Pour la 3è semaine consécutive, le conseil de gouvernement devra poursuivre ce jeudi l'examen du projet de loi relatif à l'usage légal du cannabis. Ajournée à deux reprises, l'adoption de ce texte pourrait pourtant changer bien des choses, si cette activité à pénaliser est bien régulée et dirigée vers la voie qui devrait être sienne, c'est-à-dire un usage médical licite et non récréatif illicite. En effet, le Maroc, qui a adhéré à toutes les conventions internationales sur les stupéfiants, autorisant leur usage à des fins licites, notamment dans le domaine médical, devrait pouvoir être en mesure de tirer bénéfice d'une activité, présente sur le terrain mais de manière anarchique, illégale et injuste, en la transformant en un secteur légal, structuré et transparent dans toutes ses étapes et ses filières. C'est justement le rôle qui devrait être confié à l'Agence de régulation des activités du cannabis, à créer. Cette nouvelle structure dédiée à l'organisation des usages licites du cannabis, sera, ce faisant, chargée de l'exécution de la stratégie de l'Etat en matière de culture, de production, de transformation et de commercialisation du cannabis destiné aux usages médical, cosmétique et industriel. Outre sa mission d'assurer le suivi du cannabis licite dans toutes les étapes de sa chaîne de production, transformation, importation, exportation et commercialisation, notamment dans le dessein de s'assurer qu'il n'est pas utilisé dans une activité illégale et encore que le cannabis illicite n'est pas utilisé dans des activités légales, l'Agence sera également la seule partie habilitée à accorder, renouveler et retirer les autorisations conformément aux dispositions du projet de loi y afférent. Elle assurera également le suivi sur le terrain de toutes les opérations relatives au cannabis licite et son stock. Tout cela au niveau national. Au plan international, l'Agence sera le seul et unique interlocuteur de l'organisme international compétent, auquel elle devra fournir, après consultation des différentes autorités gouvernementales concernées, les évaluations et informations demandées conformément aux obligations internationales du Maroc. Dans ce même cadre, elle publiera des études et recherches liées au cannabis et contribuera à faire connaître les efforts du Royaume dans le domaine du cannabis licite et de ses dérivés et à renforcer la coopération bilatérale, régionale et internationale dans ce contexte. En vue d'assurer le bon déroulement de toutes les opérations liées à cette activité à dépénaliser, l'Agence et les parties concernées, auront à élaborer un cahier des charges qui définit les bonnes pratiques de production, devant être respectés par les opérateurs de chaque activité de la filière. Entre autres, ces cahiers des charges devraient comporter les règles et les bonnes pratiques de culture, de production, de transformation, d'industrialisation, de préparation et de stockage du chanvre indien selon les normes en vigueur, les normes à respecter pour le transport du cannabis et de ses dérivés, les opérations autorisées pour sa transformation, les normes techniques et celles liées au contrôle de la qualité et de l'efficacité de la production, les contraintes environnementales, les techniques d'emballage du produit, de stockage et du maintien de la qualité ainsi que les procédures à suivre pour le traçage des quantités de cannabis reçues et celles qui ont été transférées et fabriquées. L'ensemble de ces mesures à adopter et à mettre en pratique sous un contrôle minutieux, visent à permettre au pays de tirer profit d'un commerce légal, bien structuré et régulé au Maroc comme à l'international, mais aussi des opportunités que cette activité pourrait offrir. Car en dépit de la polémique suscitée par la mise sur la table de l'exécutif de ce projet de loi, et tous les débats politiques et politiciens qui s'en sont suivis, les perspectives sont réelles et le Royaume a tout le droit de les exploiter. Il s'agit essentiellement de profiter des revenus d'un marché mondial du cannabis médical en plein essor avec des prévisions de croissance moyenne annuelle sont de l'ordre de 30% à l'échelle internationale et de 60% au niveau européen. Ceci est d'autant plus vrai que les opportunités de développement du cannabis médical, cosmétique et industriel au Maroc sont réelles et prometteuses, compte tenu des atouts dont dispose le Royaume (écosystème : sol et climat propices, proximité du marché européen en plein essor, savoir-faire ancestral des agriculteurs traditionnels, etc...). Dans cette même perspective, la légalisation du cannabis médical et récréatif dans le monde en général et en Europe en particulier s'inscrit actuellement dans une tendance haussière, d'où la pertinence de saisir ces occasions au plus vite, et d'œuvrer à drainer de grands opérateurs internationaux (industrie de la transformation), pour ensuite développer une filière industrielle nationale. Par ailleurs, sur le plan social, la culture licite du cannabis permettrait de « récupérer et reconvertir » de manière légale, les populations engagées dans la culture illicite, qui pourraient ainsi se défaire de l'emprise des trafiquants, et ce qu'elle implique en termes d'exploitation, d'injustice, de terreur et de violation de la loi. En fin, une dépénalisation de la culture licite et organisée du cannabis aura aussi des retombées environnementales, en ce sens qu'elle permettra d'atténuer les conséquences néfastes des cultures illégales sur l'environnement, tels la déforestation, l'épuisement des sols et des ressources hydriques ou encore la pollution des nappes phréatiques.