En marge de la journée nationale des détenus, le musée de Bank Al Maghrib (BAM) à Rabat a organisé en partenariat avec la Délégation Générale à l'administration pénitentiaire et à la réinsertion (DGAPR) et le Conseil national des droits de l'homme (CNDH), une exposition intitulée « Créations d'au-delà des murs ou Quand l'art libère ». Une manifestation qui durera de ce vendredi 13 décembre au 1er mars 2020. De la volonté conjuguée de trois institutions donc, est né le projet d'organiser une exposition qui met aussi bien la lumière sur les créations artistiques réalisées par les détenus, qu'elle ne lève les voiles sur leurs créateurs anonymes, car détenus. Photo Mounir Mehimdate L'exposition, la première de son genre, propose un parcours en deux temps. Une découverte des multiples aspects de la créativité artistique chez les détenus marocains venant de divers établissement pénitencières du royaume, ainsi qu'une immersion de l'autre côté à la rencontre de ces créateurs anonymes à travers des clichés et un film documentaire réalisé par l'artiste Darem Bouchentouf. Au musée de la Banque centrale à Rabat, un premier espace dédié aux oeuvres et objets artisanaux a été aménagé. Il se décline en quatre unités de sens qui s'enchaînent et se complètent. « Exprimer ses douleurs », « Maudire ses maux », « vaincre sa peur »… Les thématiques se prêtent à une lecture filigranée des méandres de cheminement libérateur des détenus. Ils sont artisans, peintres ou sculpteurs. Photo Mounir Mehimdate De l'expression de la souffrance à la libération progressive de l'esprit, l'oeuvre artistique permet à ces détenus d'exorciser leurs douleurs, de se reconnecter à leur vie d'avant, de s'extraire du contexte carcéral pour se réconcilier avec eux-mêmes et accéder à une nouvelle vie sociale. C'est le cas du détenu de la prison d'Azrou, Tarik, qui nous déclare que « la première intention » qu'il a eue en choisissant de prendre un pinceau et de commencer à peindre sur une toile était de « créer un espace personnel de communion » en pensant à son fils qu'il n'a toujours pas eu la possibilité de voir. La deuxième partie de l'exposition « De l'autre coté », propose une expérience immersive en perçant cette barrière infranchissable qu'est la prison. Elle convie le visiteur à apercevoir, capter ressentir, ou vivre le temps d'un instant le statut du prisonnier. Des photographies limpides, majoritairement en noir et blanc, qui nous plongent dans l'univers « fermé » des pénitenciers. Photo Mounir Mehimdate « Nous poursuivons notre partenariat avec BAM comme l'année dernière où nous avons suggéré l'impression de billets de banque de 250 DH à l'occasion du 70e anniversaire de la célébration de la Journée mondiale des droits de l'Homme« , déclare la présidente du CNDH Amina Bouayach. L'objectif, poursuit la responsable, est d' »élargir la base des soutiens du Conseil en matière de droits de l'Homme ». Quant au partenariat avec la DGAPR, Bouayach explique qu'il se porte sur différents autres sujets, comme « le suivi des conditions de détention des prisonniers« . Pour sa part, le Secrétaire général de la DGAPR, Younes Jabran a insisté sur le fait que le vernissage d'aujourd'hui « permet de montrer que le détenu n'est pas en marge de la société« , et que « les peines privatives de liberté ne privent pas le prisonnier de sa dignité« . Photo Mounir Mehimdate Cette exposition artistique aux dimensions sociales et humaines, offre donc l'occasion aux détenus de renouer avec la vie en dehors, tout en invitant le grand public à renouveler son regard sur la prison et ses pensionnaires.