Les Italiens retourneront aux urnes plus tôt que prévu. Après une semaine de tractations politiques, le Premier ministre, Mario Draghi, lâché par trois partis de sa majorité, a fini par démissionner. Aussitôt, le président de la République, Sergio Mattarella, a décidé de dissoudre le parlement, provoquant ainsi des élections législatives anticipées. Un dénouement, redouté mais prévu, qui marque le début d'une nouvelle « tourmente » politique en Italie. Au programme, un affrontement entre un bloc cimenté par une droite populiste et deux partis de la gauche. Les Italiens voteront pour élire 200 sénateurs et 400 députés qui composeront le Parlement de la République. La campagne électorale italienne s'annonce "atypique" et "décisive", selon les médias locaux. Les différents partis disposent de deux mois seulement, intenses et difficiles pour convaincre les électeurs. La coalition de ''centre-droite » se démarque déjà. Il s'agit de Forza Italia, le parti de droite de Silvio Berlusconi, et de l'extrême droite représentée par la Ligue dirigée par Matteo Salvini et de Fratelli d'Italia, présidé par Giorgia Meloni, qui figure à la tête des intentions de vote. Connue pour ses fortes opinions nationalistes, notamment à l'égard des migrants en situation irrégulière, la dirigeante du parti d'extrême-droite milite pour un "souverainisme, une lutte contre l'immigration, mais aussi la préservation des traditions nationales". Face à cette robuste coalition, la gauche sera représentée par le parti démocrate et le Mouvement 5 Etoiles (M5S). Seuls le centre et la gauche, incarnée par le Parti démocrate, sont restés jusqu'au bout aux côtés de Mario Draghi, entre autres par peur des élections anticipées de septembre, où ils sont annoncés battus par la droite selon les sondages. Enrico Letta, visage du Parti Démocrate et ancien Premier ministre, regrette "le canyon qui s'est creusé entre l'Italie et ses députés". Les enquêtes d'opinion suggèrent que le Parti démocrate pourrait être contraint de s'allier avec M5S pour l'emporter sur la droite. Déchiré par de nombreuses crises internes, le M5S avait perdu plus d'une soixantaine de sénateurs et députés en juin dernier après que l'ancien chef du parti Luigi Di Maio, actuel ministre des Affaires étrangères, avait quitté le parti pour former un nouveau groupe parlementaire. Giuseppe Conte, ancien président du Conseil, est désormais le capitaine du Mouvement 5 étoiles, "déclencheur" de la crise gouvernementale. Le M5S a boycotté le 20 juillet dernier un vote de confiance sur un plan d'aide de 26 milliards d'euros, alors que la Ligue et Forza Italia ont rejeté les demandes d'aide de Mario Draghi pour mener son mandat à son terme, prévu au printemps 2023, d'où ces élections prématurées. Les candidats s'affronteront dans un système mixte, conformément à la loi électorale italienne, nommée "La Rosatellum". L'attribution des sièges à la Chambre et au Sénat s'effectue dans des circonscriptions uninominales, dans lesquelles le candidat le plus voté est proclamé élu. L'attribution des sièges restants dans les circonscriptions du territoire national s'effectue au mode proportionnel dans des circonscriptions plurinominales dans lesquelles les candidats de la liste de la circonscription plurinominale sont proclamés élus suivant l'ordre de présentation, et dans la limite des sièges auxquels la liste a droit. Ce mode de scrutin augmente les chances de la coalition qui devra s'accorder sur un nom et impose une alliance entre le PD et le M5S. Les positions de la coalition de centre-droite, notamment Fratelli d'Italia "préoccupent" les partenaires européens de l'Italie car, s'il ne défend pas une sortie de l'Union Européenne, Fratelli d'Italia prône une révision des traités et la substitution de l'Union par une "confédération d'Etats souverains". Pour le chef de l'État, qui a accepté à contrecœur en janvier un second mandat en raison du climat de confrontation politique, « il faut penser au pays ». « J'espère que, dans la dialectique intense et parfois acérée de la campagne électorale, une contribution constructive sera apportée par tous dans l'intérêt supérieur de l'Italie », a affirmé Sergio Matarella. Car les « exigences », a-t-il dit, sont nombreuses et importantes : combattre l'inflation et les derniers soubresauts de la pandémie, contenir les effets de la guerre en Ukraine et renforcer « la collaboration de plus en plus nécessaire au niveau européen et international ». L'organisation d'élections, la campagne électorale, la nomination d'un gouvernement puis sa prise de fonctions bousculent le calendrier de l'Italie, qui doit rendre les comptes à Bruxelles sur l'avancement du plan de relance, financé par des fonds européens, mais aussi faire face à une lourde dette publique. Par ailleurs, les Italiens, lourdement impactés par l'inflation, scrutent avec attention la situation dans l'espoir de voir leurs leaders sortir de l'impasse.