Depuis sa nomination, le ministre de la Justice, Abdellatif Ouahbi, n'en finit avec une polémique que pour en créer une autre. La dernière en date est celle liée aux résultats de l'examen d'aptitude à la profession d'avocat. Retour sur cette polémique en six actes : Soupçons de népotisme Tout commence le dernier jour de 2022. Le ministère de la Justice publie la liste des 2.081 candidats au certificat d'aptitude à la profession d'avocat (CAPA) admis à passer les épreuves orales, dont la date n'a pas encore été fixée. Le lendemain, les rumeurs et les accusations de «népotisme et de clientélisme» fusent sur Internet. Plusieurs influenceurs et activistes, mais aussi des candidats à l'examen d'aptitude pour l'obtention du CAPA, ont révélé « l'existence sur la liste des admis de noms liés par lien de parenté ou professionnel avec des hauts fonctionnaires du ministère de la Justice ou à des bâtonniers et des avocats appartenant à divers barreaux». Déclarations polémiques sur son fils Au milieu de ces accusations, le ministre de la Justice, Abdellatif Ouahbi, sort lundi expliquer l'existence sur les listes de noms de candidats admis qui correspondant aux noms de personnalités éminentes dans le domaine professionnel du secteur de la justice. Entre autres arguments, Ouahbi avance que les copies des examens du barreau avaient été corrigées automatiquement, par des machines selon ses termes, et non pas par des humains. Et aussi que le jury comprenait neuf juges, dont des représentants du Ministère public et d'autres du ministère de la Justice. Au tout dernier bout de sa déclaration donnée en marge de la présentation du rapport 2021 du Ministère public, le secrétaire général du PAM n'a pas seulement échoué à étouffer la polémique, mais en a créé une autre en parlant de son fils. Lire aussi: Vidéo. Fier d'envoyer son fils étudier au Canada, Ouahbi crée la polémique Interpellé sur le cas de son fils, le ministre a déclaré: «Mon fils a deux licences, il étudie à Montréal. Son père est riche et lui a payé ses études à l'étranger. C'est une question qui se pose ça? Mon fils n'est-il pas un citoyen?». Colère des avocats (sit-in) Les candidats ayant échoué aux examens, pour la plupart des étudiants, mais aussi des avocats manifestent devant le Parlement à Rabat pour protester contre les résultats du concours avec un seul mot d'ordre: l'ouverture d'une enquête. Les slogans scandés par les manifestants reflétaient le niveau d'exacerbation relative aux déclarations du ministre: «Nous sommes les fils des pauvres et eux sont ceux des ministres». Les manifestants ont également appelé à «mettre fin à la corruption». Organisés au sein d'une coordination, qui a appelé à la manifestation du mardi, les candidats non admis appellent à mettre en lumière «les dysfonctionnements et manquements qui ont entaché l'examen». Plainte contre Ouahbi et les admis au CAPA Les candidats ayant échoué audit examen ont été approchés par le Parti Marocain Libre et son secrétaire général, Isaac Charia, pour porter plainte contre le ministre. «Face à l'impact sur l'image du Maroc de ces pratiques honteuses, qui ont été rapportées par les médias internationaux, le Parti Marocain Libre a décidé de porter plainte contre le ministre de la Justice, Abdellatif Ouahbi, devant le Procureur général près la Cour de cassation de Rabat, et contre tous ceux qui ont bénéficié des résultats de l'examen de manière suspecte», a déclaré Charia sur Facebook. «Par conséquent, nous appelons toutes les victimes de cet examen suspect à contacter la commission juridique du parti afin de prendre les mesures nécessaires dans les plus brefs délais», a-t-il poursuivi. Ouahbi, en mode com de crise, s'excuse! Sur la chaîne nationale Al Aoula, le tonitruant homme politique a estimé que ses propos sur son fils ont été mal interprétés. «Quand la presse s'en prend à moi, il n'y a pas de problème, mais qu'elle s'en prenne à ma femme... Qu'est-ce qu'elle a à voir avec tout ça?», a-t-il dit sur le plateau de l'émission «Point à la ligne» diffusée dans la soirée de mardi, avant de temporiser: «Ce n'est pas la presse qui s'en prend à elle, ce sont ces sites électroniques qui portent préjudice au travail journalistique». Lire aussi: Vidéo. Abdellatif Ouahbi présente ses excuses à « l'université marocaine » «Et mon fils? Soi-disant parce qu'il est fils de ministre, il n'a pas le droit de réussir», a-t-il ajouté. «Mon fils a deux licences, il étudie à Montréal. Son père est riche et lui a payé ses études à l'étranger», a déclaré le SG du PAM tout en présentant ses excuses à «l'université marocaine». Il a, dans ce sillage, rappelé qu'il était lui-même issu de «l'université marocaine». « J'ai été provoqué lorsque j'ai dit que mon fils a deux licences. Effectivement, il en a deux: une qu'il a eue au Canada et une seconde qu'il a obtenue au Maroc. Il a étudié au Maroc, avec les enfants marocains. Il est le fils de l'université marocaine, tout comme moi», a-t-il assuré. «Si mes propos ont été mal interprétés, je présente mes excuses. Je présente mes excuses à l'université et aux professeurs qui m'ont enseigné», a-t-il enchaîné. L'affaire s'invite au Parlement, d'autres manifestations à venir Le ministre est loin de tourner la page de la présente tourmente où il se trouve. Il y a d'abord, les «non admis» au concours qui appellent toutes les parties concernées par les résultats de l'examen à «manifester massivement de manière pacifique (…) afin de faire entendre leur voix auprès des autorités responsables et dénoncer la corruption et les corrompus qui ont manipulé l'examen et ses résultats». Et il y a aussi la députée de la Fédération de la gauche démocratique (FGD), Fatima Tamni, a déposé à la Chambre des représentants une question écrite au ministre de la Justice. Dans sa question, Tamni interroge Ouahbi sur lesdits dysfonctionnements ayant affecté les résultats de l'épreuve écrite de l'examen pour l'obtention du certificat d'aptitude à la profession d'avocat (CAPA). Entre autres points importants, elle s'est interrogée sur «la mauvaise gestion de l'épreuve écrite» et n'a pas caché sa surprise face à «la participation de l'association des barreaux du Maroc au processus de correction automatique de l'épreuve écrite, après avoir refusé l'annonce de l'examen et annoncé son boycott». La représentante a également interrogé le ministre sur les démarches et les mesures qu'il compte entreprendre pour corriger cette situation et «dédommager les personnes qui ont été privées de leur droit de passer un examen avec des chances égales et justes».