La présidente du Conseil national des droits de l'Homme (CNDH), Amina Bouayach a finalement brisé son silence suite à l'affaire du viol et de l'assassinat du petit Adnane. Dans une tribune publiée sur le site du CNDH, la défenseure des Droits de l'Homme, a expliqué pourquoi elle était contre la peine de mort. Commençant par exprimer son état de choc, et ses sentiments de tristesse face à l'horreur et la mort tragique du petit Adnane, violé, assassiné et enterré dans un square près de chez lui à Tanger, Amina Bouayach a dit avoir observé et suivi le débat sur la peine capitale au Maroc qui a suivi cette affaire. « Pour exprimer leur peine et leur colère, plusieurs de nos concitoyens ont tenu à exprimer aux parents endeuillés, leurs condoléances, leur solidarité, et leur compassion. En réponse à l'horreur du crime, certains ont même appelé à prendre revanche contre le coupable et sa mise à mort », a-t-elle déclaré. « J'ai tenu à partager, en tant que Marocaine d'abord, et en tant que défenseure des Droits de l'Homme, quelques réflexions sur deux sujets qui nous concernent tous et nous tiennent tous à cœur », a lancé la présidente du CNDH en s'exprimant sur la question de la peine de mort du viol et de la pédophilie. Pour elle, la peine capitale est « l'une des atteintes les plus graves au Droit à la Vie », un droit qu'elle qualifié « originel, suprême et absolu » sans lequel aucun droit, aucune liberté, aucune Justice ne peut exister. Se basant sur les peines prévues par la Cour Pénale internationale (CPI), « qui traite des crimes les plus graves, les plus odieux et les plus barbares que l'on puisse imaginer, tels les génocides, les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité, ne prévoit pas dans ses statuts la Peine de Mort comme châtiment ». Ce qui explique l'interdit que représente l'atteinte à la vie pour tous ceux qui portent à coeur la défense de la dignité humaine et de la justice. Elle affirme par ailleurs que sa position anti-peine de mort n'est pas la résultante d'aucune « idéologie idéologie ou culture, ni au dogmatisme péremptoire d'un esprit +occidentalisé+, mais est fondé plutôt sur la réflexion, le pragmatisme, et l'attachement aux principes universels de dignité, de Justice et de liberté ». Amina Bouayach estime à ce titre que l'abolition de le peine capitale est un prérequis à l'Etat de droit, pour un société juste, libre et où la dignité des citoyens est non seulement respectée mais protégée car, l'erreur est toujours possible et qu'en cas de peine capitale visant un innocent, la réparation n'est pas possible. Se basant sur la Constitution marocaine, la défenseuse des doits de l'Homme explique que l'article 20 est clairement contre la peine capitale. « Le droit à la vie est le droit premier de tout être humain. La loi protège ce droit », cite-elle. « Non seulement notre Constitution ne prévoit aucune exception au Droit à la vie, mais, en sus, le législateur a l'obligation constitutionnelle de le protéger de toute atteinte ou infraction ». Et d'ajouter qu' »il ne peut être porté atteinte à l'intégrité physique ou morale de quiconque, en quelque circonstance que ce soit et par quelque personne que ce soit, privée ou publique », en citant la Constitution et estimant qu'une « interdiction plus catégorique n'existe point ». D'autre part, la présidente du CNDH ajoute que l'application de la peine de mort n'a jamais eu d'effet dissuasif pour les criminels et « l'application de celle-ci ne fera que provoquer le sentiment d'injustice le plus profond et une soif, jamais inassouvie, pour la brutalité et la violence ». Concernant le cas du petit Adnane, Mme. Bouayach affirme que l'application de la peine de mort à l'encontre du présumé coupable ne règlera « en rien la problématique du viol et de la pédophilie au Maroc » jugeant que « les dispositions légales y afférents, sont ambigües, confuses et non prévisibles, et l'application de la loi non-systématique ». A ce titre, elle explique que la loi marocaine ne nomme pas le viol et la pédophilie. « L'article 486, le code pénal ne définit le viol que dans le cas où +un homme a des relations sexuelles avec une femme contre le gré de celle-ci+. Le terme de +femme+ est interprété comme étant une personne de sexe féminin majeure – ou en âge de se marier » et ajoute que qu'aucune définition de l'âge de consentement n'a été mentionné dans ledit article. « Le viol, considéré comme un crime, est passible d'un minimum de 5 ans de réclusion. Curieusement dans notre code pénal, quand +l'homme qui a des relations sexuelles avec la femme contre son gré+ est son mari, il n'y a plus de viol », malgré que cela soit un viol également. Elle explique comment la loi marocaine ne fait considère pas le consentement de la femme comme nécessaire dans le cadre du mariage. En fin, Amina Bouayach reprend le terme « 'attentat à la pudeur » qui est utilisé pour les cas de viol sur d'enfants mineurs des deux sexes, ou de viol d'un adulte de même sexe. La loi marocaine ne considère ces deux crimes que comme des « délits » lorsqu'ils sont commis sans violence soit une peine de 2 à 5 ans. Par ailleurs, le mot violence lui-même n'est pas défini dans la loi. « Le délit +d'attentat à la pudeur sans violence+ a été, par exemple, également appliqué dans les cas d'inceste sur mineur comme dans le cas de deux jeunes, une fille et un garçon, qui se tenaient la main dans la rue ! », a-t-elle fait remarquer.