rémunération, les textes les accompagnant n'ont pas été publiés. Ce sont des chantiers sensibles qui nécessiteront du temps pour leur mise en place. Concernant le premier dossier, il est question d'élaborer une bourse de l'emploi d'abord sur le plan ministériel puis interministériel. Quant à la rémunération, des réflexions ont abouti à l'élaboration d'une plateforme présentée au conseil supérieur de la fonction publique. Le dossier est en cours d'étude. Un autre chantier, non des moindres, est mené pour rationaliser les structures administratives et améliorer les prestations dans le cadre d'une politique de proximité et de déconcentration. Parmi les apports du décret fixant les règles d'organisation et de la déconcentration de l'administration, il est stipulé l'exigence d'un audit organisationnel et l'élaboration d'un schéma directeur de déconcentration de chaque département. «Nous travaillons actuellement sur les termes de référence d'un guide méthodologique des schémas directeurs dont la durée s'étale entre deux et cinq ans. Selon les textes de loi, chaque département devra présenter son schéma directeur à la commission des structures administratives et de la déconcentration au début de l'année 2007», indique la responsable® Cette échéance risque de ne pas être respectée étant donné le retard pris sur ce chantier. Un autre volet qui a son importance est la création du Fomap (Fonds de Modernisation de l'Administration Publique), alimenté par le budget général de l'Etat et permettant de co-financer les projets administratifs à hauteur de 50% avec possibilité de dérogation. Sur les 37 départements ministériels, 22 ont présenté une soixantaine de projets. Près de huit d'entre eux ont été acceptés. La réforme de l'administration ne se limite pas à ces quelques projets. Il en existe un tas d'autres qu'il serait difficile de traiter dans ce seul papier. Il s'agit-là de gros pavés qui ont été jetés dans la marre. Il faudra espérer que le prochain gouvernement aille dans la continuité des travaux déjà entamés pour ne pas risquer de perdre du temps et repartir à zéro. Le Maroc risquerait gros.