Elle est la seule athlète française qui a été trois fois championne olympique : en 1992 à Barcelone sur 400 m et deux fois à Atlanta en 1996 sur 400 m et 200 m. Elle est également une des rares athlètes à avoir réalisé le doublé aux Jeux Olympiques sur 200 et 400 m et la seule à avoir remporté deux Olympiades de suite le titre sur 400 m. En visite au Maroc, elle a accepté de s'entretenir avec La Gazette du Maroc dans un entretien qui déborde le secteur du sport pour évoquer les femmes et la société marocaine en général. Entretien La gazette du Maroc : Peut-on connaître l'objet de cette visite que vous effectuez au Maroc et surtout la raison de votre présence à la cérémonie d'inauguration du siège de l'Union des journalistes sportifs africains à Casablanca ? Marie José Perec : Au fait, je suis au Maroc en tant qu'invitée à la course féminine sur route organisée sous l'impulsion de Nawal El Moutawakel. J'en ai profité pour mieux connaître le sport et la société marocaines. Je n'ai pas manqué de répondre à l'invitation des journalistes sportifs africains pour l'inauguration du nouveau siège de leur association à Casablanca. Vous vous intéressez beaucoup à la presse sportive, surtout africaine. Comment l'expliquez-vous ? D'après les interventions des personnalités présentes lors de cette cérémonie, j'ai eu l'impression qu'après avoir connu une longue période d'hibernation, l'Union des journalistes sportifs africains commence à peine à bouger après avoir été relancée lors du congrès de l'Association Internationale de la Presse Sportive (AIPS) qui avait eu lieu l'année dernière à Marrakech. Je trouve cela très positif et tout à fait à l'actif du Maroc et du président de l'Union, le journaliste marocain Belaid Bouimid. Je pense que c'est une initiative qui mérite largement d'être encourageé car en Afrique, comme partout dans le monde, la presse sportive est le reflet du développement sportif sur le continent. C'est une belle occasion de réunir les journalistes sportifs qui font, au quotidien, l'histoire du sport à travers le monde. Après une carrière riche et brillante en athlétisme, quels sont, aujourd'hui, les préoccupations de Marie José Perec ? Après avoir fait mes adieux à la compétition, j'ai décidé de mettre mon expérience au service de l'athlétisme mondial, le sport qui m'a tout donné, qui est à l'origine de la notoriété mondiale dont j'ai bénéficié. C'est un sport qui m'a appris à aimer les gens et à partager leurs soucis et leurs joies. Cela explique aussi le fait que j'ai choisi de retourner à ma terre natale, au Guadeloupe Et pourquoi précisément la Guadeloupe ? Parce que c'est mon lieu de naissance et c'est la résidence de ma petite famille. Celle qui m' avait beaucoup aidée et qui est derrière toute ma réussite et ma brillante carrière sur les pistes d'athlétisme. C'est mon pays d'origine où je m'occupe essentiellement à aider les femmes. En particulier les jeunes athlètes du pays. Celles qui aspirent à être un jour comme Marie José Perec. Je m'emploie à les conseiller, à les entraîner et à les aider par tous les moyens. Puisque nous évoquons les femmes, que saviez-vous sur la femme marocaine ? Je suis de très près la marche des femmes marocaines, que ce soit en sport ou dans d'autres secteurs de la vie économique et sociale. J'ai la profonde conviction que la femme marocaine a réalisé de grandes conquêtes, que son émancipation s'opère de façon très rapide et qu'elle est devenue aujourd'hui une partenaire à part entière dans le processus de développement du Maroc d'aujourd'hui. Elle participe activement à l'émergence de la société marocaine moderne. Il y a d'éminentes professeurs, des médecins, des ministres. Toutes ces conquêtes sont positives et permettent d'envisager avec sérénité, confiance et optimisme l'avenir des femmes en Afrique et dans tous les pays en voie de développement. Selon vous, quelles sont les raisons objectives qui ont permis à la femme marocaine de réaliser autant de conquêtes ? Je sais que les femmes marocaines ont réalisé des avancées. Je pense que le nouveau code personnel (La Moudawana) a permis aux femmes marocaines de mieux vivre dans leur société. C'est une excellente initiative de votre jeune Souverain Mohammed VI à qui revient l'honneur et tout le mérite dans cette rapide évolution. Il a réhabilité la femme et la famille marocaines qui ont commencé à bénéficier d'un statut qui n'est pas tellement différent de celui des femmes en Europe. Sur certains plans, je dirais même que les femmes marocaines sont en avance sur leurs homologues européennes. Cela est d'autant plus vrai que la femme marocaine reste très attachée à sa culture, à ses traditions et à son authenticité. Une petite remarque si vous le permettez ; vous donnez l'impression d'être très timide ? Effectivement, je suis assez timide, assez réservée. Cela s'explique beaucoup plus par l'environnement très conservateur au sein duquel j'ai vécu et grandi. Je considère ma timidité comme étant une chose très normale et non un défaut …! Revenons à l'athlétisme ; pensez-vous que ce sport connu une évolution significative depuis votre décision de vous retirer des compétitions ? L'évolution est une règle incontournable en athlétisme. Chaque jour, chaque mois et chaque année, il y a une évolution notable. Et même si bon nombre de grands athlètes se sont retirés, de nouveaux jeunes champions émergent au point de les faire oublier …! Puisqu'on parle de retrait, que pensez- vous de la décision prise récemment par le champion olympique marocain, Hicham El Guerrouj, de se retirer définitivement des pistes ? C'est aussi la loi de la vie. Hicham El Guerrouj sait très bien ce qu'il fait et ce qu'il veut. Il a tout donné à son pays et au sport mondial durant près de dix ans. Il a eu des titres de champion du monde, des records du monde et des titres olympiques. Malgré tout cela je continue de considérer son retrait comme une grande perte pour l'athlétisme mondial. Pensez-vous que le Maroc trouvera facilement un successeur de Hicham El Guerrouj ? Oui, effectivement il pourra le trouver. Le pays qui a donné Said Aouita, Nawal El Moutawakel, Nouzha Bidouane, Skah, Gharib le marathonien et tant d'autres athlètes me parait largement en mesure de trouver un jour un successeur d'El Guerrouj. Les potentialités ne font pas défaut au Maroc . Un dernier mot. Je tiens à remercier La Gazette du Maroc de m'avoir accordé toute cetteimportance. Je remercie également tous les Marocains et les Marocaines qui m'ont si bien accueillie dans votre beau pays et dans un climat empreint de gentillesse et d'hospitalité. Entretien réalisé par Katim Idbihi