La Ligue Algérienne de Défense des Droits de l'Homme (LADDH) a brossé un sombre tableau de la situation des droits de l'Homme dans le pays, en évoquant un "recul" dans ce domaine. "Il y a un recul, y compris pour des textes élaborés les siècles derniers", a déploré la LADDH dans son dernier rapport intitulé "Rétrospective LADDH, rapport 2018, situation des droits humains, focus sur les libertés", rendu public samedi. Le régime algérien espère que les militants des droits humains, mais aussi d'une manière générale tous ceux qui font bouger les choses, en l'occurrence les acteurs sociaux, civils et politiques, soient gagnés en effet par la lassitude, le pessimisme et l'usure, signale le document. La Ligue algérienne parle aussi d'un "diktat" de l'administration et de "tracasseries bureaucratiques" rendant "difficile" l'exercice des droits d'association, d'organisation et de réunion. Revenant sur la loi relative aux associations, adoptée en 2012, la Ligue a signalé la "non-disposition des autorités à considérer la société civile comme un partenaire et un médiateur social. Pis, elle a été un frein pour l'ensemble des acteurs de la société", a poursuivi la Ligue, qui a souligné que son "abrogation devient une nécessité, voire une urgence". Le rapport a noté que le régime politique s'est attelé, ces dernières années, à remettre en cause cette liberté des individus à s'exprimer de manière isolée ou collective, "laquelle peut résulter d'un groupe ou d'une communauté d'individus associés durablement dans une structure. Comme il s'attelle à exercer un contrôle sur les médias et sur les journalistes". Le rapport, qui recense les arrestations ces derniers mois de journalistes et de blogueurs, a déploré de même le fait qu'en 2018, manifester à Alger soit toujours interdit, alors que le pouvoir politique a décrété officiellement la levée de l'état d'urgence. S'appuyant sur un rapport réalisé en avril 2017 par Human Rights Watch avec le concours des associations algériennes, la LADDH a aussi dénoncé la mauvaise prise en charge des femmes victimes de violence. S'agissant du droit des enfants, le constat est tout aussi amer : la "situation est encore problématique" car les chiffres avancés par les institutions et organismes officiels au sujet des violences que les enfants subissent sont "alarmants". Retenant l'absence de garanties pour la protection des migrants, autre sujet d'une brûlante actualité, l'organisation a constaté que cette catégorie n'a pas droit à des contrats de travail et ne bénéficie d'aucune protection ni assurance (travail, expulsion, etc.). S'agissant de l'émigration, la Ligue a fait observer qu'elle s'accroît et que la hausse des départs ou tentatives de départ est suffisamment importante pour que les autorités algériennes elles-mêmes s'en inquiètent. La LADDH a considéré que les autorités doivent prendre à bras-le-corps la question des droits de l'Homme, estimant que si le régime politique "continue à ne pas respecter (ces droits), il aura fait le choix du chaos, qu'il assumera devant l'histoire, alors qu'ailleurs, on célèbre les droits de l'Homme de la 5e génération". Selon le rapport de la LADDH, près de 11 000 actions de protestation ont été enregistrées sur la totalité du territoire algérien, en 2018, notamment dans les "zones rurales isolées". Dans ces régions où la précarité est devenue une norme, "le citoyen lutte par tous les moyens afin d'assurer sa survie et bénéficier de son droit au développement, sachant qu'il est privé des simples nécessités de subsistance digne, telles que l'eau, le gaz, les communications et voies adéquates de transport", indique la LADDH dans son rapport annuel.