Le ministre chargé des Droits de l'homme a affirmé, ce 4 décembre, que « les autorités marocaines ont pris acte du rapport de Human Rights Watch (HRW) du 30 novembre dernier intitulé : « Maroc : Des verdicts entachés par des soupçons de torture » en se penchant sur le cas des militants du Hirak du Rif, condamnés en première instance par la chambre criminelle de la Cour d'appel de Casablanca, et toujours poursuivis en appel. Mustapha Ramid commence par estimer qu'en publiant un rapport faisant allusion aux soupçons de torture sur les activistes arrêtés dans le cadre du Hurak, Human Rights Watch (HRW) « a osé aborder un sujet relevant de la souveraineté judiciaire du Royaume. D'autant plus que l'affaire est toujours pendante devant les tribunaux », faisant référence au procès des détenus du Hirak en appel. Dans sa réponse, le responsable gouvernemental « condamne le caractère sélectif de l'organisation ». Pour lui, HRW « a établi ses conclusions en n'assistant qu'à 17 audiences sur 86 », ce qui ne serait pas suffisant d'après ses propos. Fuite et démenti Mustapha Ramid évoque également, parmi les éléments contenus dans le rapport « des documents diffusés dans les médias concernant les allégations de mauvais traitements et le recueil de l'avis de certains avocats de la défense, et non pas de la partie civile ». Soit une allusion à l'affaire des recommandations fuitées dans la presse, et présentées comme faisant partie du rapport du Conseil national des droits de l'Homme (CNDH) sur les détenus du Hirak aux procureurs du tribunal de Casablanca. Rappelons que le CNDH recommandait, d'après ces mêmes extraits fuités, d'« investiguer les faits de torture et autres mauvais traitements allégués et s'assurer le cas échéant que les responsables des violations ne resteront pas impunis ». Des recommandations contestées par la Direction générale de la Sûreté nationale (DGSN) suivies, début juillet 2017, de la publication d'un communiqué où le CNDH dément avoir porté ces accusations dans son rapport. « Les conclusions et recommandations qui seront contenues dans le rapport global et final autour des événements d'Al Hoceima seront les seules références pour évaluer lesdits événements dans toutes leurs dimensions et étapes avec neutralité, objectivité et responsabilité » expliquait le Conseil. Indépendance et bilinguisme Dans sa lettre, Mustapha Ramid évoque également « l'indépendance du pouvoir judiciaire, telle que stipulée par l'article 107 de la constitution de 2011 ». Il ajoute que le rapport délivré par l'ONG « évalue un procès qui en est encore au début de sa phase d'appel, alors que l'éthique des procès en observation nécessite l'attente de la fin de la procédure judiciaire du dossier ». S'agissant de la déclaration du directeur de la communication et du plaidoyer de HRW pour le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord Ahmed Reda Benchemsi, le ministre répond que « la Cour d'appel doit rejeter tout aveu suspect et veiller à ce que personne ne soit reconnu coupable que s'il a véritablement commis de véritables crimes ». Mustapha Ramid considère, en l'espèce, que le rapport de l'ONG qu'il représente « ne peut être considéré que comme une ingérence flagrante dans le déroulement de l'affaire devant la justice en appel, sachant que cette organisation a toujours plaidé pour l'indépendance du pouvoir judiciaire ». Pour rappel, le récent rapport HRW sur le procès du Hirak du Rif à Casablanca indiquait que « le tribunal a seulement communiqué à la défense les transcriptions écrites de conversations téléphoniques sur écoute entre activistes du Hirak, traduites du tarifit (variante de la langue amazighe parlée dans la région du Rif) à l'arabe. Or, selon Ahmed Messaoudi (un des avocats des 53 prisonniers du Hirak du Rif, NDLR) plusieurs accusés, avaient dit au juge d'instruction, au procureur et au juge du procès que ces transcriptions d'écoutes contenaient des traductions en arabe erronées ». Me Messaoudi ajoutait, toujours selon le rapport de HRW, que « les transcriptions avaient été rédigées et traduites par des policiers, et non pas par des traducteurs assermentés, comme ce devrait être le cas pour qu'elles soient admises comme preuves au tribunal ». Lire aussi: HRW charge le Maroc concernant la « torture des détenus du Hirak » Lire aussi: Mustapha Ramid à Hespress : Nous examinerons le rapport de HRW dans la perspective d'y répondre