La Troisième conférence internationale des Régulateurs sur la Sécurité Nucléaire se déroulera cette année à Marrakech du 1er au 14 octobre prochain. Une première sur le sol africain et dans la région MENA. Mais aussi un challenge de taille pour la jeune Agence Marocaine de Sûreté et de Sécurité Nucléaires et Radiologiques (AMSSNuR), créée en 2016 et placée directement sous l'autorité du Chef du gouvernement. Au premier plan lors de cet événement qui verra la participation de plus de 300 experts provenant de 96 pays des cinq continents, on trouve son Directeur général, le Dr. Khammar Mrabit. Il a bien voulu répondre aux question de Hespress Fr. Interview Outre les retombées positives attendues pour le Maroc, cet ancien expert marocain au sein de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) à Vienne se félicite de l'organisation de cet événement pour la première fois sur le sol africain. Hespress FR: Pouvez-vous d'abord nous dire dans quel contexte s'inscrit cette conférence que va accueillir Marrakech en octobre ? Cette conférence est la troisième du genre. La première était en 2012 à Washington, la deuxième en 2016 à Madrid et cette troisième, pour la première fois en Afrique, à Marrakech. Le but c'est de donner, dans le cadre de l'AIEA, un élan de coopération entre les organisme de réglementation de la sûreté et de la sécurité nucléaires et radiologiques dans le monde. Notre pays a réalisé beaucoup de choses dans ce domaine. Et on voudrait partager cela avec les différents pays, mais aussi se positionner en montrant que nous pouvons réaliser beaucoup de choses dans ce domaine. Je voudrais aussi dire que c'est une reconnaissance de la communauté internationale qui se traduit par l'élection du d'AMSSNuR et donc du Maroc la semaine dernière, par la Conférence générale de l'AIEA. comme président pour deux ans renouvelable une fois d'un réseau de ce type d'organismes en Afrique. Il y aura qui comme acteurs marocains participants à cet événement de rang mondial ? C'est ouvert à tout le monde. Normalement c'est une rencontre entre organismes de réglementations mais aussi les organismes qui font des supports techniques et d'autres comme les organismes sécuritaires, universitaire. Durant votre présentation de la Conférence, vous-êtes notamment revenu sur les situation d'urgence en matière de sûreté et de sécurité nucléaire et radiologique et de l'expertise marocaine dans ce domaine. Pouvez-vous nous en dire plus sur le savoir faire développé par l'AMSSNuR en la matière ? Notre pays a réalisé pas mal d'exercices en situation d'urgence à l'échelle internationale. Le dernier était avec l'Espagne, dans le cadre de l'AIEA, par rapport au transport de sources radioactives. C'était une réussite, présentée au Conseil d'administration de l'AIEA qui l'a apprécié. Du point de vue pratique, le Maroc à travers les département concernés, que ce soit l'intérieur, la Gendarmerie royale ou la Défense nationale fait un travail formidable. Ce qu'il nous manque c'est de codifier tout ça. Nous n'avons pas un plan de situation d'urgence écrit noir sur blanc et qui prescrit qui doit faire quoi et quel est le rôle de chacun. Lorsqu'on fait un exercice, on sait ce que chacun doit faire. Nous avons d'ores et déjà élaboré une réglementation de situation d'urgence, soumise au niveau du Chef du gouvernement pour approbation. Notre pays aura bien un plan national pour les situations d'urgence dans le domaine nucléaire et radiologique L'année dernière, puis cette année, nous avons obtenu une reconnaissance comme Centre de capacités pour l'Afrique pour les situation d'urgence. Au siège d'AMSSNuR nous arborons une plaque décernée par l'AIEA qui l'atteste. Au mois de mai dernier, le Maroc a été élu parmi 53 pays dont des puissances nucléaires, président du réseau international des capacités dans les situations d'urgence. Que prévoit le pays pour se prémunir de toute prolifération nucléaire ou radiologique sur son territoire ? Depuis les années 1970, le Maroc s'est doté de la loi 005-71 relative à la protection contre les rayonnements ionisants. C'est un texte lié à la protection de l'environnement et à l'utilisation des techniques nucléaires. Bien entendu, c'est comme dans le domaine de la sûreté et de la sécurité courantes, c'est très évolutif. Il y avait des choses qu'il fallait améliorer pour assurer la conformité entre les normes internationales et la législation nationale. Aujourd'hui, nous pouvons dire que nous avons un cadre législatif modèle avec la loi 142-12 relative à la sûreté et à la sécurité nucléaires et radiologiques et à la création de l'AMSSNuR, de plus que nous travaillons également sur les textes réglementaires. Nous en avons déjà préparé 9 qui sont au niveau du gouvernement pour approbation, et il nous reste 5 d'ici la fin de l'année, et 3 en 2020. Puis nous sommes également beaucoup portés sur la formation de compétences. Est-ce que le Maroc a déjà eu à affronter une situation de cette envergure ? Il y a toujours des améliorations à faire. Mais pour parler de précédents, il y avait un cas à Mohammedia il y a plusieurs années avec une source non contrôlée. Dans le monde entier, il y a des cas qui se signalent. C'est pour cela qu'il faut toujours améliorer les normes internationales dans ce domaine extrêmement sensible. Les utilisateurs doivent avoir un niveau de protection car lorsqu'il s'agit d'une source radioactive, il doivent avoir un plan de sécurité de cette même source. Nous ne donnons pas d'autorisations sans conditions de sûreté et de sécurité nucléaire et radiologique, à la fois pour la protection de la source radioactive mais aussi pour la protection de l'Homme et de son environnement. En dépit de la présence de nombreux pays qui constituent une puissance nucléaire, vous avez déclaré au cours de votre présentation que la Conférence de Marrakech sera « un rendez-vous africain par excellence ». Où se place le Maroc à l'échelle du continent dans le domaine de sûreté et de sécurité nucléaire et radiologique ? Il n'y a pas d'inter-comparaison possible entre les systèmes réglementaires dans les pays, mais je peux vous assurer que nous sommes estimés, rien que par le nombre d'Africains qui souhaiteraient venir au Maroc pour être formés et voir le modèle marocain. Nous recevons aussi des gens de pays qui sont avancées dans ce domaine comme l'Indonésie qui a deux réacteurs de recherche. Ils ont tellement de pratiques dans le domaine qu'ils sont venus voir qu'est-ce que nous avons fait et comment avons-nous fait. Pour rester sur l'exemple des Indonésiens, ils se disent aujourd'hui d'accord pour une coopération triangulaire AIEA-Maroc-Pays africains. Je vais moi-même me déplacer en décembre prochain en Côte d'Ivoire pour pour leur expliquer comment nous avons réaliser le système réglementaire marocain et ce qu'on est en train de faire pour renforcer la sécurité dans ce domaine. Je suis objectif, je ne dirais pas que nous sommes les meilleurs à l'échelle du continent. Mais les autres, rien que par leur sollicitations, reconnaissent notre niveau et veulent qu'on partage davantage avec eux. Il y a d'ailleurs un autre indicateur puisque, comme je vous l'ai expliqué, le Maroc a été élu président du réseau des organismes réglementaires africains dans le domaine de sûreté et de la sécurité nucléaire et radiologique.