Le corps enseignant observe une semaine de colère. Après le refus de leur tutelle et du gouvernement de régler les dossiers en suspens des enseignants et cadres de l'enseignement, et sortir les décrets appropriés comme promis, plusieurs catégories d'enseignants ont envahi les rues de la capitale lors des dernières vacances scolaires. Les protestations pacifiques des enseignants (contractuels, cellule 10, diplômés …) à Rabat, les 15 et 16 mars, ont violemment été réprimées par les forces de l'ordre sous prétexte « d'interdiction de rassemblements publics en cette période de crise sanitaire« , alors que, dénoncent les enseignants, des manifestations, « pour d'autres motifs« , ont été « tolérées » dans d'autres régions du Royaume. Les images des enseignants brutalisés lors de leur sit-in pacifique, ont été condamnées à l'unanimité. « Les femmes et les hommes de l'enseignement sont une ligne rouge à ne pas franchir« , a écrit en rouge le Syndicat national de l'enseignement (SNE) dans son dernier communiqué où il dénonce ce qui s'est passé et annonce deux jours supplémentaires (22/23 mars) de grève nationale, précédemment prévue le 5 avril. Cette congestion observée dans le secteur de l'enseignement en plus de la crise sanitaire liée au Covid-19, ne font qu'impacter davantage l'année scolaire des élèves et entraver le bon fonctionnement des établissements scolaires, notamment publics. C'est ce que nous affirme aussi Ali Fanach, président de la Fédération nationale des associations des parents d'élèves du Maroc (FNAPEM), qui considère que ces grèves impactent négativement les élèves et leur niveau scolaire de par ce gaspillage de l'emploi de temps. De nombreux parents se demandent d'ailleurs si leurs enfants vont pouvoir achever leur programme scolaire avec le mode d'enseignement adopté en cette crise sanitaire (alternance présentiel/distanciel). En ajoutant les grèves des enseignants, la réponse pour cette question devient de plus en plus claire. Joint par Hespress Fr, Ali Fanach estime que les grèves et les problèmes des enseignants toutes catégories confondues, ne font qu'impacter le bon fonctionnement des cours dispensés au sein des établissements scolaires publics, et viennent compliquer encore plus les conditions d'enseignement dans le cadre de la crise sanitaire. « On est en train d'exposer les élèves à un gaspillage énorme de leur emploi du temps à l'école. Nous ne pensons pas qu'ils pourront finir leur programme scolaire à temps. Raison pour laquelle au sein de la Fédération, nous appelons à éviter ce genre de congestion dans le milieu scolaire. La situation est déjà anormale à cause de la pandémie, si on y ajoute les grèves et les protestations, c'est la cerise sur le gâteau, dont on n'a pas besoin« , avance notre interlocuteur. Pour les élèves qui passent les examens finaux, pourront-ils s'en sortir avec tout ce qui se passe dans le milieu scolaire ? Ce point a été débattu lors des rencontres du bureau national de la fédération, nous indique Ali Fanach. La FNAPEM l'a même abordé lors d'une rencontre avec le ministre de l'éducation nationale. Cela dit, aucune proposition claire n'a été formulée sur ce qui va être fait. Ce qui peut en revanche se passer, dit-il, c'est peut-être un report des examens. Selon cet acteur associatif, le dossier des enseignants protestataires ne concerne pas uniquement le ministère de l'éducation nationale mais le gouvernement en entier. « Il y a le problème des contractuels, des administrateurs qui appellent à sortir les deux décrets qu'on leur a promis. Donc il y a plusieurs catégories qui demandent leurs droits qu'ils considèrent légitimes. Nous ne sommes pas contre ces gens-là, mais nous sommes contre la politique du gouvernement dans son traitement de cette catégorie de professionnelle de l'enseignement« , relève le président de la FNAPEM. Les images des enseignants violentés n'ont pas laissé les Marocains indifférents. Ces derniers ont largement partagé les vidéos sur les réseaux sociaux et crié au scandale. La Fédération nationale des associations des parents d'élèves du Maroc a également été touchée par ces images et n'a pas hésité à les condamner. « On considère à la Fédération que le fait de violenter les enseignants dans la rue, est une atteinte au système éducatif et au niveau éducatif au Maroc. Les problèmes que connaissent et vivent les enseignants ont un impact négatif sur l'enseignement au Maroc. On a été surpris d'ailleurs de voir que le gouvernement et le ministère de l'Intérieur ont toléré ce genre de pratique dans cette conjoncture difficile de crise sanitaire. Nous aurions pu nous epasser de cette violence« , estime le président de la FNAPEM. Selon Ali Fanach, « cela ne fait que ternir l'image du pays et du degré du respect des droits de l'homme. Non seulement parce qu'il s'agit d'enseignants, mais parce qu'il s'agit avant tout de citoyens qui ont été violentés dans l'espace public. Et puis, quand nous parlons d'enseignant, c'est autre chose. Ce dernier, on doit lui rendre hommage et non le violenter. Sinon, c'est une atteinte à la crédibilité de l'enseignant et l'enseignement« . Face à cette situation plutôt délicate, la FNAPEM appelle « à la résolution définitive des problèmes et dossiers en suspens de toutes les catégories d'enseignants et cadres de l'enseignement, qui peuvent impacter le bon fonctionnement des établissements scolaires publics« . Elle appelle également toutes les parties prenantes à unir leurs efforts pour soutenir les élèves en cette période difficile de crise sanitaire et de grève. « Les élèves auront du mal à finir leur programme scolaire cette année. Notre soutien et le soutien des parents, de la société civile et des familles, pourrait les aider à finir cette année dans de bonnes conditions malgré les contraintes de la crise sanitaire« , recommande Ali Fanach.