Il est comme un air de malaise à la Royal Air Maroc, et sa gestion s'en ressent. La semaine écoulée, près d'une vingtaine de vols ont été annulés ou déprogrammés d'où bien des mécontentements aussi bien à l'interne qu'à l'externe. Cette situation s'apparente étrangement à la crise qui avait sévi en 2010 à la RAM et qui avait conduit à un large dégraissage (moitié de l'effectif en départ négocié, volontaire ou forcé) en plus de « allègement » des frais de l'entreprise sous toutes ses coutures. Avec cette opération, on avait cru à la fin de la traversée du désert pour notre compagnie nationale mais apparemment c'est non ! Lors de l'exercice écoulé, la compagnie a été en difficulté et loin de ses prévisions. Son programme de vols tout-cargo peine à décoller si l'on peut dire. « Son unique Boeing 767-300BCF, opérationnel depuis juin 2018, sera envoyé vers de nouvelles destinations tout-cargo, telles que Paris CDG et Niamey à raison d'une fréquence par semaine » chacune. Royal Air Maroc dessert deux autres destinations fret en Europe, Bruxelles à raison d'une fréquence hebdomadaire et Francfort deux fois par semaine. Le nouveau programme tout-cargo prévoit également le doublement de fréquences sur Bamako et sur Abidjan (deux fréquences par semaine pour chaque liaison), nous conte Air Journal. Bien peu pour rentrer dans ses frais selon une source interne. « Un avion est fait pour voler », nous dit-elle. Mais qu'on se le dise, la RAM qui se veut leader du fret aérien en Afrique, doit cette notoriété aux capacités en soute de sa flotte moyen et long-courrier (58 avions dont 9 gros porteurs) et pas qu'au Boeing 767-300BCF. Concrètement, les avions (non cargo) de la RAM ne transportent pas que des passagers et leurs bagages mais également des colis de fret dans leur soute. Des frais oui, de la rentabilité non En 2019 la Royal Air Maroc se soulageait de 400 MDH pour reconvertir un de ses avions long-courrier, un Boeing 767-300 en l'occurrence. Ce dernier passait du transport de passagers à l'activité de fret répondant ainsi, selon la RAM, à la demande croissante des opérateurs économiques marocains et étrangers œuvrant plus particulièrement sur le Continent africain). Qui de mieux pour transformer cet avion dans l'art et les règles que l'avionneur américain Boeing qui s'empressa de le faire dans le cadre de son programme « Boeing Converted Freighters » pour livrer en grandes pompes la compagnie nationale en Avril 2018. Mais voilà, depuis, les dividendes de cette opération sont loin d'être à la hauteur de l'exploitation de cette machine peu utilisée par manque d'une offensive commerciale. « Ce désœuvrement si l'on peut dire coûte à la compagnie nationale chaque année 140 MDH« , nous confie notre source. « Cette perte annuelle sèche serait conditionnée, nous dit-on, par la non-exploitation de l'avion et aux diverses charges liées (frais du personnel dédié exclusivement à cette machine comme les pilotes et agents qualifiés, entretien de l'avion etc.) ». Un responsable interrogé à propos de la bonne santé du service cargo, a pour ainsi dire a botté en touche en nous dirigeant vers la direction Communication de la RAM qui selon lui, était la seule habilitée à répondre à nos questions. Cette dernière n'ayant pas pu ou voulu répondre aux demandes de Hespress FR, on s'en tiendra là. Continuer de voler…même à perte Cela étant, les dégâts ne se limitent pas qu'à l'immobilisation de cet avion en particulier, d'autres incidences viennent entacher la bonne gestion de notre aérien national, la RAM. C'est un secret de polichinelle, les ventes de billets sont en chute libres et le taux de remplissage des avions de la RAM sont en deçà de la norme dédiée. La vingtaine de vols annulés ou déprogrammés la semaine dernière, n'en ont pas pas pour autant poussé la RAM à « déclencher la sonnette d'alarme« . Notre compagnie est exceptionnelle! En ce sens où quand elle va mal, elle continue de voler même à perte. Sinon comment concevoir que des lignes récemment ouvertes aux Etats-Unis, Boston et Miami ne se remplissent au mieux qu'à 30% de leur capacité?. Des vidéos en ce sens circulant sur les réseaux sociaux sont là pour en témoigner. Elargir les lignes de la RAM c'est bien, surtout aux Etats-Unis. Mais encore, faut-il avoir correctement étudié le marché et ciblé une clientèle censée remplir les avions. Que dire aussi des destinations à peine ouvertes qui ont mis clé sous paillasson. Nairobi en est un bel exemple. Desservi directement en B767-300, il a muté en B737-800, voire B737-800 avec escale à Ndjamena pour in fine faire disparaître, Nairobi-Jomo Kenyatta, des radars. C'est connu, la compagnie excelle dans le moyen-courrier. L'Europe et plus particulièrement depuis l'instauration de sa politique de Hub il y plus d'une décennie, l'Afrique, ont fait le bonheur des caisses de la RAM, mais pas depuis, qu'à chaque fois que les réservations ne sont pas à la hauteur on annule ou on couple des vols en imposant une escale aux passagers. Cette politique de « bricolage » est loin de satisfaire le client et si l'on ajoute la scoumoune ambiante à la RAM comme les deux Boeing 737- Max cloués au sol, dont l'un n'est même pas encore homologué (n'ayant jamais atterri sur une piste d'un aéroport à renommée internationale) ou la fermeture de la ligne de Pékin pour cause de coronavirus alors qu'elle venait juste d'ouvrir (6 ou 7 vols tout au plus), on peut dire sans fierté aucune que notre compagnie bat de l'aile.