Après Dar Bouazza, Souss-Massa ou encore Rabat, c'est désormais dans la ville de Fès que la cruauté envers les animaux a encore sévi, avec l'abattage de plus de 400 chiens, comme l'a dénoncé le refuge des Quat'pattes qui œuvre pour la protection des chiens au Maroc. L'abattage, cette pratique d'une cruauté gratuite continue d'être monnaie courante au Maroc. Appliquée depuis des décennies, elle a eu le temps de prouver son inutilité en termes de régulation de la population canine. Encore aujourd'hui, elle semble être une solution de facilité pour les autorités malgré l'appel à l'ordre du ministère de l'Intérieur. Une situation qui met à mal les associations de protection des animaux, notamment celle des Quat'pattes, désemparées par le manque de compassion et de sensibilisation à la cause animale dans le Royaume. Dans une lettre adressée aux citoyens marocains, le refuge dénonce ces actes barbares perpétrés au Maroc et appelle à plus d'actions. « Ces actions sont perpétrées par l'État même comme politique de lutte anti-nuisible, faute d'autre option, c'est commode. Au Maroc les fourrières sont des camps d'extermination. Cette politique de l'État donne tout à fait le droit à n'importe quel individu de jeter sa haine sur ces pauvres âmes, des fantômes errants agonisants », peut-on lire sur la lettre. La même source met en lumière la situation alarmante des chiens de rue au Maroc. « Les animaux errent, souvent affamés, malades et accidentés. Ils n'ont pas choisi cette vie. Ils sont supprimés par milliers par les autorités locales toujours, par des moyens cruels et violents (appâts empoisonnés, tir au fusil, noyade, électrocution...). Ce n'est pas l'exemple qu'on veut donner à notre société, à nos citoyens, à nos enfants », poursuit le refuge. Dans cette lettre, les membres des Quat' pattes regrettent le manque d'information et d'application pour trouver une solution efficace et humaine à ce problème. Il s'agit avant tout d'éduquer et de sensibiliser l'opinion publique et les organismes de l'État, pour la santé publique et pour le bien-être de l'humain et de l'animal. Le défi de la stérilisation Contactée par Hespress FR, Talissa, bénévole et membre active dans le refuge regrette le silence de l'état face au cri d'alarme des associations qui tentent tant bien que mal de sensibiliser à la stérilisation et de mobiliser à plus de moyens pour prendre en charge les chiens errants. « A l'heure actuelle, nous ne pouvons accueillir que les chiens qui sont dans un état critique faute de place et de moyens. C'est le parcours du combattant avec toutes les autres associations du Maroc », explique-t-elle. La militante s'insurge face à la violence commise à Fès où plus de 400 chiens ont été abattus dans l'indifférence totale. « 400 chiens ont été tués à Fès entre jeudi et vendredi dernier. Malgré les réglementations, c'est un problème récurrent. Les communes ne respectent pas les indications et trouvent toujours l'excuse de la protection de la santé publique bien qu'il y ait d'autres moyens », dénonce-t-elle. Selon Talissa, la seule solution est celle de la vaccination et de la stérilisation. « Quand nous avons décidé de vacciner des chiens, de les stériliser et de les relâcher, ils ont quand même été tués » s'attriste-t-elle, regrettant l'absence d'une loi qui pourrait mettre fin aux violences animales. « Outre l'absence d'une loi, le manque de soutien aussi bien financier qu'humain de la part des particuliers et des institutions nous freine à mener à bien notre mission », a-t-elle ajouté. La Tribu des Quat'pattes, un combat quotidien pour assurer la survie des canins La Tribu des Quat'pattes est un refuge pour animaux à but non lucratif basé à Rabat, fondé en 2016. L'objectif principal de l'organisation est de sauver les animaux errants, maltraités et vulnérables. Suite à cela, l'organisation utilise sa présence sur les réseaux sociaux pour trouver de nouveaux foyers pour les chiens. L'association exhorte également les citoyens à participer à la protection des animaux et à les sensibiliser aux circonstances dangereuses dans lesquelles doivent vivre les chiens errants. En organisant des événements et des ateliers, ils informent et éduquent les citoyens non seulement sur la cruauté endémique envers les animaux au Maroc, mais aussi sur les différentes tâches nécessaires pour prendre soin d'un animal. Depuis 7 ans, l'Association des Quat'pattes à Rabat a sorti de la rue, vacciné, stérilisé, nourri et accueilli plus de 400 chiens. Plus de la moitié ont déjà trouvé une famille, au Maroc ou à l'étranger. Cependant, le Maroc n'est pas encore ouvert à la méthode de sensibilisation et les animaux dépendent complètement des humains pour survivre et sont plus ouverts à la socialisation, le consensus est qu'il n'y a pas d'autre choix humain que de leur donner une chance de vivre dans une maison ou dans une ferme. Le Maroc n'aura malheureusement jamais assez de maisons ou d'abris pour accueillir ses chiens errants, le pays ne bénéficiant que d'un pauvre nombre d'associations qui dépendent des dons de bénévoles. Aucune solution concrète En 2019, une circulaire du ministère de l'Intérieur était envoyée à toutes les communes du Maroc pour « fixer un cadre réglementaire de coopération entre le ministère de l'Intérieur, l'Office national de sécurité sanitaire des produits alimentaires et le Conseil de l'ordre national des vétérinaires dans le domaine de la prévention des maladies dangereuses transmises par les chiens et les chats errants, en particulier la rage. Afin également de prévenir la prolifération de ces animaux de manière dangereuse ». Dans cette circulaire datant de février 2019, l'Intérieur promet la vaccination, la stérilisation, et idéalement l'adoption des animaux. Le département de Abdelouafi Laftit avait même appelé les services d'hygiène des communes à « utiliser des méthodes alternatives moins barbares ". D'ailleurs, un accord avait même été signé par le ministère de l'Intérieur et les départements de l'Agriculture et de la Santé et l'Autorité vétérinaire nationale pour la mise en œuvre de la Trap Neuter Release (TNR). Il s'agit d'une technique qui permet de mieux contrôler les populations animales errantes en les capturant d'abord, puis en euthanasiant les plus dangereux, puis stériliser les autres en les vaccinant avant de les relâcher. Mais apparemment, ni les instructions du ministère de l'Intérieur ni l'accord signé entre les parties précitées ne semblent empêcher cette cruauté.