Je ne puis vivre personnellement sans mon art. Mais je n'ai jamais placé cet art au-dessus de tout. S'il m'est nécessaire au contraire, c'est qu'il ne se sépare de personne et me permet de vivre, tel que je suis, au niveau de tous. L'art n'est pas à mes yeux une réjouissance solitaire. Il est un moyen d'émouvoir le plus grand nombre d'hommes en leur offrant une image privilégiée des souffrances et des joies communes. Il oblige donc l'artiste à ne pas s'isoler ; il le soumet à la vérité la plus humble et la plus universelle. Et celui qui, souvent, a choisi son destin d'artiste parce qu'il se sentait différent, apprend bien vite qu'il ne nourrira son art et sa différence, qu'en avouant sa ressemblance avec tous. L'artiste se forge dans cet aller-retour perpétuel de lui aux autres, à mi-chemin de la beauté dont il ne peut se passer et de la communauté à laquelle il ne peut s'arracher. C'est pourquoi les artistes ne méprisent rien, ils s'obligent à comprendre au lieu de juger. Albert Camus - Discours de Stockholm, 1957 Aujourd'hui la définition de l'artiste prend un autre chemin, les beau discours et la belle image de l'être. Être artiste est devenue une mode, une motivation d'être pas comme les autres, une nourriture pour l'ego. Mais ce qu'on oublie c'est le rôle de ce personnage dans l'ensemble de sa société. Aujourd'hui nous vivons une époque étonnante entre le “tout est art” des uns, du graffiti dans une cave de HLM à Soulages, de “Nique ta mère” (pardonnez-moi le terme) jusqu'à l'insolence dans ce qu'on appelle la création artistique. Mais cela est lié avec le manque de formation à ce niveau dans notre pays. L'absence du sens dans ce que vit l'artiste, l'absence de la nécessité d'un travail artistique ne fait que nous mener à nous poser des questions sur l'art d'aujourd'hui. Si nous revenons vers les premières lignes directrices d'un travail artistique ou une action culturel, nous allons trouver que c'est liée avec ce qui entoure la société. C'est une image de la société elle-même. L'art et l'action prennent un autre raisonnement aujourd'hui, c'est " faire pour faire", et les autres objectifs on verra après. Je me rappelle de quelques personnages de Jamaâ El Fna, le docteur des mouches, les clowns bakache, el boudali, des gens qui ont tant donné à l'art et la culture du pays. De vrais éducateurs, qui ont transmis des valeurs à travers le rire et l'histoire, à travers les mots et les gestes. Des gens que l'on connaît et que l'on a sûrement croiser. Je reviens sur le manque de formation qui est le premier moyen de transmission des valeurs de ce métier, le rôle d'un artiste dans le développement d'une société. L'absence de l'artiste marocain, l'absence de l'action culturelle et artistique et de la mise en valeur des travaux des artistes marocains. Tout un travail à mener dans ce domaine. Par ce que l'art et l'artiste peuvent donner de l'élan pour le développement d'une société. À suivre