Damas, qui veut obstinément reprendre le contrôle de l'intégralité du pays, n'hésite plus à bombarder des zones civiles, y compris des hôpitaux et des marchés au nord de la Syrie à Idlib dernier bastion jihadiste du pays, sous protection turque, lui échappant encore. L'armée syrienne continue son offensive sans frémir et les combats font rage dans ce territoire de la province du Nord-Ouest syrien tenue en partie par les combattants du HTS (Hayat Tahrir al-Cham ex-branche syrienne d'al-Qaida). L'ONU estime que près de 990.000 personnes ont dû quitter ce territoire depuis décembre 2019 pour fuir les combats en direction de la frontière turque. Ces déplacements de population constituent un drame humanitaire sans précédent en Syrie, en proie à un conflit sanglant qui dure depuis l'année 2011. Ce sont majoritairement des femmes et des enfants qui en sont les principales victimes (60% des déplacés sont des enfants selon l'ONU). L'exode forcée se fait vers le nord de la province d'Idlib et la Turquie qui accueille déjà plus de 3,6 millions de réfugiés syriens d'où l'exaspération d'Ankara. Damas, dans ses velléités de reconquête des territoires perdus depuis 2011 avec l'appui des forces russes guerroie comme pour les ex-provinces rebelles qui depuis sont tombées entre ses mains, en bombardant délibérément des zones civiles. Cela lui a permis de reconquérir les anciennes villes révolutionnaires de Khan Sheikhoun, Maraat al-Nouman ou encore Saraqeb, qui ont été abandonnées par leurs habitants avant l'entrée des troupes pro-régime. Les forces syriennes sont également parvenues à récupérer la fameuse autoroute qui relie Alep, la grande métropole du Nord, à Damas. Plus de 1 500 civils ont été tués durant cette offensive à Idlib depuis décembre dernier. D'un autre côté, les réactions d'aventurisme militaire turc de ces derniers jours ne risquent pas d'arranger les choses. Les dernières escarmouches mortelles entre soldats turcs et syriens ont poussé Ankara à envoyer un millier de chars et blindés, ainsi que des commandos à Idlib. On est bien loin des accords de Sotchi de 2018 où Russie et Turquie coulaient la parfaite amitié. Aujourd'hui Ankara et Moscou se rejettent la patate chaude et s'accusent mutuellement. La Turquie reproche à la Russie mais aussi à l'Iran de ne pas avoir tenu leurs engagements de contraindre les troupes de Bachar Al-Assad à rester en dehors des zones proches des postes d'observation turcs comme le stipule l'accord de désescalade de Sotchi (2018) et menace de recourir à l'option militaire si les soldats du régime syrien ne se retiraient pas des zones proches des postes d'observation turcs (quatre sont désormais dans la zone contrôlée par Damas). Inacceptable pour Moscou qui, impute à Ankara de ne rien avoir fait pour « neutraliser les terroristes à Idlib ». Tension à son comble !