Donner du sang pour sauver des vies : Un acte citoyen et humain auquel les Marocains s'adonnaient sans restriction, même pendant le mois sacré du Ramadan, qui était même considéré comme une période de bonne collecte. Mais, les choses ont changé, la pandémie du coronavirus est passée par là. La relation don de sang-contamination au covid-19 n'a jamais été établie, beaucoup de messages ont été lancés pour rassurer qu'il n'y a aucun risque à donner son sang en ces temps d'épidémie, rien n'y a fait, et ajouté à l'effet conjugué Ramadan/Couvre-feu nocturne, le nombre de donneurs a continué de baisser jusqu'à devenir alarmant. « Vers le 23 mars, le stock du Centre national de transfusion sanguine et d'hématologie (CNTSH) n'était plus que de 300 poches à l'échelle nationale, alors que nos besoins sont de 800/jour », nous explique Dr El Amraoui Najia médecin responsable de la communication et promotion au CNTSH de Rabat. La situation devenait critique, et l'alerte a été donnée. « Nous avons recouru dans un premier temps à la DGSN, dont les membres ont massivement afflué vers les centres de transfusion à travers les Royaume, suivi par ceux des forces auxiliaires, et ainsi encouragés, les citoyens s'y sont progressivement mis à leur tour », confie Dr El Amraoui à Hespress FR. Et d'ajouter : «A notre tour, nous faisions le nécessaire à notre niveau pour sécuriser toute l'opération: La distanciation était respectée, les donneurs étaient équipés de bavettes (avant même que leur port ne soit devenu obligatoire), et usaient de gel hydro-alcoolique à l'entrée comme à la sortie, de même que les centres étaient désinfectés un jour sur deux ». Sécuriser l'opération de don En fait, nous dit-elle, « nous avons commencé à appliquer les recommandations de l'OMS depuis le tout début, en ce sens que le questionnaire précédant l'acte de don a été adapté à la situation, avec l'introduction de questions relatives à la pandémie, notamment si le donneur revient de l'étranger, et le cas échéant, il est écarté pour une durée de 28 jours avant de pouvoir se représenter pour donner son sang ». La responsable souligne à ce propos que l'opération de dons en cette période de confinement, s'est inscrite en droite ligne des consignes préventives décidées par les autorités, en ce sens qu'il était exigé des donneurs de disposer de l'autorisation de sortie, et de se présenter aux centres avec les précautions édictées et dans le temps autorisés par les autorités, de même que les caravanes où se déroulaient auparavant des opérations, ont été arrêtées au vu de la promiscuité qu'elles engendraient. Tous les centres au Maroc sont ouverts après la prière du soir, et certaines personnes viennent avec des autorisations, souligne-t-elle. Ce faisant, poursuit Dr El Amraoui, les stocks ont peu à peu été renfloués, et les opérations se poursuivent, en étroite collaboration avec les autorités et les forces de sécurité, « qui non seulement veillent à l'ordre public et au respect des règles de confinement, mais sont aussi des donneurs actifs ». Dr El Amraoui nous éclaire, par ailleurs, sur le don de sang durant le mois sacré. Elle rappelle tout d'abord, que vu que les donneurs ne peuvent venir que le soir après la rupture du jeune, à compter de 2012, des opérations de collecte étaient organisées dans les mosquées après la prière des Trawih, dans le cadre d'un partenariat avec le ministère des Habous, la Fondation Mohammed VI pour la promotion des oeuvres sociales des préposés religieux, et qui permettait au CNTSH de constituer des stocks confortables pur faire face aux besoins quotidiens et aux imprévus. Chercher des alternatives Toutefois, relève-t-elle, « avec le confinement, le couvre-feu nocturne et la fermeture des mosquées, les choses se sont compliquées, les 3 premiers jours furent très difficiles, et il fallait trouver d'autres alternatives». Elle a tenu à cet égard, à évoquer une expérience qu'elle qualifie «de grand succès », et qui est menée à Salé, en étroite collaboration avec les autorités et des associations locales de la société civile. « C'est une expérience très riche et très enrichissante aux plans aussi bien humain que professionnel. Tout le monde y a mis du sien : Les autorités ont assuré l'ordre, la logistique et le transport des donneurs, la société civile a fourni le local et drainé un nombre considérable de donneurs, et le centre a apporté ses équipements, son matériel et ses équipes, et a assuré le travail, le tout dans une harmonie parfaite, qui a permis de faire une moyenne de 120 dons/jour», se réjouit Dr El Amraoui. Pour la responsable, les dons de sang doivent se poursuivre, quelles que soient les circonstances, car les besoins sont importants, et des imprévus peuvent surgir à tout moment, parce que même si la pression n'est plus la même en ces temps de confinement, les hôpitaux et cliniques continuent de recevoir régulièrement les cas urgents, les accidentés, les femmes enceintes, les malades chroniques notamment ceux présentant des pathologies cancéreuses...etc. Respecter l'état d'urgence sanitaire Mais, relève-t-elle, en ces conditions particulières, tout doit se faire dans le respect total des décisions édictées par les autorités. « Nous avons dans ce sens adopté certaines pratiques adaptées », fait-elle remarquer, précisant que pour éviter que certaines personnes « ne profitent de l'autorisation d'aller faire des dons de sang, pour sortir et violer l'état d'urgence sanitaire, le CNTSH a produit des flyers qui sont remis aux autorités pour être distribués aux citoyens, pour une vérification au préalable des critères de don, et éviter ainsi des déplacements inutiles et risqués ». Dr El Amraoui conclut en invitant les donneurs « à continuer à faire preuve de solidarité et de générosité, même durant cette période de confinement et de couvre-feu nocturne». Il suffit pour cela, explique-t-elle, de cocher la mention «circulation pour des raisons impérieuses » figurant sur l'autorisation de circulation à faire signer par les autorités. Pour rappel, en ces temps de lutte contre la propagation du coronavirus, les professionnels de la transfusion sanguine sont classés 3è en terme de risques par l'organisation mondiale de la santé, à l'échelle internationale, après le service Covid-19 et le service réanimation, l'occasion de rendre hommage à ces personnes qui travaillent dans l'ombre pour sauver des vies, mais dont l'action n'est pas souvent valorisée.