Des centaines de Tunisiens ont manifesté dimanche, dans la capitale Tunis, pour exprimer leur soutien au président Kais Saied, qui fait l'objet de critiques internes et internationales l'accusant de dérives autoritaires. Des voix dissidentes appellent à faire une évaluation psychologique au président tunisien. Les manifestants hissant le drapeau tunisien ont scandé de nombreux slogans appelant notamment au jugement des politiciens « corrompus », une des rengaines du chef de l'Etat qu'il rappelle depuis son élection en 2019. Les militants du président Saied ont appelé à poursuivre ces « corrompus » avant l'organisation des élections anticipées ainsi que du référendum prévus les mois prochains. Des manifestations en soutien au chef de l'Etat ont également eu lieu dans d'autres villes du pays, où les manifestants ont critiqué les derniers dirigeants du pays avant Kais Saied, ont aussi qualifié le chef du Mouvement Ennahdha, Rached Ghannouchi de « traitre ». En outre, plusieurs d'entre eux ont exprimé leur rejet de l'ingérence étrangère dans les affaires intérieures du pays, comme l'a fait le président tunisien il y a quelques jours. Ces manifestations pro-Saied interviennent alors que le chef d'Etat tunisien, arrivé au pouvoir en 2019, en tant qu'indépendant, n'avait pas de parti politique pour le soutenir au Parlement détenu en majorité par le mouvement Ennahda d'inspiration islamiste. Sans pouvoirs et handicapé dans sa fonction présidentielle, Kais Saied s'est retrouvé face à un blocage politique fomenté par les islamistes d'Ennahda ainsi que ses partis alliés. pendant plusieurs mois. Le président a donc pris des décisions qui ont été vivement dénoncées car elles bousculent la démocratie dans le pays et menacent les institutions indépendantes de l'Etat. Ces décisions s'inspirent beaucoup du modèle algérien, depuis l'élection du président Abdelmadjid Tebboune. Le 25 juillet, M. Saied s'est arrogé les pleins pouvoirs en limogeant le Premier ministre et en suspendant le Parlement avant de le dissoudre en mars. En Février, il a dissous le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) pour le remplacer par un organe de supervision judiciaire « temporaire » dont il a choisi les membres. Fin avril, Kais Saied a choisi le chef de l'Autorité électorale qui doit superviser la bonne tenue des scrutins, alors que dans quelques mois doivent se tenir deux rendez-vous importants pour la Tunisie, notamment un référendum sur des réformes constitutionnelles en juillet et des élections législatives anticipées (qui devraient éliminer Ennahda du pouvoir, ndlr) en décembre. Suite aux mesures autoritaires prises par le chef de l'Etat tunisien, en reprenant les pleins pouvoir du pays, les voix des partis politiques se sont élevées car il les a aussi exclus d'un dialogue national décidé récemment. Plusieurs partis d'opposition ont donc annoncé fin avril la création d'un « Front de salut national » pour « sauver » la Tunisie de sa profonde crise multiformes, sociale, économique, politique... Face aux décisions de Kais Saied ces derniers mois, les critiques du pouvoir, notamment chez Ennahda, estiment que le président devrait être soumis à une évaluation psychologique. « L'agitation de Kais Saied, le gonflement des yeux, les cris accompagnés de promesses et de menaces, insultant les opposants (...) tous ces gestes témoignent qu'il s'agit d'une personne déséquilibrée et prouve aussi sa nette tendance à tout démolir (...) Les citoyens ont le droit de s'assurer de l'état psychologique et physique du président, qui est la première personne du pays à gérer les affaires publiques des Tunisiens et des Tunisiennes », a déclaré l'ancien chef de la diplomatie tunisienne sur sa page Facebook. Vendredi, au cours d'un entretien téléphonique entre Kais Saied et son homologue français, Emmanuel Macron pour le féliciter pour sa réélection en France, le chef de l'Etat français a « fait part à son homologue de sa préoccupation face à l'ampleur des défis institutionnels, économiques et sociaux auxquels le pays est confronté qui ne peuvent être relevés que dans le dialogue et l'unité », a indiqué un communiqué de l'Elysée.